Publicité

Le conflit Iran - Israël qui a tenu le monde en haleine

Tahir Wahab, observateur économique : «Chaque guerre dépasse ses frontières, et ses effets peuvent se faire sentir jusqu’aux rives de notre petite nation insulaire»

28 juin 2025

«À première vue, la guerre entre l’Iran et Israël peut sembler lointaine, presque abstraite pour un pays comme Maurice. Pourtant, dans un monde interconnecté, aucun conflit majeur ne reste sans conséquences», explique Tahir Wahab, expert-comptable et obse

Du lancement de l’offensive israélienne, dans la nuit du 12 au 13 juin, au cessez-le-feu survenu le 24 juin, les tensions entre l’Iran et Israël se sont retrouvées au cœur des préoccupations ces derniers jours...

Elle est désormais connue comme la guerre des 12 jours... En effet, dans la nuit du 12 au 13 juin, à la veille du sixième cycle de négociations entre l’Iran et les États-Unis sur le programme nucléaire iranien, Israël a procédé à une attaque contre l’Iran à travers l’opération Rising Lion, menée par des drones et des missiles, contre des installations nucléaires et militaires sur le sol iranien. Pour justifier cette attaque, Benjamin Netanyahu, le Premier ministre israélien, a alors affirmé que l’opération visait à «contrer la menace iranienne pour la survie même d’Israël». L’offensive iranienne a bien évidemment suivi et, pendant 12 jours, cette guerre a tenu le monde en haleine, avec notamment l’intervention de l’armée américaine qui a frappé, au dixième jour du conflit, trois sites nucléaires iraniens.

Cette tension entre l’Iran et Israël avait aussi accentué les inquiétudes que provoquait cette situation, notamment avec la crainte d’un basculement régional, voire global, de la guerre, d’une déstabilisation géopolitique, d’un bouleversement des relations internationales, sans oublier les incertitudes face au prix du pétrole... Car depuis l’escalade du conflit au Moyen-Orient, les cours du pétrole ont connu une forte volatilité. À la fin de la semaine écoulée, évoquant le cessez-le-feu considéré comme «fragile» par ceux qui suivent de près la situation, Donald Trump a fait savoir que les États-Unis mèneraient «sans aucun doute» de nouvelles frappes en Iran si le pays enrichissait l’uranium à des niveaux lui permettant d’obtenir des armes nucléaires. Dans notre île également, cette chaude actualité était suivie de très près et le ministère des Affaires étrangères, de l’Intégration régionale et du Commerce international avait d’ailleurs convoqué une réunion le mardi 24 juin pour faire le point sur la situation.

Après 12 jours de frappes et d’échanges de missiles entre les deux pays, le cessez-le-feu, initié par le président américain Donald Trump le mardi 24 juin, semble tenir. Depuis, le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou parle de «victoire historique», Téhéran, de son côté, affirme «avoir tenu tête» à deux des armées les plus puissantes de la planète, alors que Donald Trump, se présentant comme un «faiseur de paix», s’est largement félicité du cessez-le-feu. L’ONU, pour sa part, appelle à respecter la trêve et à éviter une reprise des hostilités.

Pourquoi les Mauriciens doivent-ils s’intéresser à ce qui s’est passé entre les deux pays ennemis du Moyen-Orient ? Tahir Wahab, expert-comptable et observateur économique, répond à cette question : *«À première vue, la guerre entre l’Iran et Israël peut sembler lointaine, presque abstraite pour un pays comme Maurice. Pourtant, dans un monde interconnecté, aucun conflit majeur ne reste sans conséquences. Chaque guerre entraîne son lot de pertes humaines et matérielles. En même temps, elle apporte un cocktail d’instabilité et de volatilité accrue : flambée des prix, ruptures d’approvisionnement, chocs économiques... Autant d’effets qui se répercutent jusqu’aux économies les plus éloignées. Les marchés pétroliers, particulièrement sensibles aux tensions au Moyen-Orient, en sont une illustration claire. Depuis le début des hostilités, le prix du baril est passé de 69 à 74 dollars, avant de chuter brusquement à 67 dollars ce mercredi 26 juin, à la suite de l’annonce d’un cessez-le-feu initié par le président Donald Trump.» *

Tahir Wahab souligne également que cette volatilité n’est pas anodine : «Elle reflète à quel point les marchés sont nerveux, réagissant au moindre signal diplomatique. Le détroit d’Hormuz, par lequel transite près d’un tiers du pétrole mondial, reste sous haute surveillance. Il suffit d’un incident pour provoquer une flambée des prix avec des conséquences immédiates sur les coûts d’importation pour des pays importateurs comme Maurice. Mais cette accalmie pourrait n’être que passagère. Le détroit d’Hormuz, point névralgique du transport pétrolier mondial, reste sous tension.» Pour l’observateur, trois scénarios sont envisageables : «*Une avancée diplomatique menant à un retour à la stabilité et un soulagement sur les marchés, ou un blocage prolongé, accentuant l’incertitude et gelant les investissements, ou une reprise des hostilités, qui est un scénario redouté, avec à la clé un choc économique global, la flambée des prix et une volatilité extrême. Autrement dit, en diplomatie moderne, une nuit est longue, surtout à l’ère des réseaux sociaux, et tout peut basculer du jour au lendemain.» *

Conséquences sérieuses

Ce conflit, explique Tahir Wahab, aurait pu avoir un impact sur notre île : «Pour une petite économie ouverte comme celle de Maurice, qui reste fortement dépendante des importations, du tourisme et des échanges commerciaux internationaux – et le pays étant déjà confronté à plusieurs vulnérabilités structurelles, comme la pression croissante des pensions de vieillesse, la nécessité d’accroître les recettes fiscales et l’urgence de développer de nouveaux piliers économiques –, les conséquences pourraient être sérieuses. Cette configuration la rend particulièrement vulnérable aux chocs externes, notamment en période de turbulences géopolitiques.» Selon l’observateur économique, les principales conséquences possibles si le conflit s’intensifie, même sous forme d’un blocage, pourraient faire grimper les prix du carburant.

«Premièrement, toute tension dans le détroit d’Hormuz, par où transite près d’un tiers du pétrole mondial, aurait un impact direct sur le coût des transports et des biens importés. Deuxièmement, notre roupie serait fragilisée, car l’augmentation des coûts d’importation aggraverait le déficit commercial, exerçant une pression supplémentaire sur notre devise. Troisièmement, Maurice pourrait subir une inflation importée avec la hausse des prix mondiaux. Cela se traduirait rapidement par une augmentation du coût de la vie, en particulier pour les produits de première nécessité. Quatrièmement, le secteur touristique pourrait se retrouver sous pression, car dans un contexte d’incertitude géopolitique, les voyageurs deviennent plus frileux. Une baisse de fréquentation touristique aurait des retombées directes sur l’emploi et les recettes en devises. Cinquièmement, les perturbations des chaînes logistiques et des flux maritimes mondiaux affecteraient notre approvisionnement, notre production et nos exportations, ce qui pourrait conduire à un commerce international ralenti. En somme, notre île n’est pas à l’abri des répercussions économiques. Dans un monde globalisé, chaque guerre dépasse ses frontières, et ses effets peuvent se faire sentir jusqu’aux rives de notre petite nation insulaire», conclut Tahir Wahab en commentant cette guerre de 12 jours qui a fait couler beaucoup d’encre...

Publicité