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1 novembre 2025 14:27
L’arrivée à Maurice de l’homme d’affaires malgache très controversé Mamy Ravatomanga a déclenché une série d’événements qui touchent désormais les milieux économiques, politiques et judiciaires. Entre enquête financière, coopérations internationales et arrestation d’un ancien commissaire de la Financial Crimes Commission, l’affaire prend une dimension inattendue.
L’affaire Mamy Ravatomanga continue de secouer Maurice et Madagascar. Pour cause : l’arrivée à Maurice du patron du groupe SODIAT et figure influente et très controversée à Madagascar, fait couler beaucoup d’encre depuis. Venue en jet privé début octobre, sa présence n’est pas passée inaperçue. Très vite, la FCC s’est intéressée à son cas.
Le 24 octobre, la commission anti-corruption a annoncé l’ouverture d’une enquête, son arrestation et le gel de certains de ses avoirs. La FCC, qui est chargée de lutter contre le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et les infractions financières, travaille sur des éléments liant Ravatomanga à des transferts de fonds exorbitants jugés suspects.
Les enquêteurs examinent des propriétés de luxe, des opérations bancaires et des échanges financiers entre Madagascar et Maurice. Des mesures telles que le report on departure et des demandes d’informations auprès d’institutions bancaires ont été utilisées. Cette affaire est importante à plusieurs niveaux. D’abord, elle met en avant la circulation de capitaux dans la région et le rôle de Maurice comme plateforme financière.
Lorsqu’un doute apparaît, les autorités ont le devoir d’agir vite pour éviter la disparition d’éléments de preuve. Ensuite, le nom de Ravatomanga est fortement chargé politiquement. Pendant des années, il a été très proche des dirigeants politiques à Antananarivo. Il n’est d’ailleurs un secret pour personne que le grand patron du groupe SODIAT est connu pour sa proximité avec l’ancien président Andry Rajoelina.
L’enquête prend inévitablement une dimension qui dépasse la simple question financière. Mais l’affaire prend une nouvelle tournure le 30 octobre. Junaid Haroon Fakim, 41 ans, avocat et ancien commissaire de la FCC, est arrêté sous des charges provisoires de “Public official using his office for gratification” et de “Breach of confidentiality”.
Le quadragénaire est soupçonné d’avoir transmis à Ravatomanga des informations confidentielles lors d’une rencontre secrète à Quatre-Bornes, alors même que l’homme d’affaires malgache était déjà visé par une accusation provisoire de blanchiment. La FCC a déjà procédé à deux premières arrestations dans cette affaire : David Thomas, cadre du groupe SODIAT ainsi que l’homme d’affaires Naseer Beekhy.
L’arrestation de Fakim soulève des interrogations sur l’intégrité du processus, mais aussi sur les pressions, influences et réseaux qui entourent ce type d’enquête à forte portée politique. Cette affaire intrigue plus d’un. Plusieurs questions restent en suspens. Qui contrôle vraiment les flux financiers dans la région? Comment protéger les institutions contre l’influence des puissants?
Et surtout : la justice pourrait-elle aller jusqu’au bout, quelle que soit la personne concernée? Aujourd’hui, la FCC affirme continuer ses investigations et coopère avec ses homologues étrangers. La suite dépendra des preuves recueillies, des échanges avec les autorités malgaches et des décisions de justice à venir. Une chose est certaine : cette affaire ne fait que commencer.
La défense de Junaid Haroon Fakim dénonce un “trial by ambush”
Me Urmila Boolell est largement intervenue dans les médias ces derniers jours dans l’affaire entourant son client Junaid Haroon Fakim. Elle affirme, entre autres, que ce dernier ne nie pas avoir rencontré des protagonistes cités dans le dossier, mais elle insiste sur le fait que les circonstances de cette rencontre ont été mal interprétées. Selon ses dires, l’ancien commissaire de la FCC ignorait qu’il se retrouverait face à l’homme d’affaires malgache Mamy Ravatomanga.
L’arrestation de Junaid Haroon Fakim a donné lieu à une procédure particulièrement médiatisée. Me Boolell a annoncé qu’elle va déposer une demande de remise en liberté sous caution, rappelant que la défense doit pouvoir travailler dans un cadre équitable. Elle dénonce ce qu’elle décrit comme une “trial by ambush”, c’est-à-dire une stratégie où des éléments seraient introduits tardivement, sans permettre une préparation adéquate de la défense. Dans ce contexte, le panel d’avocats de Junaid Haroon Fakim affirme préparer la suite de la procédure avec détermination.
Attaque et réplique…
L’équipe légale de Mamy Ravatomanga demande l’annulation de l’enquête de la FCC estimant qu’elle serait illégale en raison du mandat contesté de son directeur général par intérim, Sanjay Dawoodarry. L’avocat Siddharta Hawoldar affirme que toutes les actions engagées par la FCC depuis le 12 septembre seraient juridiquement invalides. L’avocat français Hector Bernardini soutient pour sa part que les investissements de leur client à Maurice ont été réalisés de manière régulière. Le panel d’avocats de l’homme d’affaires malgache est composé, entre autres, de l’ancien chef juge Eddy Balancy ainsi que les avocats Joy Beeharry et Kushal Lobine. Ce dernier nie tout conflit d’intérêt malgré son engagement politique.
La FCC n’a pas tardé à donner la réplique. Elle a répondu aux critiques de l’équipe légale de Mamy Ravatomanga, qui remet en question la légalité de l’enquête en cours. Dans un communiqué, la FCC affirme rester “inébranlable” face aux tentatives de déstabilisation, soulignant la complexité d’un dossier aux ramifications locales et internationales. Elle précise que la nomination de Sanjay Dawoodarry comme directeur général par intérim a été faite conformément aux procédures, après la fin de son premier mandat. La FCC rejette les arguments de l’avocat Me Hawoldar, assure que toutes ses actions sont valides et dénonce les manœuvres visant à discréditer son travail.
Par ailleurs, Mamy Ravatomanga conteste le gel de ses biens émis par la FCC le 15 octobre. L’affaire a été examinée le 30 octobre en cour suprême devant la juge Véronique Kwok Yin Siong Yen. L’homme d’affaires malgache demande la révocation de cet ordre. Il estime qu’il est fondé sur une plainte “incomplète et politiquement motivée”. Il affirme que les accusations ont déjà été classées sans suite par le Parquet National Financier en France, en 2023. Il est d’avis que cette plainte n’est pas crédible et demande ainsi la suspension de l’enquête. Mais la FCC s’y oppose. Affaire à suivre…
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