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5 mai 2014 17:21
Rien ne semble pouvoir calmer leur chagrin. Un an après l’accident de l’autobus Blue Line, qui a coûté la vie à dix personnes, dont le chauffeur Deepchand Gunness, les proches de ce dernier – sa femme Jayree, 50 ans, son fils Avishek, 20 ans, et ses filles Karishma, 21 ans et Vima, 25 ans et mariée – sont tout autant effondrés. Le jeudi 1er mai, c’est par une journée de prière et dans une grande tristesse qu’ils ont commémoré le premier anniversaire de sa mort. Avishek témoigne : «C’est toujours très dur pour nous. Ce n’est pas facile d’oublier les circonstances dans lesquelles mon père est mort. Nos coeurs sont toujours remplis par le chagrin. En tant que nouveau chef de la famille, je fais de mon mieux pour essayer de remonter le moral de tout le monde.»
Après la mort de son père, Avishek s’est vu propulser, bien malgré lui, au rang de chef de famille. «Mo mem bisin fer tou aster», dit-il. Le jeune homme doit maintenant aider à subvenir aux besoins de sa famille. «J’ai dû mettre fin à mes études en nursing pour trouver un travail comme golf operator afin d’aider ma mère qui est femme au foyer et ma sœur Karishma qui fait des études en nursing. À ce jour, la CNT ne nous a accordés, qu’une compensation de Rs 112 000 alors que mon père était au service de cette compagnie depuis 20 ans. C’est aberrant. Nu santi nu delese. L’État et la CNT ont un devoir de réparation», lâche Avishek, révolté.
Avec ce terrible malheur, c’est le rêve et les projets de toute une famille qui ont été anéantis. «Mon père voulait acheter un terrain pour construire notre maison. Je devais l’aider financièrement en prenant un emprunt bancaire à la fin de mes cours. Nous avions également d’autres grands projets qui sont tous tombés à l’eau. Mon père ne méritait pas de mourir de cette façon. C’était un homme bon et juste. Il a toujours été quelqu’un de très discipliné. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il avait été choisi pour travailler dans les autobus Blue Line lorsque la CNT a décidé d’introduire ce type d’autobus.»
Au nom de son père, le jeune homme refuse de rester les bras croisés. «CNT ti panse pu aster nu silans ek Rs 112 000. On veut aussi faire croire que mon père est fautif car il avait pris des passagers en surplus ce jour-là. Mais deux jours avant l’accident, il avait signalé un problème de freinage mais rien n’avait été fait pour remédier à la situation. Résultat : dix morts et plusieurs blessés. La vérité finira par éclater. Nous irons jusqu’au bout. Ma famille a également entamé des poursuites contre la CNT car la compensation de la CNT est insuffisante. Mon père est un héros. Il a fait de son mieux ce jour-là. Le bilan aurait pu être bien plus lourd s’il n’avait pas fait ce qu’il a fait ce jour-là. C’est pour cela que nous trouvons révoltant que la CNT veuille lui faire porter le chapeau. L’État et la CNT doivent faire un compromis. Zot pa bisin atane judiciaire. Zot pa mem bisin pran enn bon decision avan tro tar», s’insurge Avishek, déterminé.
La tragédie rend certaines personnes plus fortes, dit-on. Mais pour Ram Bundhoo, le receveur qui était en service dans l’autobus Blue Line immatriculé 4263 AG 07, cela est difficile. «Je n’arrive toujours pas à oublier ce jour noir. Je veux oublier mais je n’y arrive pas. C’est très dur pour moi lorsque je dois emprunter l’autoroute. Mo latet fatigue sirtou kan mo truv enn bis Blue Line», confie cet habitant de Lallmatie.
Aujourd’hui, Ram Bundhoo n’a qu’un seul souhait : «Je veux faire construire un monument sur le lieu de l’accident à la mémoire de mon ami, le chauffeur Deepchand Gunness. Il est un héros. Il a fait de son mieux le jour fatidique pour sauver nos vies. Je suis persuadé que la situation aurait été plus grave s’il avait continué sa route vers Port-Louis. Il a fait de son mieux. Si li ti desane droite nou tou ti pou fini mor sa. C’est dommage que les familles des victimes n’aient toujours pas obtenu des dédommagements.» L’affaire revient en cour le jeudi 8 mai.
Depuis ce terrible drame, le quinquagénaire n’est plus le même homme : «J’avais arrêté de travailler pendant sept mois. J’ai obtenu un light job lorsque j’ai repris. Je ne suis plus receveur de ligne car je travaille uniquement sur la navette qui relie la gare Victoria à celle de l’Immigration. Désormais, je dois prendre des calmants et des anti-dépresseurs pour trouver le sommeil. Je vois un psychologue et un psychiatre presque tous les mois. Je remercie Dieu de m’avoir sauvé. La prière ine sap mo lavi.»
L’habitant de Lallmatie travaille désormais loin des grands-routes.
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