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Avinaash Munohur, politologue : «La jeunesse est le vote-clé pour cette élection»

La campagne électorale 2019, les jeunes, la force des uns et des autres… Parole à un politologue qui nous donne son avis d’expert sur comment s’annoncent les législatives de 2019. 

Le coup d’envoi de la campagne électorale a eu lieu le mercredi 9 octobre. À quel genre de campagne doit-on s’attendre ?

 

Non seulement elle sera la plus courte et la plus intense de notre histoire politique, mais il y a aussi beaucoup de premières dans cette campagne électorale. Il y a cette lutte à trois, qui n’est pas en elle-même une première, mais c’est la première depuis 1976.  La configuration a toutefois changé. L’île Maurice a changé. La société mauricienne a changé. Dans notre système politique, nous avons toujours eu, depuis 1976, des alliances avec un système bipolaire où deux blocs s’affrontaient. C’est exactement ce système qui va d’une certaine manière être questionné pendant cette campagne électorale. Peut-être même que certains plafonds de verre seront brisés.

 

C’est-à-dire ?

 

Clairement, chaque parti va avoir une influence extrêmement importante dans la répartition d’un électorat. Les trois partis historiques, le PTr, le MMM et le MSM, pourront tester leur force. On va connaître les vrais rapports de force pendant cette élection. La deuxième chose propre à cette campagne, c’est l’émergence de nouveaux mouvements, de nouveaux partis. Le plus sérieux électoralement jusqu’à présent étant Rezistans ek Alternativ. J’ai vu que les membres de ce parti contestaient le fait que l’amendement ne soit pas passé pour la déclaration ethnique et ils ont bien raison car c’est un principe fondamental de leur parti. J’espère qu’ils se présenteront quand même parce que nous avons besoin d’eux dans cette élection. Il y a aussi d’autres partis. J’ai vu 100% Citoyens, j’ai vu le mouvement Krwar avec Oliver Thomas et il y en d’autres. Le gros challenge de ces partis, c’est de se constituer une base. Il faut garantir une base et à partir de là, aller chercher à convaincre des gens. Je vais citer là une déclaration d’un politicien : «Politik dan Moris li sinp. Ou bizin garanti ou dipin diber apre al rod ou fromaz.» Le challenge pour ces partis, c’est donc d’acquérir une base tout en s’ancrant dans la cartographie politique mauricienne. Ce qui me semble certain, c’est qu’ils vont quand même être capables d’aller gratter quelques centaines de votes. Dans une lutte à trois, ça pourrait faire une très grande différence. La troisième chose, c’est l’abstention. Il y a une tendance vers une augmentation de l’abstention depuis le début des années 2000. 

 

Qu’est-ce qui pourrait, selon vous, permettre aux différents partis de faire la différence ?

 

Je crois sincèrement que la jeunesse est le vote-clé pour cette élection. Il y a une étude très sérieuse qui a été menée par plusieurs institutions mondiales, des think tanks en France et en Angleterre, qui ont repéré à Maurice un espace qui s’est ouvert depuis une quinzaine d'années ; une fissure dans l’électorat. La tendance à l’abstention aujourd’hui, on va l’arrondir, est aux alentours de 40 %. Dans cette tendance, on a clairement identifié que les votants avaient de 18 à 35 ans et représentaient 65 % de cette tendance. Dans une lutte à trois avec des petits partis qui vont aussi se positionner, le vote de la jeunesse va faire basculer énormément de choses.

 

Pensez-vous que le bilan du gouvernement Lepep va jouer en sa faveur ?

 

Pour en revenir au vote de la jeunesse, je dirais que les jeunes, pour voter, vont accorder une attention au bilan du gouvernement sortant. Les 18-35 ans aujourd’hui, qui sont de cette génération qui a commencé à avoir une conscience citoyenne au début des années 2000, ne regardent plus le pedigree, dans le sens mauricien du terme : les fils à papa, les neveux, les proches, etc. Ils ne sont plus intéressés avec tout ça. Ils sont intéressés à écouter les propositions des partis. La jeunesse a clairement des problèmes à Maurice. Un problème de chômage, un jeune sur quatre est au chômage. Un problème de pouvoir d’achat : la vie coûte de plus en plus cher. Un problème de logement : la génération de nos parents s’est endettée pour se loger et arriver à se loger. La jeune génération s’endette pour consommer, elle ne peut plus se loger. La jeunesse note un problème d’environnement : les plages se dégradent, les espaces communs sont privatisés. Le problème de la sécurité se pose aussi. Et les jeunes sont particulièrement concernés avec le fléau qu’est la drogue. J’ai vu un rapport de Cut et de PILS qui estimait que la première prise de drogues synthétiques chez les jeunes était autour de 13 à 14 ans. Les jeunes vont écouter et être responsive aux partis politiques qui vont apporter des solutions à tout cela. Ils vont regarder le bilan du gouvernement par rapport à tous les problèmes qu’ils voient autour d’eux et ils vont juger ce bilan avec un regard critique.

 

Quelles sont, selon vous, les forces et les faiblesses des différents blocs – les Alliances Morisien et Nationale, et le MMM – engagés dans les prochaines législatives ?

 

Je trouve que pour les deux blocs - l’Alliance Morisien et l’Alliance Nationale -, les forces et les faiblesses sont exactement les mêmes. Leur force : c’est leur leader. Leur faiblesse : c’est encore une fois leur leader. D’un côté, il y a quelqu’un qui traîne des casseroles, des coffres, et qui est extrêmement sulfureux. En face, il y a un Premier ministre sortant qui n’a pas été élu. Concernant le MMM, je dirais que les départs de ce parti l’ont renforcé. 

 


 

Bio express

 

Le politologue Avinash Munohur, 36 ans, est détenteur de deux licences, en Philosophie et en Musique, et d’un Master, fait à Paris, en Philosophie politique. Il a fait son mémoire sur la philosophie politique et critique contemporaine de la culture. Il vient de finir d’écrire son doctorat en Sciences politiques, qu’il va bientôt soutenir à Paris Diderot Sorbonne : «Je travaille sur le système politique à Maurice. Mon doctorat s’appelle Colonialisme, capitalisme, multiculturalisme : le pouvoir à l’île Maurice.»