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28 novembre 2023 08:36
Des larmes restent suspendues à ses yeux. Drapée dans un magnifique sari blanc symbole de deuil, Bhavna Dulhumsingh, née Ramsaha passe difficilement inaperçu dans le salon familial de ses beaux-parents, à Route Ménagerie, Cassis. Assise dans un coin, cette jeune femme de 27 ans, ne digère toujours pas les circonstances horribles entourant le décès de son époux Kawshik. Ce jeune homme également âgé de 27 ans, a succombé à ses blessures après avoir été victime d’un accident de la route survenu la veille, à Cascavelle. Les funérailles de ce jeune policier, ont eu lieu quelques heures plus tôt, ce mercredi 22 novembre. Des proches sont toujours présents aux côtés de la jeune veuve et ses beaux-parents pour les aider à surmonter cette terrible épreuve.
Le constable Kawshik Dulhumsing, comptait 8 ans de service au sein de la force policière. Il était affecté à la National Coast Guard de Trou-aux-Biches depuis 4 ans. Il travaillait, au préalable à Rivière-Noire. Le jour fatidique soit le mardi 21 novembre, le policier et son épouse rentraient à la maison après une escapade en amoureux lorsque l’impensable s’est produit. «Sofer kamion-la inn touy mo mari san pitie», martèle sans cesse Bhavna, la voix nouée par le chagrin et la colère. La jeune femme explique que son époux était en congé ce jour-là. Ce dernier lui a proposé de faire une petite road trip avant d’aller faire un tour à la plage de Tamarin. «Kawshik ti bien kontan sa kwin-la. Mo ti ousi ena enn photo shoot pou fer sa zour-la pou mo studio», souligne Bhavna.
Cette entrepreneuse dirige The Brows, un studio de beauté très fréquenté situé à Moka qui est spécialisé dans les sourcils. «Kawshik ti dir mwa ki li pou fer mo bann foto li mem. Li ti pran enn selfie stick tou. Linn amenn mwa plizier plas», se souvient Bhavna. La jeune femme en a également profité pour faire une très belle vidéo de son époux alors qu’il se balançait sur une liane avant de se rendre à la plage pour se relaxer. Toute la journée, la conversation a tourné autour de leur prochain voyage en Inde, prévu pour le 13 janvier prochain. Kawshik et Bhavna devaient fêter leur quatrième anniversaire de mariage, le 7 décembre. Etant tous les deux pris par leurs engagements professionnels en décembre, ils ont programmé ce voyage dans la Grande Péninsule à la mi-janvier.
«Kawshik a déjà tout préparé. Il avait tout noté dans un carnet. Il n’arrêtait pas de me parler des endroits qu’on allait visiter durant notre visite en Inde. C’était notre principal sujet de conversation durant toute la journée», confie Bhavna. L’impensable s’est produit alors que la Nissan Juke que conduisait Kawshik se trouvait dans les environs de Casela. «Nou ti dan nou lane trankil. Mo mari ti pe roul en direksion Cascavelle. Kamion-la ti pe roul dan direksion invers. Nou trouv li depi lwin kouma pe fer zig zag lor semin. Mo mari inn bizin tir dan gos pou evit tap anplin ar kamion-la me sofer la inn frot ek nou loto kan mem. Li ti fini tap ek lezot loto dan sa moman-la. Enn motosiklet inn aret ar nou zis apre», raconte Bhavna, la voix cassée par l’émotion. Quelques minutes plus tard, le policier sollicite l’aide du motard pour prendre en chasse le camion.
«Linn tous mo lame zis avan ek dir mwa rant dan loto met hazard. Li ti ousi dir mwa ki li pou vini la. Ala so bann dernie parol avan li ale lor sa motosiklet-la. De trwa minit apre monn koumans santi mwa pa bien ditou. Mo disan ti pe fini averti mwa ki enn zafer pa bon pou arive. Semin inn koumans bloke. Enn 4x4 inn aret ek mwa zis apre. Ti ena 3 madam ek 2 misie. Se par zot ki monn aprann ki mo mari inn fer aksidan. Monn tonbe enn ta fwa. Monn al dan plas kot Kawshik inn fer aksidan zis apre. Bann dimounn ki ti laba ti pe anpes mwa guet li. Sa moman-la mo pe priye bondie mo pe dir li retourn mwa mo misie mem si so lame ou lipie kase. Ti ena disan partou. Bann volonter ti fini kouver so lekor ek enn nat. Monn krie ek dir Kawshik ki li mem bizin donn mwa kouraz», se remémore douloureusement Bhavna.
