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Profil d’un «chef de gang»

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L’homme serait le cerveau de la bande des encagoulés.

La police est convaincue que Louis Steven Franco Ritta, aussi connu comme Papo, est bel et bien le présumé cerveau du gang des encagoulés qui a commis plusieurs cambriolages à travers le pays. Plusieurs équipements et objets considérés comme des «damning evidences» ont d’ailleurs été retrouvés chez cet homme de 35 ans lors de son arrestation le mardi 19 novembre. Mais qui est donc ce vigile qui, selon les enquêteurs, menait la belle vie ? Ses parents ainsi que des gens de son voisinage donnent des éléments de réponse. Et ils ne sont pas toujours d’accord.

Belles bagnoles, grandes fiestas, whiskies de luxe… Louis Steven Franco Ritta, officiellement bouncer au Champs-de-Mars, menait grand train à son domicile à la Tour Koenig. C’est d’ailleurs ce qui attiré l’attention de la police qui a fini par le soupçonner d’être le cerveau du gang des encagoulés qui a commis plusieurs vols à travers le pays et semé la terreur parmi les Mauriciens pendant des semaines et des semaines. L’homme de 35 ans est en détention depuis mardi dans cette affaire ainsi que sa compagne Marie Kelly Diana Gullifer, 19 ans. Quatre autres personnes, soupçonnées d’être les complices de Ritta, ont aussi été écrouées et d’autres sont toujours recherchées.

La petite bande était sous surveillance depuis quelques jours et, finalement, le 19 novembre, une équipe constituée de la Metropolitan Division ADSU, la CID de Port-Louis Sud et celle du Nord, la SSU, du commando de la NCG et du Dog Unit, a donné l’assaut en débarquant chez plusieurs suspects en commençant par le domicile de Steven Ritta, aussi connu comme Papo, aux petites heures du matin. Et les limiers n’ont pas été déçus car sa modeste demeure ressemblait à une véritable caverne d’Ali Baba.

D’abord, les policiers ont mis la main sur un véritable attirail ayant pu servir lors des vols en série : une bombe paralysante, deux vestes noires de la marque Alpine Stars de sa taille, un pantalon noir de la même marque, dix autres vestes dont deux avec des capuchons, deux autres vestes militaires, une chemise militaire, trois sacs pouvant se porter en bandoulière, une paire de gants de la marque Exustat, dix autres paires de gants rouge et noir, un bonnet noir de la marque Alpine Stars et trois paires de boots, une boîte à outils et des tournevis, entre autres.

Puis, ils ont retrouvé un impressionnant pactole dont une somme de Rs 210 000 et plusieurs objets de luxe qui seraient le fruit des cambriolages menés par le gang des encagoulés à travers l’île : neuf montres - trois pour homme griffées Maurice Lacroix, Ice et Dolce et six pour femmes dont deux de la marque Guess ; quatre portables : deux Nokia, un Sony Ericson, un Samsung, ainsi que six puces dont une est endommagée ; une caméra digitale Samsung et sa carte mémoire 4GB ; un netbook de la même marque ainsi qu’un équaliseur JBL et un condenseur de couleur grise. La liste est loin d’être terminée. Les policiers ont aussi mis la main sur un service à dîner comprenant 28 pièces, un bracelet en argent, trois pendentifs montés de pierres vertes, bleues et mauves, neuf eaux de toilette de grande marque à l’instar d’Emporio Armani, Givenchy, Azzaro, One Million et BlackXS, des chaussures Wilson, deux médailles en argent massifs, deux robinets de la marque Huayi ainsi qu’une grosse cargaison de bouteilles de whisky de luxe – 25 en tout – estampillées Johny Walker Gold Label Reserve, Blue Label, Green Label, Martini, Drappier, Tattinger, entre autres.

Des fausses plaques d’immatricution qui se trouvaient sur une Honda blanche et une moto Suzuki GSR 600 ont aussi été saisies au domicile de Steven Ritta. Le fait que tout cela – attirail du parfait cambrioleur et butin – était conservé chez le «bouncer» accrédite la thèse des enquêteurs à l’effet que c’est bel et bien lui le cerveau de ces vols en série. Une partie des objets retrouvés a déjà été identifiée par les propriétaires de maisons et directeurs des différentes compagnies victimes de vols. Toutefois, une source aux Casernes centrales souligne que le travail est loin d’être terminé : «Les équipements et les objets retrouvés chez le suspect Ritta sont des damming evidences. On ne lâche cependant pas le terrain. On continue à filtrer les informations qui remontent jusqu’à nous afin de procéder à l’arrestation des présumés complices de Steven Ritta.»

Vie de nabab

Le présumé cerveau du gang des encagoulés a comparu au tribunal de Mapou sous une charge provisoire de vol, ainsi que ceux qui seraient ses complices. Mais son avocat, Me Siddharta Hawoldar, soutient qu’il nie les faits qui lui sont reprochés : «Il a expliqué aux enquêteurs comment il a eu cette forte somme d’argent. Il leur a aussi expliqué la présence des vestes et des bouteilles qu’il a eues en cadeau. La police n’a rien contre lui à part les objets retrouvés chez lui.» Quoi qu’il en soit, la police reste convaincue que Steven Ritta est celui qui a «lead» la bande de cambrioleurs qui a sévi à travers l’île ces dernières semaines. Et qui aurait pu continuer à le faire encore un moment ou même pendant longtemps s’il n’avait pas été trahi par son train de vie de nabab.

