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Accidents de moto mortels : douloureux adieux à Adrien, Ashwin, John-Clair et Kheman, fauchés en pleine jeunesse

5 octobre 2020

Grande-Pointe-aux-Piments : collision fatale pour deux amis

 

Le dimanche 27 septembre, le village de Grande-Pointe-aux-Piments a été frappé par un douloureux drame. La veille au soir, la fête battait son plein sur la plage, où un jam a lieu tous les samedis. Parmi les jeunes qui y participaient se trouvaient Adrien Laventure, 18 ans, et Ashwin Furcy, 16 ans ; des habitants de la localité. D'après l'entourage des deux, ce moment de partage musical est un événement qu'ils ne ratent jamais après une dure semaine. Mais aux alentours de 7 heures, dimanche matin, les deux jeunes ont été victimes d'une terrible tragédie. Bien que ne détenant pas le permis de conduire, Adrien Laventure pilotait une moto que son ami Ashwin Furcy – le passager en croupe – avait empruntée à une connaissance. Ils circulaient aux abords de la route principale de Grande-Pointe-aux-Piments lorsque le véhicule a dérapé à proximité de Chantefrais et heurté un abribus. Le choc de l'impact a été d'une telle violence qu'ils n'ont pas survécu. Les familles des victimes, bouleversées, reviennent sur cette matinée où tout a basculé...

 

Adrien Laventure, 18 ans, ne verra pas grandir sa fille

 

 

«Où es-tu ? À quelle heure vas-tu rentrer ?» avait envoyé Anastasia, la compagne d’Adrien Laventure, sur le téléphone portable de ce dernier aux alentours de 7 heures, le dimanche 27 septembre. Elle était angoissée car il n’avait pas donné signe de vie depuis la veille. Dans la soirée de samedi, et ce, comme tous les samedis, le jeune homme de 18 ans s’était rendu à la plage de Grande-Pointe-aux-Piments pour rejoindre ses amis le temps d’un jam. Un événement hebdomadaire que plusieurs autres habitants de l’endroit ne ratent pas non plus pour clore en beauté une semaine de travail chargée. Passionné de séga, Adrien Laventure ne manquait jamais une occasion d’y faire résonner son instrument de musique préféré, sa ravann, tout en sirotant quelques bières. Mais contrairement aux fois précédentes, il mettait du temps à rentrer, alors qu’il était convenu qu'il aide Anastasia, également âgée de 18 ans, à s’occuper de leur petite fille Anntania, âgée d’un an et demi.

 

Quelques minutes plus tard, Anastasia a reçu un appel inquiétant de sa belle-mère. «Elle m’a demandé si je savais où se trouvait Adrien. Je lui ai répondu que je n’en avais aucune idée, qu’il n’était pas encore rentré.» Celle-ci lui a alors expliqué que le père d’Adrien venait de recevoir un appel de son fils aîné, Corans, qui lui demandait de venir le rejoindre immédiatement car quelque chose de grave venait de se produire. Bien que très inquiète, Anastasia était loin de s’imaginer que son univers était sur le point de s’écrouler jusqu’au moment où la terrible nouvelle est venue foudroyer leur petite famille : Adrien Laventure avait rendu l’âme après avoir perdu le contrôle du deux-roues qu’il pilotait et heurté un abribus aux abords de la route principale de la localité. Il a poussé son dernier souffle avant même son arrivée à l’hôpital, succombant au choc de ses multiples blessures.

 

L’un des derniers membres de la famille à avoir vu le jeune homme est Nicole Laventure, sa grand-mère paternelle, qui habite la localité. «Dans la soirée de samedi, raconte-t-elle, les jeunes sont allés faire la fête à la plage. Je n'y suis pas allée car je devais sortir le lendemain matin. Ou était-ce un mauvais pressentiment ?» se demande-t-elle encore aujourd’hui. Elle poursuit son pénible récit : «Dans la matinée de dimanche, Corans, qui vit avec moi, est parti acheter du pain. Il m’a rappelée au bout de quelques minutes et ne cessait de répéter, en hurlant : “Mami, Adrien inn fer aksidan. Adrien inn mor !”.»

 

Nicole est choquée, déboussolée, paniquée. «Mo ti tousel dan sa ler-la, mo pa ti pe kone sipa mo ti bizin kriye ou kwa. Mo finn koumans gagn tranbleman (…) Mo zanfan sa, mo leker fermal», relate-t-elle d’une voix tremblante, des larmes dans les yeux.

