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Par Michaëlla Seblin
23 mai 2020 14:45
Que le confinement ne masque pas l'injustice. Que notre indignation reste intacte devant l'impunité de certains criminels qui se croient protégés par le voile des cover-ups habituels. La mort du détenu Caël Permes en prison et les informations choquantes reçues jusqu'ici confirment certaines pratiques indignes dans nos prisons. Qu’on le sache : tuer quelqu'un relève d'un acte criminel puni par la loi, peu importe si c'est un prisonnier ou pas. Est-ce que le cas Permes est l'arbre qui cache toute une forêt de barbarie ?
Comment ne pas avoir de doutes quand les éléments entourant cette mort parlent d'eux-mêmes : le rapport d'autopsie accablant qui révèle de multiples blessures, la manipulation des caméras de surveillance, les confessions du garde-chiourme affirmant avoir reçu des instructions de ses supérieurs pour éteindre les caméras, la découverte des traces de sang dans le véhicule de transfert, le témoignage d'autres prisonniers disant avoir entendu les cris de Permes et, finalement, l'arrestation de neuf gardes-chiourmes – dont certains ont été libérés sous caution le vendredi 22 mai – sur qui pèse soit une charge d'assassinat, soit celle de complicité, alors que d'autres seront bientôt inquiétés.
Caël Permes a donc été assassiné en prison ? Était-ce un crime prémédité ? Et si oui, qui l'a commandité ? Est-ce qu'il y a un fond de vérité dans ce qu'allègue l'avocat Valayden quand il réclame un Judge's Order car, selon lui, un haut gradé aurait assisté au tabassage du prisonnier par téléphone ? Comment expliquer les images d'une caméra de surveillance montrant la conversation entre un chef des services pénitentiaires et l'équipe chargée du transfert de Permes ?
Cette affaire est d'une extrême gravité car elle laisse comprendre qu'il pourrait exister une chaîne de complicité à plusieurs niveaux : deux groupes de gardes-chiourmes dans deux prisons différentes sont accusés alors que certains responsables sont dans le viseur des enquêteurs, sans compter les dires du garde-chiourme qui a manipulé les caméras et qui dit avoir reçu des ordres de ses supérieurs. Cette condamnable affaire devrait nous interpeller car peu importe le casier judiciaire de Permes, personne n'avait le droit d'attenter à sa vie, encore moins ceux qui étaient responsables de sa sécurité. Cette situation démontre également jusqu'où peuvent aller des abus et comment certains tentent d'éliminer les preuves.
Mais cette histoire révoltante illustre aussi toutes ces brutalités souvent dénoncées par les prisonniers dont les voix ne sont pas audibles. Pour un crime connu, combien d'autres atrocités commises sur les prisonniers restent cachées ? Ce n'est pas parce qu'il s'agit de détenus que leur vie compte moins que la nôtre.
Rien que pendant le confinement, il y a eu trois décès en prison. Le 20 mars, Michael Louise avait été retrouvé mort dans sa cellule à la prison de Beau-Bassin. Il était soupçonné d'avoir participé à une mutinerie la veille, quand il y a eu une révolte suite à l'annonce des trois cas positifs de Covid-19 dans le pays. Est-ce qu'il a été victime d'un règlement de comptes comme le fait ressortir la direction de la prison ? L'enquête est toujours en cours, semble-t-il.
Le 29 avril, c'est Jean Alain Auguste qui a été retrouvé pendu à l'hôpital de la prison de Melrose. Si au départ, ses proches ont donné foi à la version officielle, ils ont changé d'avis deux semaines plus tard, soupçonnant depuis un foul play, et ont fait une déposition à ce propos. Quelques jours avant le confinement, soit le 10 mars, c'est un jeune de 24 ans, Mervin Munbodh, qui mourait au centre de détention de Vacoas. Selon la version policière, il se serait pendu dans les toilettes. Des doutes entourent toujours son décès.
Tous ces morts ne suffisent-ils pas pour comprendre qu'il y a définitivement quelque chose qui ne tourne pas rond quant à la sécurité de nos détenus ? Toute cette brutalité vue sur les réseaux sociaux au début du confinement de la part de bandits en uniforme méritent sanctions. Réclamons justice ! Punissons ces coupables hors-la-loi !
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