Steven Ritta, qui se présente comme Security Officer, joue les gros bras au Champ de Mars les jours de courses à l’endroit où on joue aux fléchettes. Toutefois, tous ceux qui le connaissent savent qu’il mène la belle vie, une vie qui ne correspond pas au salaire d’un bouncer. Tous les dimanches, il donnait rendez-vous à ses amis chez lui pour faire la fête. Et à ces occasions, le whisky, souvent du Johny Walker, coule à flots à chaque fois. «So bane kamarad vini dan bel bel loto met la misik fort. Kan fet fini ou kapav ramass à sak fwa 6 à 8 bouteilles Red Label ki zot kit kumsa mem lor mirail. Sa mem kinn ouver lizie missie la», confie un voisin.

La police est d’avis que son travail au Champ de Mars n’était qu’une couverture car c’est flagrant qu’il menait une vie bien au-dessus de ses moyens. D’ailleurs, la police a retrouvé une Honda blanche chez lui. Auparavant, il avait été vu au volant d’une autre Honda noire appartenant jadis à un dénommé Siddick habitant Grande-Rivière. À un autre moment, il conduisait une Honda de couleur bleue.

Victime d’un complot

Un autre élément qui joue contre Steven Ritta est le fait qu’il fréquenterait des personnes qui sont fichées à la police pour divers délits. Il est d’ailleurs lui-même fiché. Mais selon sa mère Georgette, c’est seulement pour des affaires d’agression : «Il est bouncer. Il n’y a que des charges d’assault contre lui.»

Les parents de Steven Ritta ne pensent d’ailleurs pas qu’il puisse être mêlé à ces affaires de vol et le défendent bec et ongles. Pour eux, il y a une explication pour chaque objet qui a été retrouvé chez lui, comme les luxueuses bouteilles de whisky. «Il aime le bon whisky et il a une petite collection de bouteilles. D’ailleurs, j’aimerais savoir pourquoi les policiers n’ont pris que des bouteilles de grande marque et ont laissé celles qui sont bon marché», lâche Georgette Ritta, visiblement affectée par toute cette affaire. «Mo latet fatigue, pa pe kapav manze akoz sa zafer la», dit-elle.

Pour Georgette, son fils est tout simplement victime d’un complot : «Dimounn zalou li akoz li gayn bien so lavi.» C’est d’ailleurs ce qui explique, selon elle, qu’une somme de Rs 210 000 ait été retrouvée dans la chambre de son fils : «C’est son argent. Il a joué aux courses et a gagné. Il a tous les reçus qui le prouvent mais la police n’a pas voulu l’écouter.» Son père Roger, révolté, abonde dans le même sens : «Il travaille au Champ de Mars les lundis, jeudis, vendredis et samedis en temps normal et aussi le dimanche lorsqu’il y a la Maiden Cup par exemple, et il a toujours des bons tuyaux. Il joue toutes les semaines et gagne de grosses sommes d’argent. Il aime bien porter des vêtements griffés et faire la fête. Est-ce que ça veut dire qu’il est un voleur ? Ses amis aussi aiment s’amuser et voilà que la police les a aussi arrêtés !»

Pour Roger Ritta, son fils n’est pas un voleur et il affirme pouvoir expliquer d’où provient chaque objet retrouvé chez lui : «Je peux justifier la provenance de tous ces objets. Je vais commencer par les boots et les vestes. Il a une grosse moto. C’est évident qu’il doit porter des boots et des vestes appropriés pour sa sécurité. Il en a de toutes les couleurs. Parlons maintenant des cagoules qui, en réalité, ne sont pas des cagoules. Ce sont des bonnets qu’il a reçus en cadeau lorsqu’il a acheté des casques de moto. Les bonnets servent à protéger la tête lorsqu’on monte à moto.»

Roger Ritta revient également sur la présence de la voiture et de la grosse moto retrouvées chez son fils : «C’est un bon ami de mon fils, un gagnant du Loto, qui lui a donné cette voiture en cadeau pour ses déplacements lorsqu’il travaille avec des personnalités. Cet ami aussi a été arrêté dans le cadre de cette affaire. Pour ce qui est de la moto, elle appartient à un autre ami de Steven. Il a montré le horsepower et le contrat d’assurance aux policiers lors de la descente mais ces derniers ont fait fi de tout cela.» Selon le père toujours, les portables et puces retrouvés chez son fils lui appartiendraient : «Tout est à lui. Moi-même j’ai deux portables.»

