Marie (flèche) en compagnie de sa soeur Jocelyne le jour de la comparution en Cour, de son père Laval Beaux-Yeux (en haut à droite). Ce dernier nie les allégations portées contre lui. À l’arrière-plan, le quartier où habitait Marie avant d’être placée dans un centre pour enfants en détresse. A gauche, Patricia, 48 ans, la mère de Marie
Mercredi dernier, Marie a allégué, dans une déposition consignée à la CID de Bambous, qu’elle avait été violée à trois reprises par son père biologique alors...
Mercredi dernier, Marie a allégué, dans une déposition consignée
à la CID de Bambous, qu’elle avait été violée à trois reprises par son père
biologique alors qu’elle n’avait que 11 ans. Elle a aussi prétendu que sa mère
Patricia l’aurait forcée à se prostituer et à avorter.
C’est l’histoire d’une famille brisée vivant dans la misère.
Depuis l’âge de 12 ans, Marie s’est enfuie du domicile de ses
parents pour se réfugier chez sa demi-soeur, Jocelyne, qui squatte un terrain
de l’État à La Ferme. Lasse de garder ce qu’elle appelle un secret trop lourd
à porter, l’adolescente s’est confiée à Jocelyne pour dénoncer les abus sexuels
dont elle a été, dit-elle, victime : “Quand elle m’a raconté toute cette sordide
histoire, je l’ai tout de suite crue car moi aussi, j’ai été une victime de
mon beau-père Laval, le père biologique de Marie. Il m’a violée pour la première
fois alors que je n’avais que huit ans. Cela a duré deux ans. À l’âge de 10
ans, j’ai fugué pour me mettre en concubinage avec mon époux qui n’avait alors
que 14 ans. À la différence de ma demi-soeur, je n’ai pas eu le courage de dénoncer
mon beau-père à la police; j’ai préféré prendre la fuite”.
Selon le récit de Marie à Jocelyne, les faits remontent à 2001.
À cette époque, elle était âgée de 10 ans; elle avait cessé de fréquenter l’école
après deux échecs consécutifs aux examens du ‘Certificate of Primary Education’
(CPE). “Comme elle ne fréquentait plus l’école, Marie s’occupait du ménage et
de ses petits frères et soeurs”, raconte Jocelyne, âgée de 22 ans. Celle-ci
ainsi qu’une autre soeur de 17 ans et deux frères sont issus du premier mariage
de leur mère, Patricia, 48 ans.
D’après les dires de Marie à la police, un jour - elle ne se
rappelle plus la date ni le mois - alors qu’elle se trouvait seule à la maison
avec son père Laval Louis Beaux-Yeux, 48 ans, plus connu sous le nom de ‘Monstre’,
celui-ci l’a violée. “Elle m’a raconté qu’il était soul ce jour-là. Il l’a appelée
dans sa chambre et lui a demandé de se dévêtir. Marie a pris peur et a refusé.
Devant ce refus, Laval l’a projetée sur le lit avant d’abuser d’elle”, poursuit-elle.
Au retour de sa mère, l’adolescente lui aurait tout déballé. “Marie m’a dit
que maman est restée impassible devant ses révélations et qu’elle lui aurait
même demandé de n’en parler à personne”, déclare Jocelyne, mariée et mère de
deux enfants dont l’aînée a sept ans.
Le présumé agresseur aurait récidivé à deux autres reprises.
“Ma demi-soeur m’a raconté que son père l’aurait violée en deux autres occasions,
profitant toujours de l’absence de ma mère”, dit-elle. Après avoir incriminé
son père, qui travaille comme gardien à La Ferme, Bambous, pour inceste, Marie
a également dénoncé sa mère pour incitation à la débauche : “À mesure qu’elle
se confiait à moi, elle m’a expliqué que ma mère l’a contrainte à se prostituer
avec un homme de 55 ans. Ensuite, elle l’aurait forcée à avoir des relations
sexuelles avec un ami de son cousin, qui habite dans la région, pendant une
semaine”. L’adolescente serait alors tombée enceinte: “Comme elle n’avait pas
eu ses règles pendant plus de deux mois, elle en a fait part à notre mère. Marie
m’a dit que celle-ci lui aurait remis des médicaments pour la faire avorter”.
Dénégations
Suite aux dénonciations de Marie, les policiers de la CID de
Bambous ont arrêté Louis Laval Beaux-Yeux mercredi dernier dans la soirée. Lors
de son interrogatoire, il a nié les allégations d’inceste portées contre lui
par sa fille. Il a été traduit en Cour de Bambous vendredi dernier; une charge
provisoire d’avoir eu des relations sexuelles avec une mineure de moins de 16
ans a été retenue contre lui. Il a ensuite regagné la cellule policière. Quant
à Patricia, la mère de Marie, elle a été autorisée à s’en aller après avoir
consigné une déposition vendredi dernier.
Rencontrée à sa sortie du poste de police, Patricia, qui est
mère de huit enfants (dont quatre sont de Louis Laval Beaux-Yeux, ndlr), avance
que toutes ces allégations découlent d’une simple vengeance de la part de Marie.
La raison : elle (Patricia) avait, selon elle, menacé sa fille de la mettre
dans un abri pour enfants en détresse. Selon ses dires, Marie se serait mise
en concubinage avec un homme de 29 ans depuis bientôt un an : “Son concubin,
qui est le frère de l’époux de Jocelyne, la bat souvent. Ne pouvant supporter
de voir que ma fille était passée à tabac presque quotidiennement, je lui ai
fait part de mon intention de la placer dans un centre. Par vengeance, elle
s’est empressée de porter ces accusations”. Des voisins résidant non loin du
taudis de Jocelyne ont confirmé cet état de choses. “Presque tous les soirs,
son concubin rentre à la maison ivre mort et se met à la battre. Son père est
innocent dans cette affaire, Marie a voulu se venger de ses parents parce qu’ils
avaient l’intention de la placer dans un centre”. Interrogée, Jocelyne dément
: “Jamais ma soeur ne s’est mise en concubinage avec mon beau-frère”.
Concernant les allégations de viol portées par Joceylne contre
son beau-père, Laval Beaux-Yeux, nous avons essayé d’avoir une déclaration de
Patricia mais celle-ci n’était pas chez elle au moment où nous avons eu cette
information et, comme le suspect se trouve actuellement derrière les barreaux,
il nous a été impossible d’avoir une déclaration de lui.
Pour des raisons de sécurité, Marie, qui a reçu des menaces
de ses proches, a été placée par la ‘Child Development Unit’ (CDU) dans un centre
du ministère de la Femme. “Je suis triste de ce départ mais en même temps, elle
est éloignée de ce cauchemar. Je me demande si mon autre demi-soeur qui a 11
ans n’a pas été victime, elle aussi, d’abus sexuels?”, s’interroge Jocelyne.