 

Grandes qualités

 

Adrien était encore adolescent lorsque la grossesse d’Anastasia leur est tombée dessus. Cet événement heureux, bien qu’inattendu, l’avait donc contrait à mûrir plus rapidement que ses camarades. Derrière son comportement plaisantin et farceur, «li ti enn garson korek. Li ti pe pran so responsabilite ek ti pe get so zanfan bien», affirme la jeune maman. Les deux jeunes avaient fait connaissance il y a quatre ans lorsqu’ils fréquentaient le Mauritius Institute of Training and Development de Goodlands.

 

Ils avaient prévu de se marier l’an prochain, après avoir résolu quelques soucis d’ordre judiciaire. «La Child Development Unit est entrée en jeu lorsque je suis tombée enceinte car, à l’époque, nous étions tous les deux mineurs. Lane prosenn, nou case ti pou pas lakour. Nous attendions d’en avoir fini avec cela pour entamer des projets.» Entre-temps, ils vivaient chacun de leur côté – le jeune homme chez ses proches à Grande-Pointe-aux-Piments et sa compagne chez ses parents à Goodlands – et allaient passer du temps l’un chez l’autre régulièrement. 

 

Le sens du service et la débrouillardise faisaient partie des plus grandes qualités d’Adrien aux dires de son entourage. Il avait appris à poser des marbres avec son père et cumulait d’autres petits boulots, à l’instar de celui de maçon. «La veille de son accident, il est rentré tard. Il m’a dit qu’il avait passé la journée à travailler. Li pa ti enn garson pares. Son supérieur m’avait même dit qu’il était un jeune très talentueux et qui apprenait vite le métier. J’étais fière de lui», relate Nicole qui ne tarit pas d’éloges à son sujet. «Li ti enn bon zanfan. Je lui disais toujours qu’il était incapable de dire non quand quelqu’un avait besoin de ses services et il me répondait alors : “Ki pou fer granmer, enn zour Bondie pou rann mwa sa”.»

 

Malheureusement pour ses proches, le jeune homme était également têtu comme une mule et se laissait souvent guider par son obsession pour les deux-roues. Bien qu’il ne détenait pas le permis de conduire, il adorait piloter ce véhicule dont sa grand-mère s’est toujours méfiée. «Il voulait absolument avoir une moto mais nous le lui avions toujours interdit car les accidents impliquant des motocyclistes arrivent bien trop souvent. D’ailleurs, il y a à peine deux mois, il avait subi de légères blessures après avoir perdu le contrôle d’une moto. Cela ne l’a pas empêché d’en piloter une à nouveau», se désole Nicole. Foudroyé en pleine jeunesse, Adrien Laventure a rejoint sa dernière demeure ce lundi 28 septembre, à trois jours du 20e anniversaire de son frère Corans. Laissant derrière lui une petite fille orpheline et toute une famille anéantie par le chagrin.

 


 

Ashwin Furcy, 16 ans, décède dans les bras de son père

 

 

Avant de mourir, il s’est battu jusqu’à son dernier souffle. «Je l’ai serré contre moi. Mo ti pe dir li “koze, koze !” me li pa ti pe reponn», relate Sam, le père d’Ashwin Furcy, d’une voix brisée par le chagrin. À ce moment-là, ce père anéanti tenait son fils dans ses bras alors qu’ils se trouvaient tous deux dans le caisson d’une fourgonnette de la police en route vers l’hôpital. Quelques minutes plus tôt, il avait reçu l’appel de sa belle-soeur l’informant que l’adolescent de 16 ans avait été victime d’un grave accident dans leur localité, à Grande-Pointe-aux-Piments.

 

Sam avait été conduit sur les lieux par un ami et avait pris place dans le véhicule de police conduisant les deux victimes de l’accident à l’hôpital le plus proche. En arrivant dans les parages de Balaclava, il a senti son fils, à bout de forces, pousser son dernier soupir. «Lorsque nous avons croisé le véhicule du SAMU en chemin, un médecin est venu prendre son pouls. J’ai eu la confirmation de son décès lorsqu’il a indiqué aux policiers qu’il faudrait conduire mon fils à la morgue.»

 

Depuis le dimanche 27 septembre, le temps s’est arrêté pour l’entourage d’Ashwin. Son père en particulier a du mal à se faire à l’idée qu’il ne verra plus le jeune homme que la famille surnommait affectueusement Battate. Depuis ce jour fatidique où tout a basculé, il ne cesse de se repasser en boucle ses derniers instants avec son fils en qui il avait placé tellement d’espoir. Pour cause, Ashwin avait, certes, abandonné ses études cette année mais passionné par la mécanique et le bricolage, il espérait de tout coeur trouver un emploi dans ces domaines. «Pa ti ena enn zafer ki li pa ti konn aranze», confirme Joannick, sa cousine.

