Rishiraj Dookhea
Paralysé des membres inférieurs après avoir reçu une balle dans le dos, Rishiraj Dookhea, 22 ans, était, à jeudi dernier, toujours hospitalisé. Selon Vasoo Gopaul, le beau-frère du blessé, un homme en civil courait derrière la victime qui fuyait et lui a tiré dans le dos pour l’immobiliser. “Mon beau-frère courait; un homme lui a tiré dans le dos,” raconte Vasoo Gopaul.
Les membres de la ‘Anti-Drug and Smuggling Unit’ (ADSU) de la police intensifient leur combat contre la drogue actuellement. Dans ce contexte, sur la base de certains renseignements, ils se sont rendus à la Cité la Ferme le samedi 17 avril dernier pour arrêter Rishiraj Dookhea, un présumé trafiquant de drogue. Une opération a été montée pour le coincer. Ainsi un membre de l’ADSU s’est fait passer pour un acheteur; il devait réceptionner du gandia dont la valeur marchande est estimée à Rs 25 000. Toutefois, il devait être démasqué et le présumé trafiquant a pris la fuite. Selon la police (voir réaction plus loin), en s’enfuyant, il alerta un groupe de personnes; celles-ci se sont armées de sabres pour attaquer l’officier de l’ADSU. Toutefois, après avoir, à plusieurs reprises, sommé Rishiraj Dookhea de se rendre et dans une tentative de disperser le groupe d’énergumènes, le policier de l’ADSU n’a eu d’autre alternative que de tirer deux coups de feu. Le suspect, atteint au dos, s’est réfugié dans la cour d’un de ses voisins où il a été capturé. Il avait en sa possession 95 pouliahs et 54 rouleaux de gandia.
Toutefois, c’est une tout autre version que nous donne Vasoo Gopaul, l’époux de Lutchmee, 27 ans, la soeur de Rishiraj. D’après son récit, il s’affairait à mettre des ‘fataques’ à sécher sur une monticule de terre donnant sur le réservoir de La Ferme quand il a vu son beau-frère qui courait. Il y avait un homme à sa poursuite : “Je ne savais pas que cette personne était de la police. Rishiraj courait et la personne le suivait. Il lui a tiré des coups de feu dans le dos. Bien qu’il ait été atteint au dos, mon beau-frère a continué à courir et il s’est réfugié dans la cour d’un de mes voisins”. Il soutient également que le policier a été rejoint entre-temps par ses collègues. “Ils ont traîné mon beau-frère jusqu’à mon camion qui était à environ cinq mètres de la maison où ils l’ont capturé. Je leur ai demandé pourquoi un des leurs avait tiré des coups de feu sur mon beau-frère et ils m’ont alors révélé qu’ils étaient de l’ADSU, qu’ils venaient de l’arrêter pour trafic de drogue. Franchement, j’ignore si mon beau-frère était un trafiquant parce que jamais je ne l’ai vu vendre, ni même en possession de drogue”, raconte-t-il. Et d’ajouter : “À aucun moment, je n’ai vu un groupe de personnes armées de sabres menacer les policiers de l’ADSU”.
La nouvelle de la blessure par balle s’est répandue dans la région de la Ferme comme une traînée de poudre. Le blessé a été conduit d’urgence à l’hôpital Victoria, Candos, où il a subi une opération le lendemain de son admission. De source hospitalière, nous avons appris que la balle s’était logée dans la colonne vertébrale et a endommagé des nerfs. Résultat : Rishiraj Dookhea ne pourra plus marcher, ses membres inférieurs (du bassin jusqu’aux orteils) sont paralysés.
Lundi dernier, au poste de police de Vacoas, Vasoo Gopaul, le beau-frère de Rishiraj Dookhea, a porté plainte contre les officiers de l’ADSU incriminés pour brutalité policière. “C’est inadmissible, cet incident a rendu mon beau-frère infirme”, proteste Vasoo Gopaul. Il ajoute qu’il préfère attendre la fin de l’enquête policière pour envisager des poursuites légales contre le présumé agresseur.
Une reconstitution des faits a eu lieu lundi et mercredi derniers avec la participation des membres de l’ADSU qui avaient participé à cette arrestation. Le suspect Dookhea a retenu les services de Me Ashley Hurhanghee. À jeudi après-midi, il n’avait pas encore donné sa version des faits.
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Le policier a fait feu après “maintes sommations”
Selon la version que la police a donnée à 5-Plus, “pendant l’opération, des individus armés de sabres ont tenté d’agresser les éléments de l’ADSU et ces derniers, après maintes sommations n’ont eu d’autre choix que de faire usage d’arme à feu et un suspect a été blessé”. Elle avance qu’une enquête a été initiée par la Western Division CID sous la supervision du DCI Soopun sur cet incident.
1982 : La police tire sur Clifford Esther
Un livre racontant son histoire bientôt en librairie
Le 5 mars 1982, Clifford Esther, âgé alors de 22 ans, fut atteint d’une balle tirée dans la bouche par un policier. La balle lui transperça le crâne. Il survécut après avoir passé environ deux mois dans le coma mais les séquelles sur sa santé sont lourdes. Il a perdu l’usage de son bras droit et de son oeil gauche; en outre, il n’a plus ses dents de devant. Pour raconter ce calvaire qui a changé le cours de sa vie, Clifford Esther sortira bientôt un livre : “Le titre n’a pas encore été trouvé mais le scénario est dans ma tête”. Il se rappelle cette journée comme si c’était hier. Selon lui, il était 05h30; il logeait avec une touriste allemande et son cousin dans un bungalow à Rivière Noire : “La police a frappé à la fenêtre. Quand je me suis levé pour ouvrir, les policiers m’ont demandé où se trouvait Sylvio Suntoo (celui-ci était soupçonné d’être impliqué dans le braquage de la succursale de la State Bank à Curepipe en 1982 qui avait fait un mort : un policier, ndlr). Je n’avais jamais entendu parler de cette personne. Ils m’ont frappé à deux reprises sur le crâne avec la crosse d’un révolver. Je me suis évanoui. Quand je me suis réveillé, j’étais sur un lit d’hôpital avec un trou dans le palais”. La police, à cette époque, avait évoqué la légitime défense, le policier ayant déclaré en Cour que Clifford Esther voulait l’agresser à coups de couteau. Clifford Esther a perdu son procès contre la police. “À aucun moment, je n’ai tenté d’agresser la police avec une arme blanche. Faute de moyens, je n’ai pu faire appel du jugement”, déclare-t-il.
Deux semaines, toujours en cette même année, la police choqua de nouveau avec ses coups de feu. Cette fois-ci, elle fit deux victimes : Sylvio Suntoo (28 ans) et son épouse Patricia (16 ans). Cette dernière était enceinte. Ils ont été tués sur le coup. La police avait évoqué encore la légitime défense dans cette affaire. La police a fait usage d’armes à feu en plusieurs autres occasions. Parmi les cas les plus connus : ceux de Dan Ramessur, de Berger Agathe, de Rajen Sabapathee, entre autres.