Le rapport d’autopsie indique que le policier a rendu l’âme suite à un «shock due to multiple injuries». La police s’est rendue sur les lieux du drame vers 18h50. Sur place, les policiers présents ont retrouvé un jeune homme sur l’asphalte portant un short vert et un t-shirt rouge. Il était allongé sur le ventre. Il saignait abondamment du nez et des oreilles. Les policiers lui ont prodigué les premiers soins alors qu’il agonisait. Il a poussé son dernier soupir peu après. Sur place, les policiers ont également retrouvé une motocyclette rouge de la marque Honda. Il y avait un autre homme quelques mètres plus loin sur le côté gauche de la route en direction de Yemen. Il s’est présenté comme le pilote. Il s’agit d’un habitant de Quatre-Bornes. Il était blessé aux jambes.
Le mortuary van de la police a, par la suite, été mandé sur place pour transporter la dépouille du constable Kawshik Dulhumsing à la morgue de l’hôpital de Candos. Le Quatre-bornais a, lui, été dirigé vers cet établissement hospitalier dans une ambulance. Son pronostic vital n’est pas engagé. Les proches de Kawshik sont, eux, anéanties. Ils ont tous des mots élogieux à son égard. «Il a toujours été généreux et très jovial. Il était toujours disponible pour venir en aide aux autres. Il était également très apprécié par les membres de sa famille et aussi par son proche entourage», confie Bhavna. Et d’ajouter : «Sa sofer kamion-la pann zis pran so lavi. Linn detrir plizier dimounn zot lavi. Mo sir li pann realize seki linn fer sa zour-la. Kouma linn kapav permet li fer enn zafer koumsa. Mo mari mem ti pe okip so dadi 82 an, so papa 61 an ek so mama 55 an. Sa sofer-la inn detrir tou nou bann rev ek nou bann proze.»
La mère de Bhavna lâche laconiquement : «Kawshik inn koumans travay boner. Linn marye boner. Linn mor boner.» Il y a des regrets, des remords, des fêlures et des compromissions qui ne cicatrisent pas, qui ne cicatriseront jamais. Bhavna et les siens ne diront pas le contraire sur cette fameuse citation d’Anna Gavalda, une femme de lettre française connue pour ses romans et ses articles en tant que journaliste.
La police a mobilisé plusieurs unités pour retrouver le chauffard qui a tué le constable Kawshik Dulhumsing. Des membres de la District Crime Intelligence Unit de la Western Division et leurs collègues de la Criminal Investigation Division de Flic-en-Flac ont procédé à l’arrestation du suspect le lendemain des faits. Il s’agit de Kavish Jogarah. Selon une source policière, ce security officer de 28 ans, habitant Xavier Alamanda Lane, à Cascavelle est fiché comme un «druct addict».
Les policiers qui ont participé à l’opération ayant mené à son arrestation ont également retrouvé le camion blanc et vert accidenté de la marque Mitsubishi sur la route principale à Tamarin à proximité d’un lieu de culte. Kavish Jogarah a déjà avoué les faits. Les éléments du Scene of Crime Office ont déjà examiné le véhicule. La police a également réclamé une prise sanguine pour les besoins de l’enquête.
Le suspect est détenu au poste de police de Rose-Hill. Il fait l’objet d’une charge provisoire d’homicide involontaire et de culpable ommission. Pressé de questions, ce jeune homme de 28 ans, a déclaré aux enquêteurs qu’il n’a pas de permis. Il prétend qu’il ne savait pas qu’il avait percuté une motocyclette, la veille, causant la mort d’un policier. Il a aussi expliqué aux limiers qu’il avait pour habitude de conduire le camion en question sans la permission de son propriétaire.
La police a interrogé ce dernier le soir fatidique. Il s’agit d’un habitant de Trou-d’Eau-Douce. Les enquêteurs sont remontés jusqu’à lui après avoir visionné toutes les images des caméras de Safe City de la région. L’habitant de l’Est, qui est à la tête d’une compagnie de construction a expliqué aux limiers que son véhicule est retenu sur plusieurs chantiers dans l’Ouest. La police a mené plusieurs battues à ces endroits mais le camion n’y était pas.
