Jacques Maunick soutenu par sa femme Vivianne vendredi matin au poste de police de Curepipe
Harcèlement sexuel allégué, déposition(s) à la police, pétitions, guerre des clans, réunion entre journalistes et le directeur général, Torriden Chellapermal, conférence de presse et, finalement arrestation et congé forcé de Jacques Maunick de la radio en attendant la fin de l’enquête : la MBC vit, ces jours-ci, au rythme d’un film à rebondissements.
Les faits d’abord : dimanche après-midi, Valérie Kallee, 26 ans, une journaliste de la MBC/radio, consigne une déposition au poste de police de Curepipe contre Jacques Maunick, directeur de la radio. Elle allègue qu’elle est harcelée par le directeur de la MBC/radio. Ce dernier, selon la journaliste, l’aurait invitée plusieurs fois (en trois mois) à prendre un pot. Il aurait, lors de leur dernière conversation téléphonique, selon Valérie Kallee, insisté en disant qu’il “crève d’envie” de prendre un pot avec elle. Dans sa déposition aux policiers, Valérie Kallee explique que la situation étant devenue difficile, elle a fait état de ce qu’elle aurait subi lors d’un briefing cinq jours plus tôt. Elle ajoute qu’au cours de ce même briefing, Jacques Maunick lui aurait présenté des plates excuses. Un journaliste aurait enregistré, à l’insu du directeur de la radio, les sujets abordés au cours de cette réunion.
Quelques jours avant de faire sa déposition à la police, Valérie Kallee avait envoyé une lettre à Torriden Chellapermal, directeur de la MBC, pour lui exposer son problème. Il lui fut répondu qu’une enquête allait avoir lieu. La journaliste n’allait pas attendre la fin de l’enquête; elle s’est finalement rendue au poste de police dimanche après-midi. Le lendemain, ce fut au tour de quatre autres journalistes - présents au briefing au cours duquel Valérie s’était exprimée - d’être convoqués par la police. En les convoquant, la police voulait savoir si, effectivement, comme le lui avait dit Valérie Kallee, Jacques Maunick s’était excusé. Les quatre journalistes donnèrent la même réponse : Jacques Maunick avait présenté ses excuses à la journaliste.
Silence radio
Dès lors, après la déposition de ces quatre journalistes lundi dernier, alors que l’affaire est relayée par toute la presse (écrite et parlée), alors que Jacques Maunick ainsi que son avocat, Ivan Collendavelloo, choisissent, tout au long de la semaine, de ne pas commenter la chose, les commentaires vont bon train dans les couloirs de la MBC divisée, en deux clans, l’un soutenant Valérie Kallee et l’autre, Jacques Maunick. Deux pétitions circulent à la MBC, l’une en faveur de la journaliste et l’autre en guise de soutien au directeur de la radio. La guerre pour recueillir des signatures bat son plein avec, d’un côté, ceux en faveur de Valérie avançant avoir récolté 120 signatures alors que dans le clan adverse, on fait état d’une centaine. Si, à vendredi dernier, Jacques Maunick n’avait pas donné sa version des faits à la presse, en revanche, à Pasteur, il peut compter sur un fan club qui a vu très vite le jour. Ainsi, selon ces fans (qui délient leur langue uniquement en off-record), certains veulent tout simplement le départ de Jacques Maunick parce que, selon eux, le directeur veut mettre de l’ordre à la MBC et parce qu’il utilise un langage brutal lors des briefings du matin. Certains n’auraient pas apprécié, non plus, la demande de Jacques Maunick, il y a quelques semaines, de faire intervenir le directeur des ressources humaines pour régler un problème relationnel entre deux employés de la rédaction. En sus de ces raisons, on n’hésite pas à parler de complot pour faire partir Jacques Maunick (considéré comme proche de Torriden Chellapermal) dont le contrat expire au mois d’avril. De là à penser que c’est Torriden Chellapermal qui est visé dans toute cette histoire, il n’y a qu’un pas que certains franchissent allègrement. Malgré la prétendue proximité entre les deux hommes, c’est Torriden Chellapermal qui, au cours d’une réunion avec les journalistes mercredi dernier, a promis que toute la transparence serait faite autour de cette affaire; il a même demandé à Jacques Maunick de prendre congé de la MBC. Cela ne pouvait être autrement selon ceux qui suivent cette nouvelle saga, dans la mesure où un autre journaliste (Nadarajen Pillay), après avoir fait l’objet d’une plainte auprès de la ‘Sex Discrimination Division’ de la part d’une employée de la MBC, Mme Cathapermal, a été suspendu en attendant la fin de l’enquête. Ainsi donc, la direction de la MBC veut donner l’impression de traiter les deux affaires de la même manière.