 

La veille, comme tous les samedis, Ashwin s’était rendu à l’église. Il avait ensuite passé la journée chez sa tante, qui habite la localité, avant de regagner son domicile aux alentours de 17 heures car celle-ci devait aller travailler. «Après avoir mangé, il est allé rejoindre ses amis. La dernière chose qu’il a dite avant de s’en aller, en plaisantant, c’est “tonton pe ale, li pa pou revinn ankor” en s’adressant à son neveu de trois mois», sans se douter qu’il voyait effectivement ses proches pour la dernière fois. Il s’était, de ce pas, rendu à la plage de Grande-Pointe-aux-Piments pour assister au jam auquel participent tous les jeunes de la localité les samedis soirs ; son rituel hebdomadaire.

 

Comme tous les jeunes de son âge, Ashwin aimait aller s’amuser avec les autres jeunes de l’endroit. «Li ti kapav kontan kamarad me li ti konn gard valer fami, valer tradision. Kouma kriye li, dir li rann enn servis, li ale», raconte Joannick. Le coeur lourd, elle raconte, en sanglots, un épisode qui s’est passé il y a à peine deux semaines : «Mon époux avait été victime d’un accident de moto dans la localité. Ashwin tousel inn sarye li lor so zepol inn retourn li lakaz ek inn sarye so motosiklet. Il n’a jamais manqué de respect à qui que ce soit. Il avait un coeur en or. C’est la raison pour laquelle il était si populaire et apprécié de tous.»

 

Il a rejoint sa dernière demeure le lundi 28 septembre, laissant derrière lui des parents anéantis, ainsi que son frère et ses deux soeurs – âgés de 21, 19 et 14 ans –, affligés par sa disparition tellement soudaine et si tragique à la fleur de l’âge.

 


 

 

Baie-du-Tombeau : deux motocyclistes se percutent et meurent

 

Le choc, la douleur et la tristesse ont envahi les habitants de Baie-du-Tombeau le samedi 3 octobre. Aux petites heures du matin, une terrible tragédie est survenue : deux motocyclistes habitant la localité se sont percutés violemment et n'ont pas survécu. D'après l'entourage de John-Clair Bégué, 25 ans, celui-ci rentrait d'une soirée et aller s'acheter à manger au moment des faits. Les proches de Khedan Gungadin, 19 ans, ignorent pour leur part où il se rendait et en compagnie de qui il avait passé la soirée. La collision s'est produite aux alentours de 1h15, aux abords de la rue Macadam. Alertés, les premiers secours sont arrivés sur place et ont conduit John-Clair Bégué et Khedan Gungadin à l'hôpital SSRN et à celui de Jeetoo respectivement. Mais ils y ont chacun rendu l'âme, à quelques minutes d'intervalle. Leur entourage témoigne...

 

John-Clair Bégué, 25 ans, devait bientôt aller retrouver sa femme à l’étranger

 

 

Il y a six ans, un grave accident de voiture avait failli lui coûter la vie. Mais la mort l’avait épargné, lui donnant la possibilité de passer plus de temps auprès de sa famille qu’il chérissait tant, de devenir père d’une magnifique petite fille et de rencontrer l’amour de sa vie – qu’il a épousé en décembre dernier. Mais il n’a, malheureusement, pas pu profiter de tout ce bonheur pendant très longtemps car le samedi 3 octobre, le sort s’est acharné sur lui. Grièvement blessé après une collision entre sa moto et un autre deux-roues, John-Clair Bégué – un habitant de Baie-du-Tombeau de 25 ans –, a rendu l’âme une heure plus tard à l’hôpital SSRN, soit quelques minutes après Kheman Gungadin, le second motocycliste. Il laisse derrière lui une famille et des amis anéantis.

 

«Il était promis à un si bel avenir», lâche Héléna, sa mère, avec des sanglots dans la voix. Depuis que son benjamin a quitté ce monde, elle a le coeur en miettes. Elle s’était beaucoup sacrifiée pour que son fils chéri ait une vie heureuse et maintenant, il est parti. «Je l’ai protégé jusqu’au dernier moment. Je suis même parvenue à faire en sorte qu’il aille à l’étranger mais Dieu me l’a enlevé.» Ce qui rend les choses encore plus dures à accepter pour cette maman meurtrie, c'est que «John-Clair avait tellement de projets. Il était rentré à Maurice en août dernier et avait dû laisser son épouse en Angleterre parce qu’il n’avait pas encore obtenu son visa de l’ambassade. Li ti bizin dan lebra so fam me linn bizin retourne pou fer so bann demars». Il venait tout juste d’obtenir son billet cette semaine et avait prévu de prendre l’avion le 6 novembre prochain pour aller retrouver son épouse ; un moment qu’il attendait avec impatience. «S’il avait été malade, j’aurais accepté sa mort avec plus de facilité, mais il était plein de vie et avait encore tellement de choses à accomplir», regrette Héléna.