Les limiers sont remontés jusqu’à Kavish Jogarah sur la base de certaines informations précises. Sur les images des caméras de Safe City, on voit clairement le camion qu’il conduisait rouler en direction de Rivière-Noire. On voit ensuite la motocyclette le doubler. Le policier voyageait en croupe sans casque. Kavish Jogarah les a, par la suite, renversés avant de continuer sa route sans s’arrêter. L’enquête policière se poursuit.
A ce jour, le pays compte déjà 118 victimes suite à des accidents de la route. Les derniers chiffres indiquent aussi que le pays compte 10 victimes de plus depuis le début de l’année contrairement à 2022. La dernière victime en date est un jeune garçon de 9 ans, habitant Roche-Bois. Il est mort après avoir été percuté par un scooter non loin de son domicile. (Voir texte plus loin)
Le décès d’un enfant est probablement l’expérience la plus douloureuse et difficile dans la vie d’un parent. Considéré aux yeux de tous comme profondément injuste, il provoque un traumatisme émotionnel inexplicable, encore plus lorsqu’il survient soudainement, brutalement. C’est le cas d’Agnès Jean, une habitante de Roche-Bois, qui peine à trouver les mots pour exprimer ce qu’elle vit. «Li pa fasil, mo santi mo leker gro. Mo pena mo pou dekrir mo douler. Mo santi mwa tousel parski se mo zanfan ki ti pe amenn lazwa dan nou fami», lâche-t-elle la gorge nouée, la voix brisée par l’émotion. Ce jeudi 23 novembre, Clarino Edouard, son fils de 9 ans, a perdu la vie dans des circonstances cruelles et tragiques. Il a été renversé par un deux-roues conduit par adolescent de 15 ans habitant sa localité et a poussé son dernier soupir quelques minutes après son arrivée à l’hôpital. Les membres de sa famille sont, depuis, inconsolables.
Le souvenir de ses derniers moments avec son fils, cadet d’une fratrie de 9 enfants, repasse en boucle dans sa tête. Avant de quitter son domicile dans la matinée du jeudi 23 novembre pour se rendre à un atelier de travail, Agnès Jean se souvient que «dernie kitsoz monn dir li se aret zwe boul. Je l’ai tenu par la main et je l’ai conduit dans l’arrière-cour pour demander à son frère de veiller sur lui avant de m’en aller». Décrivant son enfant comme très turbulent et débordant d’énergie, elle raconte que le petit garçon était un passionné du ballon rond. «Il passait son temps à jouer au football avec ses frères lorsqu’il ne se bagarrait pas avec eux.» Pendant cet atelier de travail ce jour-là, se souvient-elle, c’est avec fierté qu’elle avait montré une vidéo de Clarino à ses amis, leur disant : «Get laz li ena li pe baign so ti frer.» Quelque temps plus tard, relate-t-elle, «monn santi mwa pa bien, mo latet inn koumans vire». Elle devait apprendre, au bout de quelques minutes, que son enfant avait été victime d’un accident.
Il était environ 13 heures lorsqu’est survenu le drame à quelques mètres de leur domicile, à la rue Deboucher, à Roche-Bois. D’après Thomas, le frère aîné du petit garçon, qui est âgé de 17 ans, «mo ti lor lili, mo ti pe fer li dormi. Les portes étaient toutes verrouillées. Je pense que lorsque je me suis endormi que Clarino est allé à l’extérieur en passant par une fenêtre». Il raconte que ce sont des voisins qui sont venus l’informer de la tragédie. «Kan monn al deor, monn trouv li anba. Il était encore conscient. Il ne pleurait pas mais se tordait de douleur.» Alertée, la police de la localité n’a pas tardé à arriver sur les lieux et a retrouvé l’enfant gisant sur le sol avec de graves blessures à la tête après avoir été renversé par une moto conduite par un habitant de la localité âgé de seulement 15 ans. Le Service d’Aide Médicale Urgente (SAMU) étant bloqué dans la circulation, c’est à bord du véhicule de police que Clarino, accompagné de son père Clarel, allait être conduit à l’hôpital Dr Jeetoo.