Mais la question reste toujours posée. Pourquoi Jacques Maunick se serait-il alors excusé auprès de Valérie Kallee? La réponse fuse immédiatement dans le camp pro-Maunick. Oui, Jacques Maunick s’est excusé ! “Mais il s’est excusé seulement d’avoir invité Valérie Kallee à prendre un pot. Il a réalisé qu’elle avait très mal pris cette invitation”. Pour les pro-Jacques Maunick, la thèse du harcèlement sexuel ne tient pas debout et ils avancent plusieurs raisons. “En décembre, Jacques Maunick avait invité tous les journalistes chez lui pour un “brainstorming” et la journaliste en question en faisait partie. Un proche de cette journaliste, en vacances à Maurice en janvier 2003, avait été présenté à Jacques Maunick par cette même journaliste. Toujours en janvier, Jacques Maunick voulait lancer un magazine culturel et, lors d’un briefing, il avait expliqué que celui qui animerait ce magazine travaillerait en collaboration avec lui. C’est cette jeune fille qui s’était proposée. S’il y avait eu harcèlement, la victime alléguée aurait fui Jacques Maunick comme la peste”, disent ceux qui soutiennent Jacques Maunick.
Dans le camp de Valérie Kallee, dont le slogan choisi par ses amis est : “Pour la justice et la vérité, nous soutenons Valérie Kallee”, il n’y a pas de doute. Pour eux, certains essayent de faire passer Jacques Maunick comme victime. “Notre amie est abattue, traumatisée par ce qui s’est passé et nous ne comprenons pas comment certains peuvent croire que nous avons un agenda caché. Valérie est une journaliste qui n’a jamais eu le moindre problème à la MBC. D’ailleurs, elle a subi en silence car elle ne nous avait rien dit avant le fameux briefing. Et maintenant, certains veulent qu’on la laisse tomber. Nous disons que nous la soutiendrons jusqu’au bout”, affirment quelques-uns de la MBC radio.
Après l’éclatement de toute cette affaire, l’ambiance est, pour dire le moins, délicate à la MBC. Depuis dimanche dernier, après la déposition de Valérie Kallee, Jacques Maunick n’a plus animé le briefing matinal. Il a ensuite pris deux jours de congé. Et mercredi dernier, après que Torriden Chellapermal, directeur de la MBC, eut animé une réunion avec les journalistes, leur promettant que l’enquête se ferait dans la transparence, Jacques Maunick a reçu une lettre lui demandant de prendre congé de la MBC. Mercredi dernier toujours, quelques journalistes ont été convoqués dans le cadre de l’enquête interne de la MBC. Certains n’ont pas voulu donner leur version des faits, déclarant qu’ils le feront en présence de leur avocat. C’est finalement vendredi matin, aux alentours de 9h00 que Jacques Maunick en compagnie de son avocat, (les deux ne voulant faire aucune déclaration sur cette affaire), de sa femme Viviane et de quelques amis, a donné sa version des faits. (Voir hors-texte plus haut).
Après l’épisode Ramtoola/Chellapermal, c’est un nouveau chapitre de la saga de la MBC...
La tête du DG Torriden Chellapermal est réclamée par le syndicat
Critiqué pour sa mauvaise gestion à la MBC, Radakrishna Sadien, président de la GSA, centrale syndicale représentant de la MBSSA et l’Association des Journalistes de la MBC a réclamé le limogeage de Torriden Chellapermal. C’était lors d’une conférence de presse mercredi matin. Le représentant syndical de la MBC a aussi souligné que le syndicat soutient Valérie Kallee et qu’il suit cette affaire de près.
Patricia Le Court de Billot commentant l’affaire Valérie Kallee : “La journaliste est courageuse”
C’est le commentaire de Patricia Le Court de Billot, sur l’affaire Valérie Kallee. Patricia Le Court de Billot avait accusé son patron de harcèlement sexuel en décembre 2002. L’affaire sera appelée en Cour le mardi 10 février. La présumée victime réclame Rs10 millions conjointement à Rogers et à son ex-patron John Strojek.
