À l’heure où l’on parle d’austérité, à l’heure où l’État dit veiller au moindre sou dépensé par la State Trading Corporation (STC) pour l’achat de quelques tonnes de riz ‘ration’, à l’heure où la maladie des fermetures frappe nos usines - jetant des centaines d’employés à la rue sans autre forme de procès - le petit peuple, qui est resté admirable depuis 1982, doit subir les largesses de certains.
On peut comprendre que nos ministres, à plus forte raison le premier d’entre eux, ne peuvent circuler dans de vieux tacots, pour reprendre une expression chère à sir Anerood Jugnauth. Mais, comment faire avaler une telle énormité au peuple qui, lui, est volontiers sacrifié à l’autel de la difficile conjoncture économique. Faut-il vraiment que nos élus fassent montre d’autant d’arrogance en s’offrant des véhicules neufs, avec toutes les options, avec l’argent qui ne leur appartient pas, alors que l’économie peine à sortir d’un marasme latent et que le taux du chômage donne des frissons, même aux plus optimistes de nos hommes d’affaires ?
Outre plusieurs sujets de discorde parmi la population et un climat social malsain qui ne manque pas d’enflammer le moindre petit discours hors cadre, le renouvellement bientôt de la flotte de voitures de nos élus agace, dérange, enrage même.
Sur un autre point, il est vrai que Maurice se doit d’être à la hauteur d’un pays hôte à l’occasion du sommet de la SADC et des pays aux petites économies en août prochain, mais le manque à gagner de Rs 150 millions, en termes de taxes douanières, sur la flotte de berlines qui véhiculeront les chefs d’État étrangers fait le jeu de nos plus gros concessionnaires qui se frottent les mains. Mais personne n’ose démasquer cette mascarade. Il ne faut pas s’étonner du silence assourdissant de l’Opposition sur la question. D’abord, ses membres sont très mal placés pour donner de la voix, étant eux-mêmes bénéficiaires des mêmes facilités. Ensuite, de par la culture - fondée ou pas - qui est rattachée à l’Opposition parlementaire dont on a hérité, rien ne nous dit que les Travaillistes auraient craché sur une telle aubaine s’ils étaient aux affaires.
Les temps sont durs, n’arrête-t-on pas de nous seriner. Mais pas pour nos dirigeants qui sont coupés de la réalité de leurs mandants. Et ces élus-là viendront sans gêne quémander, fin 2005, un vote de ceux qu’ils auront aidés à presser comme un citron. Ils n’auront pas compris le message. Pourtant, ‘the writings are on the wall’.
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