Publicité

Allégations sur l’ADSU et la Special Striking Team : la confiance des citoyens en la force policière au cœur des débats

19 juin 2023

C’est une histoire qui fait couler beaucoup d’encre... encore et encore. En effet, l’enquête se poursuit dans l’affaire des bandes sonores qui font énormément de bruit. Durant la semaine écoulée, l’interrogatoire de Vimen Sabapati – arrêté pour trafic de drogue allégué le 3 mai – s’est poursuivi, et le principal concerné, qui crie au complot depuis son arrestation, a confirmé avoir enregistré les conversations qui ont circulé dans les médias et dans lesquelles l’ancien entraîneur national de la Fédération mauricienne de muay-thaï fait de graves allégations concernant certaines méthodes, notamment des abus de pouvoir et des actes illégaux, de certains officiers de l’Anti-Drug & Smuggling Unit (ADSU) et de la Special Striking Team (SST).

 

Commentant cette affaire au Parlement le lundi 12 juin, le Premier ministre Pravind Jugnauth a déclaré avoir eu l’assurance du commissaire de police (CP), Anil Kumar Dip, qu’«il ne tolérera aucune brebis galeuse, si jamais il y en a, au niveau de la force policière (...) Laissons les cours de justice faire la lumière sur ces allégations».

 

Durant la semaine écoulée, l’assistant-surintendant de police (ASP) Ashik Jagai a, également, commenté la bande sonore, où son nom est mentionné, sur les ondes de Top FM. «C’est un complot visant à permettre la prolifération des narco-politiciens»,  a-t-il souligné. Quelle image ces allégations qui pèsent sur deux unités de la force policière peut-elles renvoyer à la population ?  C’est la question que nous avons posée à nos interlocuteurs, qui nous donnent leur avis sur ce sujet d’actualité.

 

Padma Utchanah, du Ralliement Citoyen pour la Patrie, estime que le CP aurait dû suspendre Ashik Jagai de ses fonctions. «Alors qu’un haut gradé de la police est mis en cause, de manière très grave, pour des faits de corruption, de trafic de drogue et éventuellement de blanchiment, aucune de ces institutions, la CCID, l’ICAC et la FIU, ne le convoque. L’intéressé fait même un bras d’honneur à tous ces organes d’enquête. Il est parti se donner en spectacle à la radio, un show diffusé également en vidéo sur les réseaux sociaux. C’est quoi ce pays ? Qu’est-il devenu ? Pravind Jugnauth est ministre de l’Intérieur et Premier ministre, et Dip est commissaire de police. Ce sont les responsables administrativement, politiquement et pénalement. Le Commissaire Dip aurait dû suspendre Ashik Jagai de ses fonctions avec effet immédiat dans l’attente des résultats d’une enquête», nous confie Padma Utchanah qui se pose beaucoup de questions concernant les allégations formulées.

 

«Dans quel pays a-t-on vu qu'un haut gradé qui est mis en cause directement, obtenir l’aval de son chef, le commissaire Dip, pour aller clamer son innocence dans un late night talk show, au lieu d’être convoqué au CCID ?  Face à la gravité de la situation et des allégations de "mafia de la drogue" faites à l’encontre de l’institution policière, les réponses données par le ministre de l’Intérieur et le commissaire de police ne sont guère à la hauteur venant de professionnels.»

 

Selon notre interlocutrice, la police a perdu toute sa crédibilité devant la justice ayant été, précise-t-elle «sanctionnée à plusieurs reprises». Et pour Padma Utchanah, tout ce qui se dit en ce moment sur la force policière ne rassure pas les citoyens. «La population a perdu toute confiance dans cette institution qui projette une image négative en donnant le sentiment d’être une police corrompue et politisée. Il faut un nettoyage d’envergure et seul le Ralliement Citoyen pour la Patrie l’avait proposé dans son programme en 2019», martèle la présidente de ce mouvement.

 

«Crédibilité»

 

Pour Yaadav Damree, avocat et District Councillor, les allégations sur la force policière font planer le doute et mettent en cause la crédibilité de cette institution. «Depuis quelques années, on peut voir qu'il y a une ''war of information'' à Maurice, comme c’est le cas dans le monde entier. Parmi les sujets qui font la Une, ce sont les allégations qui planent sur la force policière. En premier, la Mauritius Police Force est l’institution nationale pour assurer l’application de la loi pour la République de Maurice et maintenir l’ordre dans la société mauricienne. La force policière, ayant la tâche compliquée de maintenir et faire respecter la loi, se retrouve, ces jours-ci, face à des allégations qui mènent à affecter sa crédibilité. Avant tout, il est fortement important de noter que ces allégations causent des doutes sur les services que la force policière nous offre», explique l’avocat en ajoutant que ce n’est pas tous les policiers qui contribuent à cette situation : «On se doit toujours de faire une distinction objective et ne pas pointer du doigt toute la force policière. Comme dans plusieurs autres secteurs, on a toujours des gens qui ne respectent pas le code d’éthique et qui finissent par salir la réputation de leur métier. Du coup, je pense que le commissaire de police – occupant un poste constitutionnel – a la tâche très importante de se pencher sur les allégations actuelles et de trouver une stratégie appropriée avec le chef de l’État pour résoudre les problèmes liés aux allégations.»

 

Selon Yaadav Damree, c’est important que les policiers rassurent la population. «Afin que l’État mauricien fonctionne en paix et en harmonie, il est impératif que le public ait confiance dans toute la force policière, comme c’est aux membres de la force policière de rassurer sur le fait qu’ils effectuent leur travail avec éthique. Je pense que les utilisateurs des réseaux sociaux doivent aussi contribuer au bon fonctionnement de notre pays et s’assurer de l’authenticité des informations avant de les publier et ne pas influencer négativement l’opinion publique», conclut notre interlocuteur sur l’épineuse question de l’importance de la confiance des citoyens d’un pays en la force policière...

Publicité