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9 juin 2014 20:54
1980. C’est cette année-là que les premiers autocollants Panini firent leur apparition à Maurice. Ils deviennent vite un succès phénoménal à travers la collection d’animaux Mammals, soit des photos de bêtes à coller dans un album. Il suffisait d’échanger des bouchons et capsules de Pepsi pour avoir le fameux paquet de stickers. Rajesh Gunesh s’en souvient.
Cet homme d’affaire dans le secteur informatique a nagé en plein dans cette vague Panini qui a déferlé sur notre île, dans les années 80. Il était étudiant au collège Royal de Curepipe, lorsque Maurice se mettait à la mode des célèbres autocollants à collectionner. Il n’a toujours pas oublié les échanges à l’heure de la recréation, où, discrètement, en classe, pendant que l’enseignant avait le dos tourné.
Une pratique qui touchait tous les jeunes et moins jeunes, toujours avides de trouver le sticker manquant pour compléter la collection. Pas étonnant que les bouchons et capsules de Pepsi disparaissaient en un clin d’œil dans les mariages et services religieux ou encore dans les boutiques. « A l’époque, les gens étaient de conditions modestes, et on ne pouvait pas acheter plusieurs bouteilles de boissons gazeuses pour récupérer les bouchons. Je me souviens parfaitement qu’il fallait avoir un bouchon ou deux capsules pour obtenir un sachet de six stickers », raconte ce Vacoassien qui nous montre fièrement son album Mammals rempli et estampillé.
« Ceux qui avaient pu remplir leur album devaient l’emmener chez Pepsi pour le faire estampiller et recevoir des goodies. Les gens faisaient la queue avec leurs albums bien remplis. C’était quelque chose de magique », raconte Rajesh Gunesh, la quarantaine avec des yeux d’enfant. On est vite plongé dans les souvenirs lorsqu’il sort ses précieux albums tels que Birds et Prehistoric, sortis en 1980 et 1981 respectivement.
Les Mauriciens étaient incollables avec Panini et les trois albums précités. Ils savaient s’occuper à une époque où la technologie informatique, les jeux vidéo, les réseaux sociaux n’étaient pas omniprésents. Les loisirs étaient plus humains et les célèbres autocollants étaient un moyen de renforcer les liens entre amis et proches.
Puis vint la Coupe du monde de football de 1982 en Espagne. Les stickers Panini sont bien présents pour marquer cette grande fête du ballon rond. C’était le craze absolu chez les Mauriciens qui découvraient, pour la première fois, cette compétition à travers ces autocollants. « Il y a eu plusieurs Coupe du monde, mais c’était la première fois que les Mauriciens avaient la possibilité de collectionner les stickers. Le grand fan de football que j’étais, grâce à mon père Basdeo, ne pouvait rater cette effervescence », se remémore Rajesh Gunesh, ancien enseignant.
Bonjour les surenchères pour échanger les doubles qu’on avait. Les stars de la compétition, telles que l’Italien Paolo Rossi, le Brésilien Zico, le Français Michel Platini ou l’Anglais Kevin Keegan étaient très prisées avec le fameux « 1 pou 10 » ou « 1 pou 20 ». « Pour obtenir une de ses stars, il fallait offrir des dizaines de stickers en retour et
on faisait monter les enchères. On avait des discussions très animées entre amis», explique notre interlocuteur.
«On éprouvait un vrai plaisir à remplir l’album avec cette odeur de colle particulière qui a bercé notre enfance et notre adolescence. On prenait soin de bien coller l’image sur l’espace destiné. Les stars et les badges des sélections étaient très prisés. On ne parlait que de chiffre avec notre bout de papier. Non, ce n’est pas notre devoir de maths mais notre collection de Panini qu’on cherchait à mettre à jour », ajoute Rajesh Gunesh qui continue toujours sa belle collection quand il s’agit de la Coupe du monde.
Naushad et Sameer Junglee partagent cette passion à deux.
Les stickers de Panini et leurs albums à remplir séduisent plus d’un avec des collectionneurs invétérés. Ce ne sont pas les frères Junglee qui nous diront le contraire. Une passion pour le foot qui pousse l’aîné Sameer et son benjamin Naushad à s’y coller. C’est le premier nommé qui démarre la collection avec Mexico 1986. «On adore le football et c’était notre façon de participer à la Coupe du monde», expliquent ces habitants de Grand Baie.
C’est, donc, à deux qu’ils font leur collection depuis cette date et ont déjà entamé celle de 2014. «Nous venons de commencer notre collection et nous n’avons pas véritablement procédé aux échanges. Mais on espère terminer l’album pendant la Coupe du monde» souligne Naushad étudiant en informatique.
Mexico 86, USA 94 ou encore Germany 2006 permettent aux deux frères Junglee de remonter le passé et se rappeler de bons souvenirs. «Ils nous arrivent de feuilleter les albums et de penser à une anecdote. Je constate que les jeunes d’aujourd’hui sont moins intéressés avec Panini et ce sont plutôt les adultes, ceux qui étaient enfants en 1982 qui sont plus intéressés à collectionner », dit Sameer, 36 ans et travaillant pour son compte.
