Heureux qui comme… les marchands ambulants de Port-Louis ! Ces petits veinards qui ont obtenu exactement ce qu’ils voulaient, encore une fois. Et qui crient victoire à tue-tête. Y’a de quoi : jusqu’à la fin de l’année (et sans doute bien au-delà), ils pourront opérer tranquillement dans les rues, au nez et à la barbe des magasiniers et des maraîchers !
C’est le gouvernement qui l’a décidé. Non satisfait de la façon dont l’opposition MMM-MSM, à la tête de la municipalité de Port-Louis, gère le dossier, la bande à Navin Ramgoolam a tout simplement gelé les procédures entamées par la mairie pour reloger les marchands de rue de la capitale. Et a relâché ces vendeurs itinérants sur le trottoir après un crêpage de chignon en règle avec ses adversaires politiques dans l’hémicycle cette semaine. On a eu l’impression, encore une fois, d’assister à un mauvais vaudeville, à un tug of war ridicule entre le gouvernement et l’opposition avec, à la clé, des milliers de votes d’une frange de la communauté portlouisienne aux prochaines élections.
Ah, ces marchands ambulants… Il faut dire qu’ils connaissent leur pouvoir. Ils savent très bien que leur poids électoral non négligeable dans certaines régions de la capitale empêchera toujours les politiciens de s’attaquer à eux frontalement. Au contraire, ils peuvent maintenant compter sur ces derniers pour être à leur côté quand ils font leur révolution, comme ce fut le cas il y a quelques semaines à la municipalité de Port-Louis. N’a-t-on pas vu en première ligne de la révolte, le vice-Premier ministre Rashid Beebeejaun himself et quelques autres membres du gouvernement ? Eh oui, maintenant, les dirigeants se battent carrément aux côtés de marchands ambulants. On aura tout vu.
Il est vrai que de l’autre côté, il y avait la partie adverse et qu’il est de bonne guerre de contester toutes ses décisions. Mais de là à accompagner les street vendors dans leur mouvement de protestation – ces messieurs-dames ne voulaient aucunement être relogés dans les endroits déterminés pour cela – il y a un pas. Là, on a carrément eu l’impression de regarder un sketch de bas étage, grossier et ridicule. Qui ne fait même pas rire.
Il est vrai que l’équipe MMM-MSM a affiché une certaine volonté à mettre de l’ordre dans la situation des vendeurs de rue à Port-Louis ces derniers temps, mais en gardant tout de même en tête qu’il ne faut pas trop les froisser. Au contraire, on veut les reloger, leur donner un endroit pour continuer leur commerce, au lieu de mettre le holà à leurs activités. Car, au final, ceux qui s’adonnent à des pratiques illégales méritent d’être sanctionnés, pas qu’on soit indéfiniment indulgent avec eux, qu’on les caresse dans le sens du poil, qu’on trouve des solutions à leur convenance…
Mais à Maurice, surtout à Port-Louis, ça ne se passe pas comme ça. Les marchands ambulants font ce qu’ils veulent, quand ils veulent, où ils veulent, défient les autorités (le judiciaire, la police, les politiciens) avec une insolence et une audace déconcertantes. Trop conscients de leur bargaining power politique. Ce sont les petits rois de la capitale, ceux qui gagnent à tous les coups. Tant pis pour ceux qui ne sont pas d’accord ou qui en souffrent. Du coup, les années passent, mais le problème des marchands ambulants reste entier.