Cinq cas majeurs de harcèlement sexuel devant la ‘Sex Discrimination Division’
Au total à ce jour, il y a cinq cas majeurs devant la ‘Sex Discrimination Division’. À vendredi matin, cette commission n’avait pas enregistré de plainte contre Jacques Maunick. C’est ce que nous a révélé Dhiraj Seetulsing, président de la Commission des droits de l’homme qui compte une branche de la ‘Sex Discrimination Division’. Ces cinq cas de harcèlement sexuel (un cas dans le public et 4 dans le privé) figurent parmi un total de 27 cas de harcèlement en tous genres. À la Commission, on fait très attention à l’interprétation du terme harcèlement sexuel. “Parfois, certaines formes de harcèlement sont interprétées comme sexuelles alors qu’elles sont d’ordre moral”, nous dit Seetulsing qui, dès la plainte enregistrée, convoque toutes les parties concernées avant que la Commission ne se constitue “en une Cour de justice”. À ce jour, aucune enquête n’a encore abouti, explique le président de la commission. Dans le cas où la Commission soupçonnerait un authentique cas de harcèlement sexuel après enquête, le dossier est alors transmis au Directeur des Poursuites Publiques.
Amende de Rs100 000 et 2 ans de prison pour harcèlement sexuel
Si Jacques Maunick est trouvé coupable d’avoir harcelé sexuellement Valérie Kallee, il risque d’écoper d’une amende allant jusqu’à Rs100 000 et d’une peine d’emprisonnement ne dépassant pas deux années. C’est ce que prévoit la section ‘Sexual Harassment’ de la nouvelle ‘Sex Discrimination Act’.
Réactions
Valérie Kallee : “Jacques Maunick s’est excusé”
“Tout ce que je sais, c’est que Jacques Maunick s’est excusé”, nous a déclaré Valérie Kallee, mercredi matin. Elle ne veut faire aucun autre commentaire sur cette affaire. La jeune journaliste est employée à la MBC radio depuis trois ans après avoir débuté à la télévision. Elle avait été recrutée, à l’époque, pour faire partie de l’équipe d’Entre Nous. Quant à son avocat, Me Teeluckdharry, il attend “que la justice suive son cours”.
Torriden Chellapermal : “L’enquête est entre les mains de la police”
“Au-delà d’une enquête interne, c’est maintenant une affaire de police. Nous avons demandé à Jacques Maunick de prendre quelques jours de congé pour qu’il n’y ait pas entrave à l’enquête. De notre côté, nous continuons l’enquête interne qui est basée sur la lettre que nous a envoyée la journaliste”
Jacques Maunick arrêté et libéré, vendredi matin
Applaudissements à la vue de Jacques Maunick et embrassades. L’émotion était vive dans le clan de ceux qui soutiennent Jacques Maunick, vendredi matin, aux abords de la Cour de Curepipe où Jacques Maunick a donné sa déposition, avant d’être arrêté et de signer une reconnaissance de dette de
Rs15 000.
Animateurs et journalistes de la MBC ainsi que quelques amis de Jacques Maunick étaient présents pour soutenir ce dernier. Parmi ceux venus le soutenir, on pouvait voir Pamela Patten, Marguerite Labat, Linley Heeramun, Sara Persan, Vishwanee Delmege, Arnaud Vacher, Stéphane Gébert, de la MBC, Marie Noëlle Elissac, journaliste à l’Express-dimanche qui a travaillé avec Jacques Maunick, Nella Brasse, animatrice à Radio Plus qui a aussi travaillé avec Jacques Maunick, le couple Denis et Vouloune Rivet, Cyril Palan, directeur de ‘Logos’ le couple Clément et Amrita Sooklall, employés de maison chez Jacques Maunick, entre autres. Tous ceux interrogés par 5-Plus vendredi matin soutiennent à 100% Jacques Maunick dans cette histoire. “Jacques a pour habitude de dire qu’il ne faut pas croire en l’être humain. Aujourd’hui je lui donne raison. Je dis aussi que pour travailler avec Jacques Maunick, il faut avoir beaucoup de maturité,” explique Vishwanee Delmege, journaliste à la MBC. Pour Sara Persan, autre journaliste de la MBC : “Accuser Jacques Maunick de harcèlement? Cela dépasse l’imagination. C’est une histoire qui ne tient pas debout”.
“Ce n’est pas croyable. Jacques peut avoir une grande gueule mais de là à parler de harcèlement sexuel, je dis non. C’est quelqu’un d’intègre,” dit pour sa part Cyril Palan.
Viviane, l’épouse de Jacques Maunick : “Un coup de massue”
“J’ai reçu, comme Jacques, un coup de massue à l’arrière de la tête. Il est évident que c’est mon mari et que je ne peux que prendre parti pour lui. Il est évident que si c’était un harceleur, j’allais être la première à le savoir. Mais Jacques a toujours respecté les femmes. Combien d’émissions n’a-t-il pas fait faire pour dénoncer le harcèlement sexuel ? Je n’ai pas de doute quant à l’issue de cette affaire car je connais Jacques, mais je sais qu’il a été touché dans son intégrité en tant qu’homme et en tant que professionnel. Jacques est un personnage haut en couleur mais il a toujours été éducateur dans ce qu’il fait”.