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26 avril 2020 00:54
En pleine crise du Covid-19, le Paille-en-Queue risque-t-il de perdre des plumes ? Car, comme d’autres compagnies aériennes internationales, Air Mauritius se retrouve aussi à subir des secousses. La conséquence : MK a été placé sous administration volontaire et un plan de restructuration est attendu. Et ce qui se passe affecte bien évidemment les employés de la compagnie d’aviation nationale.
«Mon moral est au plus bas en ce moment. Je sais qu’on est dans une situation inédite. Les nouvelles sont mauvaises et ne sont pas rassurantes. Je m’inquiète beaucoup pour mon emploi», nous a confié un jeune Cabin Crew qui a commencé récemment son aventure à Air Mauritius. Un autre de ses collègues se dit aussi «chamboulé» par ce qui se passe mais n’a pas voulu en dire davantage.
Par contre, certains, employés depuis plus longtemps, arrivent à garder leur sang-froid. «À chaud, c’est vrai qu’il y a l’effet du choc. On sait que le worst scenario quand une compagnie est mise sous administration volontaire, c’est qu’elle peut passer en receivership. À ce moment-là, on se pose des questions. Il faut savoir que c’est environ, ou un peu plus, de 3 500 employés, dont des couples, qui sont concernés par l’éventualité d’une fermeture. On est dans l’inconnu, on a peur. Mais je comprends que la priorité du gouvernement, malgré ce qui se passe à Air Mauritius, et bien qu’il soit actionnaire majoritaire, reste la santé publique. Les bonnes décisions ont été prises au bon moment pour éviter une situation plus catastrophique pour la compagnie. Il y a maintenant les deux administrateurs, et ils vont inspecter la compagnie qui est malade. Ils vont faire leur diagnostic et ils vont, par la suite, faire leurs recommandations. Il y aura des sacrifices à faire et on espère tous que ce sera fait avec un degré d’humanité. Pour ma part, je ne peux que faire confiance aux administrateurs et à leur expertise», confie cet autre membre du personnel navigant d’Air Mauritius.
Celui qui compte plusieurs années de service au sein de MK dit rester optimiste : «C’est une situation nouvelle. La compagnie Air Mauritius est impactée par la crise économique, comme beaucoup de secteurs. Comme c’est nouveau, il nous faudra un temps d’adaptation. C’est difficile par rapport à la conjoncture actuelle mais je reste optimiste sur le fait qu’on va pouvoir s’en sortir. Air Mauritius contribue au secteur du tourisme et on sera toujours dans le paysage économique du pays. Il y aura des sacrifices à faire, il faudra composer avec de nouveaux inputs mais il va falloir avancer.»
Comment s’annonce l’avenir ? C’est la question qui est sur toutes les lèvres. «On vit une situation très stressante... Souhaitons maintenant que ce ne seront pas les employés qui paieront pour les mauvaises décisions qui ont été prises comme avec le hedging. De plus, la question est de savoir qui va gagner la bataille entre les gros salariés et les salariés normaux dans le nouveau modèle économique», constate une hôtesse de l’air qui, comme ses collègues, suit la situation de très près. D’autres, comme un autre personnel navigant que nous avons interrogé, pense que le Paille-En-Queue saura affronter cette
crise : «Je suis confiant qu’une sortie de l’impasse est envisageable. Je dirai même que la compagnie et le pays pourraient mieux sauter après le recul du Covid-19. Il ne faut pas oublier que MK a été créée en 1967 à la veille d’une Indépendance qui s’annonçait naufrageuse pour les éminents économistes. Elle a aussi traversé la guerre du Golfe, la crise financière de 2007/8 et bien d’autres impasses. Maurice sera toujours une destination prisée. Au niveau mondial, il ne faut pas oublier que la planète a connu un bond économique sans précédent après la Seconde Guerre mondiale, ce qui n’a rien de comparable au Covid-19. Tout dépendra des mesures, du leadership et de la cohésion sociale.»
Face à cette nouvelle, les réactions politiques pleuvent. Pour Paul Bérenger, le leader du MMM, il est encore possible de sauver Air Mauritius mais pas avec le gouvernement actuel. C’est dans une vidéo sur sa page Facebook, le jeudi 23 avril, qu’il s’est livré. Selon lui, ce qui est arrivé est un drame pour Air Mauritius et ses employés. Et pour lui, la compagnie d’aviation «allait crasher bien avant la crise qu’a engendrée la pandémie du Covid-19». Selon lui, le gouvernement, depuis 2015, «pe badinn» avec l’économie du pays en général et avec Air Mauritius en particulier. Le leader de l’opposition, Arvin Boolell, parle, de son côté, de mauvaise gestion de la compagnie d’aviation nationale et de conflits d’intérêt, avec la nomination de Sattar Hajee Abdoula comme administrateur. Ce dernier est aussi Chairman de SBM Holdings. Le leader du PMSD, Xavier-Luc Duval, déplore aussi la nomination de Sattar Hajee Abdoula en tant qu’administrateur. Pour Navin Ramgoolam, la mise sous administration volontaire d’Air Mauritius aurait pu être évitée s’il n’y avait pas d’ingérence politique. Dans une déclaration à l’express, il explique comment la nomination des proches du pouvoir a contribué à accélérer la chute de MK et à dilapider 82 millions d’euros.
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