 

Quelques instants avant l’accident, John-Clair Bégué était en compagnie de ses amis dans un pub à Baie-du-Tombeau. Parmi eux figure l’artiste Big Frankie, avec qui il passait le plus clair de son temps depuis qu’il était retourné dans l’île. Les deux sont devenus très proches à l’époque où la victime, très impliquée dans l’événementiel, organisait des soirées avec des artistes locaux en France. «Nou ti dan enn program dan Baie-du-Tombeau. Nou ti pe al aste dipin kan aksidan-la inn arive», raconte l’artiste. Il poursuit son récit : «John-Clair circulait à moto et était parti le premier. Nous le suivions en voiture derrière mais n’avons pas vu ce qui s’est passé. Nous nous sommes arrêtés en nous apercevant qu’un accident avait eu lieu ; c’est à ce moment-là que nous avons constaté qu’il s’agissait de lui.» John-Clair Bégué a ensuite été conduit à l’hôpital dans une ambulance et y a rendu l’âme une heure plus tard. «Se enn sok. Toulezour nou ti ansam, gramatin tanto. Li ti ena mari bon ker. Li ti plis ki enn fami, li ti kouma enn frer pou mwa», déclare le chanteur.

 

L’entourage de John-Clair n’a que des éloges pour lui. «Li ti enn extra bon zanfan. Li ti bien kontan kamarad ek li ti ena bon leker», pleure Héléna. La disparition tragique de son enfant la brise : «Mo pa fini dimann mwa kifer Bondie pann pran mwa. Mo ena 58 an, monn bien viv. Kifer linn bizin pran li ?» Elle regrette encore plus qu’il n’ait pu passer plus de temps avec sa fille de 5 ans, issue d’une première union. C’est avec douleur et chagrin que l’entourage de John-Clair Bégué lui a fait ses adieux, le samedi 3 août.

 


 

 

Kheman Gungadin, 19 ans : les rêves brisés d’un jeune ambitieux

 

 

 

Souriant, serviable, assidu, travailleur… Les mots ne manquent pas à Kelvish Gungadin pour décrire son cousin Kheman Gungadin. Il peine toujours à croire qu’il ne reverra plus celui qu’il considérait comme son bras droit. «Il venait de fêter ses 19 ans en août. Il travaillait avec moi comme mécanicien depuis qu’il avait fini ses cours dans le domaine de la navigation. Je n’arrive toujours pas à croire que je ne le reverrai plus avec moi au garage. C’était un employé modèle. Toujours ponctuel et prêt à aider. On pouvait compter sur lui à tout moment. Cela me désole que nous l’ayons perdu dans de telles circonstances. Lui et moi n’avons que quelques mois d’écart. Ça fend vraiment le cœur qu’un jeune qui avait toute sa vie devant lui la perde ainsi», confie Kelvish Gungadin d’une voix empreinte de tristesse.

 

Travailler sur un bateau de croisière, découvrir du pays ou encore entreprendre des études en mécanique automobile… Des rêves, Kheman en avait plein la tête, confie son cousin. «Il n'arrêtait pas de me dire qu’il voulait vivre l’expérience de travailler sur un bateau même si cela devait être à long terme ou encore qu’il voulait approfondir ses connaissances dans le domaine de la mécanique. Il voulait toujours apprendre et évoluer dans la vie. C’est pour cela que c’est encore plus triste ce qui lui est arrivé. Surtout qu’on a bien discuté ce jour-là avant qu’il ne s’en aille. Il disait qu’il allait se préparer avant de sortir avec des amis.»

 

Mais Kheman Gungadin, cadet d’une famille de deux enfants, n’aura pas la chance de vivre toutes ces expériences dont il rêvait. Car sa sortie à moto lui a été fatale en ce samedi  3 octobre lorsque sa Vespa Keeway est entrée en collision avec le deux-roues d’un autre habitant de sa localité qui a lui aussi perdu la vie dans l’accident. Le jeune homme de 19 ans, qui habitait à la rue Macadam à  Baie-du-Tombeau, laisse derrière lui une famille et des amis inconsolables face à son départ tragique à un si jeune âge.

 

Textes : Elodie Dalloo  et Valérie Dorasawmy

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