Jennika François souffre terriblement sur son lit d’hôpital.
Elle a été complètement défigurée et le responsable ne serait nul autre que son époux qui lui aurait jeté une casserole d’eau bouillante en plein visage. Sur son lit d’hôpital, Jennika raconte son calvaire alors même que la Journée mondiale contre la violence à l’égard des femmes sera observée demain, lundi 25 novembre.
Aujourd’hui, elle regrette profondément de ne pas avoir quitté son mari quand il était encore temps. «Il me frappait régulièrement. J’étais son souffre-douleur. Mais je n’aurais jamais pensé qu’il était dangereux à ce point-là», murmure Jennika François, 28 ans, que nous avons rencontrée sur son lit d’hôpital à Candos. Complètement défigurée, le visage brûlé au deuxième degré, cette mère d’un garçonnet de
3 ans souffre le martyre.
Dans la soirée du jeudi
21 novembre, son mari, Jovanni François, un charpentier de 35 ans l’aurait ébouillantée alors qu’ils se trouvaient à leur domicile à Paillotte, Quatre-Bornes. «J’étais en train de dormir aux côtés de mon fils quand mon mari a balancé une casserole d’eau bouillante sur mon visage. Heureusement que mon fils n’a rien eu», confie Jennika qui fait peine à voir.
C’est pour une histoire des plus banales, dit-elle, qu’elle s’est retrouvée dans ce sale état. «Mon mari me considère comme une boniche. Je suis femme au foyer, je m’occupe de mon fils car nous n’avons pas les moyens de payer un van scolaire pour le conduire à l’école et de payer les frais de la garderie lorsqu’il sort de l’école. Donc, je reste à la maison, je m’occupe du ménage et de mon fis. Mais mon mari exige que je fasse absolument tout pour lui», raconte-t-elle.
Lasse de cette situation, elle aurait fait la sourde oreille lorsque ce soir-là, en rentrant du travail, son mari lui aurait demandé d’enlever un miroir qui se trouvait sur son lit. «Il m’a demandé de ranger le miroir. Mais, je n’ai rien fait et j’ai continué à dormir. Il a des mains, il peut lui aussi faire des choses dans la maison même si c’est lui qui rapporte les sous.»
Elle poursuit son récit, péniblement : «Vu que je restais au lit, il m’a lancé avec rage qu’il allait s’occuper de moi. Je n’ai pas pris ses menaces au sérieux. Et quelques minutes plus tard, il m’a ébouillantée. J’ai hurlé “à l’aide” mais personne n’est venu à mon secours. Je suis allée à l’hôpital à pied, seule, et j’ai été admise avant de donner ma déposition à la police sur mon lit d’hôpital.»
Jovanni Francois a, pour sa part, été arrêté par la police. Une charge provisoire de tentative d’assassinat a été retenue contre lui. Il reste en cellule policière, la police ayant objecté à sa remise en liberté lors de sa comparution en cour le vendredi 22 novembre. À la police, il a déclaré avoir agi dans un accès de colère.
Famille chamboulée
Selon lui, en rentrant du travail, il a vu que la maison était dans un désordre indescriptible et a demandé à sa femme de ranger. Lorsque Jennika a refusé de s’exécuter, il l’aurait punie en lui jetant une casserole d’eau bouillante en plein visage. Et selon la jeune femme, ce ne serait pas la première fois que son époux la maltraite. «Il m’a déjà battue, d’ailleurs il le fait régulièrement. Une fois, il m’a même brisé le bras. J’ai porté plainte contre lui», avance-t-elle.
Avec cette dernière agression de Jennika, c’est toute une famille qui est chamboulée. Elle se retrouve à l’hôpital, son époux derrière les barreaux mais, surtout, son fils de 3 ans a dû être pris en charge par la Child Development Unit (CDU) et placé dans un foyer pour enfants à problèmes. «J’irai le récupérer lorsque je sortirai de l’hôpital. Mais je ne retournerai pas avec mon mari. J’ai décidé de prendre ma vie en main et d’être indépendante financièrement. Je dois trouver un emploi et une maison. La maison de Paillotte ne nous appartient pas. On est locataires», lâche Jennika, toujours sous le choc.
Seule au monde, elle lance un appel aux ONG qui s’occupent des femmes en détresse, comme elle. «Pour l’heure, je n’ai nulle part où aller. D’ailleurs, personne de ma famille ne m’a rendu visite. Depuis que j’ai épousé Jovanni, ils ne sont plus en bons termes avec moi car ils n’étaient pas d’accord avec ce mariage. C’est une donneuse de communion que j’ai rencontrée à l’hôpital qui m’apporte des vêtements de rechange.»
Depuis le début de l’année, 1 376 cas de violence à l’égard des femmes ont été enregistrés. Et Jennika vient aujourd’hui s’ajouter à cette longue liste. Une victime de trop, c’est toujours un cas de trop.
Journée mondiale contre la violence à l’égard des femmes
Noëllette Simirone : Le courage d’une survivante
À 39 ans, elle sait ce que c’est d’être une femme maltraitée, constamment humiliée verbalement et physiquement par un conjoint. C’est l’histoire d’une jeune femme vulnérable qui est allée de désillusion en désillusion. Mère d’un fils de 21 ans et d’une adolescente de 16 ans, Noëllette Simirone, une habitante de La-Gaulette, est tombée enceinte pour la première fois à 17 ans. Mais le père n’a pas reconnu l’enfant qu’elle portait et a rompu toute relation avec elle.
«J’étais jeune, naïve et désemparée lorsqu’il m’a quittée. Mais j’ai eu le soutien de mes parents. Puis, après quelques années, j’ai rencontré un homme plus âgé que moi de 22 ans. Je voulais de la stabilité et de quelqu’un qui prendrait soin de moi et de mon enfant. Lorsqu’il m’a déclaré son amour, j’ai accepté car je me disais qu’il allait me respecter pour ce que j’étais. J’avais aussi pris son âge en considération mais très vite il a commencé à me faire des misères. Au final, je l’ai quitté», explique Noëllette.
Avec l’aide de Marie-Anne Laganne, une travailleuse sociale de Rivière- Noire, elle a pu remonter la pente, et aujourd’hui, elle a pris sa revanche sur la vie en passant du statut de femme maltraitée à celui de femme entrepreneur. «Je travaille comme bonne à tout faire. Et j’ai aussi mon petit commerce. Je vends des fast-foods et je travaille aussi sur commande. J’arrive à m’en sortir financièrement.» Elle s’est aussi engagée dans son quartier à lutter contre la violence faite aux femmes. Ce, après plusieurs ateliers de travail avec des ONG, dont Gender Links (GL), des travailleurs sociaux et des conseillers du village. D’ailleurs, c’est dans le cadre d’un forum organisé par GL dans le cadre de la Journée mondiale contre la violence à l’égard des femmes que nous avons rencontré Noëllette Simirone.