Véritable coup du sort, ce même véhicule de police devait également entrer en collision avec un autre deux-roues pendant le transfert de l’enfant à l’établissement hospitalier. Le SAMU, qui a, entretemps, pu arriver sur place, s’est ainsi chargé de conduire tous les blessés à l’hôpital. Si l’état de santé des deux femmes impliquées dans le deuxième accident n’est pas jugé préoccupant, le petit Clarino a eu moins de chance. Il a succombé à ses blessures peu de temps après. Son décès a été constaté par un médecin de l’établissement à peine quelques minutes après son arrivée dans celui-ci. Dans la soirée, une autopsie a été pratiquée par le Dr Seewooruttun, médecin légiste de la police, et son décès a été attribué à des cranio cerebral injuries. Anéantie, Agnès Jean regrette de n’avoir pas pu tenir son enfant une dernière fois dans les bras avant qu’il ferme les yeux. «Des proches m’avaient récupérée en voiture pour me conduire à l’hôpital mais lorsque je suis arrivée sur place, il avait déjà rendu l’âme.»
Durant les heures ayant suivi le décès du petit Clarino, la police a procédé à l’arrestation de l’adolescent responsable. Ce dernier, qui ne détient pas de permis, a été soumis à un alcootest, qui s’est avéré négatif. Cependant, les enquêteurs soupçonnent fortement qu’il était sous l’influence de drogue au moment de l’accident. Testé positif au drug test kit, il a été soumis à des examens sanguins dont les résultats sont attendus incessamment. Entretemps, la police le garde en détention dans un centre spécialisé pour mineurs et les enquêteurs ont déjà saisi son véhicule pour les besoins de cette enquête. Questionné quant aux circonstances de la tragédie, l’adolescent a déclaré que la victime avait traversé la route si brusquement qu’il n’a pas été en mesure de l’éviter. Vu son jeune âge, la police ne prendra une décision sur son sort qu’après avoir consulté un avis légal. L’enquête suit son cours.
D’après les membres de la famille Edouard, le petit Clarino souffrait de trisomie 21 et pouvait à peine parler. Dans sa manière bien à lui de s'exprimer, cette petite boule d’énergie faisait la joie de tous les membres de son entourage. «Li ti kontan zwe, kontan danse, kontan lager, sirtou avek so bann frer. Il avait la joie de vivre.» Dans sa localité, poursuit cette maman meurtrie, «tou dimounn ti konn li ek ti bien kontan li». Même si Clarino se disputait souvent avec ses frères, l’un d’eux fait part de tous les bons moments qu’ils passaient tous ensemble. «Nou abitie zwe boul ansam. Mo ti abitie pran li, may li, fer li sante ek danse. Tou seki nou ti pe fer, li ti kontan fer parey.»
Ne pouvant contenir sa colère, Agnès Jean lâche amèrement : «Zanfan 15 an pe tir lavi lot zanfan aster. Dan ki lemond nou pe viv ? Kot nou pe ale dan sa pei la ? Pena oken lalwa ki pou kapav aret zot.» Ce qu'elle espère plus que tout à présent, «se ki ena enn lazistis pou mo zanfan. Sekinn tap avek li bizin paye, mem si sa pa pou ramenn mwa mo garson». Les funérailles du petit ange ont eu lieu à 13 heures ce vendredi 24 novembre.
Triste sort qu’a connu ce Mauricien âgé de 24 ans. Installé en France, Adrien Vacher, originaire de Terre-Rouge, a connu une fin tragique dans la soirée du 19 novembre. Il n’a pas survécu après avoir été victime d’un accident de la route dans la commune du Courchevel, en Savoie, comme le rapporte le site France.tv. Ce jeune pâtissier était en voiture avec deux amis lorsque leur véhicule a fait une sortie de route et a terminé dans un ravin. Avec l’aide du groupe Solidarité mauriciens d’ailleurs, sur Facebook, sa famille a lancé un appel à la générosité pour recueillir de l’argent pour les frais de rapatriement du corps. Au vendredi 24 novembre, sa famille avait ainsi pu récolter les fonds nécessaires pour que la dépouille de la victime puisse rentrer dans l’île. Son entourage a tenu à exprimer sa profonde gratitude à tous ceux ayant contribué pour qu’Adrien Vacher rejoigne sa dernière demeure sur sa terre natale.
Textes :Jean Marie Gangaram & Elodie Dalloo
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