Un constat que partage également Rajesh Gunesh. «Tout est devenu virtuel et on n’a plus ce besoin de sentir ce toucher et de parler aux gens. A travers Brésil 2014, je revois ce gamin qui était en moi lorsque j’échangeais mes doubles avec mes amis. Ça m’a permis de retrouver des amis, des élèves et de faire de nouvelles rencontres. C’est quelque chose d’extraordinaire », dit-il. Il n’est certainement pas le seul à le penser. Ah la magie des autocollants Panini…
On est à l’heure du déjeuner dans la capitale. A table dans un resto situé dans un lieu très fréquenté, certains sont bien concentrés. Plume, papier, chiffre sont de rigueur, non pas pour passer une commande mais pour échanger les autocollants. Ils se sont réunis là, presqu' à l’improviste en passant le message de bouche à oreille ou sur les réseaux sociaux. C’est comme ça que Panini 2014 se déroule.
Si les enfants ont toujours la possibilité d’échanger les doubles à l’heure des recréations, les grands enfants eux (comprenez les adultes) font leur deal à travers Facebook. Outre la page officielle de Panini Mauritius d’autres fans ont créé les leurs (voir plus loin) pour favoriser les échanges pour aider les collectionneurs. Il suffit de consulter la page ou de poster les numéros recherchés, il y aura toujours quelqu’un pour proposer un deal ou swap (deux termes qu’on utilise pour trouver une entente). Une fois le marché conclu, les gens se donnent rendez-vous dans un lieu pour procéder à l’échange. Il y a certains qui, faute de temps, préfèrent envoyer les autocollants par la poste.
Amiir Vavra scrute la toile après le boulot. Il consulte la liste des numéros manquants ou des doubles disponibles que d’autres d’internaute ont postée. Il fait son marché essentiellement sur facebook. « Cela fait deux semaines que je n’achète plus de stickers. Après les nombreux doubles que j’ai en ma possession, il est facile d’échanger contre les numéros que je recherche », dit cet habitant de Beau-Bassin.
Une pratique qui a permis au jeune homme de faire des rencontres insolites. « Je rencontre des gens de divers milieu et on s’échange nos auto-collants comme ci on était des amis de longue date. C’est amusant et on sent une excitation chez les gens à mesure que la Coupe du monde approche. Il n’y a pas d’âge pour faire des collections. Il y a de nombreux adultes qui le font parce qu’ils le faisaient déjà lorsqu’ils étaient plus jeunes. C’est une envie qu’on ne peut pas décrire », dit Amiir Vavra entre deux deals.
Il vous reste quelques numéros pour terminer votre collection ? Vous avez des doubles qui ne trouvent pas preneurs ? Pas de panique, car, aujourd’hui c’est votre jour. Un swap day, à l’initiative de plusieurs facebookers, aura lieu dans plusieurs endroits de l’île. Miven Davissen Daniel, un des initiateurs de cet événement, à travers la page Panini World Cup 2014 Duplicate Stickers Exchange/ Swap – Mauritius explique sa motivation. «J’ai entendu dire qu’il y avait beaucoup de passion auparavant autour des autocollants Panini et que cela n’existait pas de nos jours. Mais il y a des gens qui ont toujours cette passion et c’est pourquoi on a lancé cette page pour réunir ces personnes. On ne s’attendait pas à voir autant de personnes réunies dimanche dernier au Trianon Shopping Park pour un swap day», fait-il ressortir.
Et ce week-end s’annonce encore plus propice pour les échanges. Outre le Trianon Shopping Park (hier et aujourd’hui), les organisateurs ont prévu deux points de rencontres, notamment à Super U (Grand Baie) entre 11h et 16h et Sharp Shooter ( Centre commercial du Vieux Moulin à Rose-Belle) entre 13h et 17h. Allez-y !
608 images autocollantes à trouver. C’est le pari que doivent tenter les collectionneurs. A Maurice, c’est la compagnie Winimage Ltd qui est le distributeur exclusif des albums et autocollants. Selon Ismet Jugoo, Managing Director, quelque 50 000 albums ont été écoulés sur le marché depuis son lancement le 14 avril dernier et difficile de dénombrer la quantité de stickers.
«Il y a un engouement terrible autour de ce produit. Les gens s’amusent, se rencontrent pour partager la passion du football. La collection Panini permet aux gens de se connecter directement avec la Coupe du monde pour un prix abordable. Pas étonnant qu’a travers le monde elle est LE produit de vente lié a l’évènement», fait ressortir notre interlocuteur qui a lui-même pu remplir son album.
Ismet Jugoo annonce la tenue des Swap Tour à travers l’île pour permettre aux fans d’échanger leurs stickers. La première aura lieu le 21 juin à Bagatelle où ceux présents pourront obtenir des cadeaux. Surveillez les dates !
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