«Proche de dealers»

Et qu’en est-il des bijoux ? Là Roger Ritta n’a pas d’explication plausible : «Il y a un gros problème avec les bijoux seulement car il n’a pas de reçu pour justifier leur provenance.» Mais pour lui, il n’y a pas de doute : son fils est un honnête homme qui gagne sa vie le plus honnêtement du monde en travaillant comme bouncer. Un métier qu’il s’est choisi après avoir travaillé comme helper dans le store d’une compagnie très connue suite à ses études dans un collège privé de la capitale qu’il a quitté l’année même où il devait participer aux examens du School Certificate.

D’autres dans l’entourage de Steven Ritta sont d’accord avec ses parents : il n’aurait rien d’un voleur ou du cerveau d’une bande de cambrioleurs. Par contre, ils estiment qu’il aurait une «proximité avec des gens impliqués dans le trafic de drogue».

Selon une autre personne qui le connaît bien, Steven Ritta serait très proche d’un présumé trafiquant de Subutex très connu alors que son frère Gino, 30 ans, purge actuellement une peine de prison de trois ans pour trafic de Subutex. Celui-ci retrouvera la liberté en 2015.

À la rue Hazel où habite Steven Ritta, ses voisins sont divisés. Certains l’apprécient car il n’hésite pas à leur venir en aide en mettant sa voiture à leur disposition à n’importe quel moment en cas de besoin. «Les gens du voisinage l’aiment bien car il fait des courses pour eux gratuitement mais en dehors de cela on ne sait pas ce qu’il fait», souligne l’un d’eux. Mais d’autres n’aiment pas ses manières ni ses fréquentations. «Souvent, il ferme la ruelle où il habite pour faire la fête avec ses amis. Ils font du bruit. La police ne vient jamais. De plus, il a une influence négative sur beaucoup de jeunes. Si on ose lui dire quelque chose, il devient très violent», s’insurge une dame. Sa première compagne, avec qui il a deux enfants – une fille de 7 ans et un fils de 3 ans – l’aurait d’ailleurs quitté, selon une source voisine, parce qu’il serait trop violent.

Par la suite, Steven Ritta s’est, selon son entourage, installé avec sa nouvelle compagne de 19 ans, qui «aime aussi mener la belle vie». Ensemble, ils étaient toujours partants pour faire la fête, selon les voisins. Jusqu’à ce que la police les coffre pour vol.

Le modus operandi du gang

L’arrestation de deux nouveaux suspects : Jean-Claude Sardes, 32 ans, et Louis Yanos Louis Terry, 21 ans, le vendredi 22 novembre, a permis aux enquêteurs de déterminer le mode opératoire du gang des encagoulés. Il nous revient que ces derniers jouaient aux éclaireurs pour les autres membres du gang. Les deux sont employés par une compagnie de pest control. Ils identifiaient ainsi les futures victimes lorsqu’ils se rendaient chez les gens dans le cadre de leur travail avant de passer l’info au gang.

À ce jour, la police a procédé à 13 arrestations en tout, incluant les six présumés membres du gang des encagoulés, dans le cadre des récents vols à travers l’île. Daniel Mullet, 40 ans, un habitant d’Olivia, a été le premier suspect à se retrouver sous les verrous, le lundi 11 novembre, pour un cambriolage chez une habitante d’Amaury. Deux jours plus tard, les limiers ont procédé à l’arrestation de ses deux présumés complices, à savoir David Duval, un autre habitant d’Olivia âgé de 40 ans et Yadil Boodhun, un habitant de Bel-Air âgé de 24 ans. Les trois suspects nient les faits qui leur sont reprochés.

Le mardi 19 novembre, c’est au tour de Steven Ritta et sa concubine Marie Kelly Diana Gullifer d’être arrêtés dans le cadre d’autres cambriolages. Deux de leurs présumés complices ont aussi été arrêtés ce jour-là peu après midi : Soobiraj Perianen, un bijoutier de 46 ans, habitant Route Ménagerie à Cassis, chez qui on a retrouvé plusieurs bijoux et une somme de Rs 13 400, et Bruno Mars, un habitant de Camp-Levieux. Trois jours plus tard, deux autres présumés complices de Steven Ritta : Jean-Claude Sardes et Louis Yanos Louis Terry devaient être appréhendés et écroués.

Jean-Claude Bibi, avocat du gagnant du Loto : «Mon client n’a rien à voir avec le gang des encagoulés»

Un gagnant du Loto, ami proche de Steven Ritta, a aussi été arrêté dans cette affaire puis relâché. Cet ancien employé du port habitait un appartement de la NHDC à La Tour Koenig avant de déménager à Flic-en-Flac après avoir décroché Rs 33 millions. La police le soupçonne de financer le gang de Steven Ritta. Ce qu’il nie (Voir hors-texte). Son avocat, Me Jean-Claude Bibi, dit ne pas savoir pourquoi la police a procédé à son arrestation en lien avec l’enquête sur le gang des encagoulés. «La police n’a rien contre mon client. Il ne sait toujours pas pourquoi la police l’a arrêté. Il va d’ailleurs entamer des poursuites contre elle. Mon client a toutefois admis qu’il connaît Steven Ritta mais assure qu’il ne le fréquente pas», souligne Me Jean-Claude Bibi.

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