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15 mars 2021 14:04
Certains sont pour, d’autres non. Depuis que les remèdes anti-Covid ont fait surface, les réactions s’enchaînent dans le monde comme à Maurice. Si certains se montrent sceptiques quant à l’efficacité et face aux effets secondaires des différents vaccins administrés aux populations, d’autres n’espéraient que ce moment : se faire vacciner car ils estiment que c’est la seule manière de faire reculer le coronavirus. Les premières doses des vaccins d’AstraZeneca/Oxford sont arrivées à Maurice en janvier et étaient destinées dans un premier temps aux Frontliners mais le lundi 8 mars, la campagne nationale a commencé avant d’être vite interrompue par l’apparition de nouveaux cas locaux de Covid-19 et le confinement national qui a suivi. Toutefois, les autorités ont fait savoir qu’elles travaillaient sur une nouvelle formule pour que ces opérations reprennent avec d’autres configurations.
Au même moment dans le monde, le Danemark, l'Islande et la Norvège ont suspendu leur utilisation du vaccin AstraZeneca, le jeudi 11 mars, par précaution, cela «après des rapports de cas graves de formation de caillots sanguins chez des personnes qui ont été vaccinées». Mais à l'heure où nous mettions sous presse, aucune conclusion n'avait confirmé ce fait.
Chez nous, durant deux jours, des Mauriciens se sont rendus en grand nombre dans les hôpitaux régionaux et centres mobiles, un peu partout à travers l’île, provoquant des foules importantes et des files d’attente interminables devant ces lieux de vaccination, sur fond d’une organisation souvent critiquée avec l’absence de distanciation sociale et d’informations appropriées pour diriger ceux qui s’étaient déplacés.
Mardi 9 février, 6h30, l’hôpital Victoria, Candos. Un groupe de personnes est déjà présent. Parmi, Nicolas qui n’a pas voulu rater cet exercice. «Je me suis bien documenté sur le vaccin. Je sais que beaucoup ont des doutes, j’ai vu que certains articles de presse internationaux parlent de décès de personnes après que ces dernières ont été vaccinées mais personnellement, je pense que c’est un risque à prendre. La vaccination est, selon moi, le seul moyen possible de se protéger contre le virus», confie le jeune homme qui s’est réveillé très tôt pour être sûr de pouvoir recevoir le vaccin. «J’habite à la route Bassin et j’ai quitté chez moi à 6 heures avec un petit pack de survie : eau, biscuits et parapluie pour l’attente au soleil, pour être sûr d’être bien positionné dans la file d’attente car je savais que j’allais devoir beaucoup attendre vu l’engouement pour le vaccin. J’ai été surpris en arrivant de voir qu’il y avait déjà beaucoup de gens sur place, certains venant de plus loin.»
Entre ceux qui ont emmené chaises pliables et journaux, et ceux qui ne quittent pas leurs earphones ou encore avaient le nez collé à leur smartphone, chacun se débrouille pour rendre l’attente plus ou moins supportable. «Je pense que l’ouverture d’autres centres de vaccination à travers l’île pourrait aider à désengorger les hôpitaux régionaux», lâche Nicolas qui, quelque six heures plus tard, soit vers midi, ressort de l’hôpital visiblement fatigué mais satisfait. «Ça a été long, il y a des couacs, mais au moins, c’est fait. Rendez-vous maintenant en juin pour la deuxième dose.» Sadya, une Lecturer habitant Solferino, s’est sentie obligée d’aller parler à un personnel de l’hôpital après sa vaccination. «Je suis contente d’avoir fait le vaccin car c’est se protéger et protéger les autres. Mais quel exercice chaotique ! Les personnes âgées sont livrées à elles-mêmes. Il manque un service d’ordre pour canaliser les gens. Je doute que certaines personnes aient respecté leur ordre d’arrivée pour se mettre dans la queue. Ce n’est pas juste pour ceux qui, comme moi, se sont réveillés tôt pour venir. J’espère que les choses vont s’améliorer.»
C’est avec le sentiment du devoir accompli que Christine et Christian Laverdure quittent le centre de vaccination de Candos vers midi : «C’est contraignant, on a énormément attendu en restant debout mais au moins, on est vaccinés. C’est important, surtout que le virus circule toujours. On encourage tous les Mauriciens à le faire. C’est pour notre sécurité et ça fait partie de la bataille contre le virus», souligne Christine.
Scènes quasi similaires dans d’autres régions de l’île. Au Plaza, par exemple, Mélodie, qui n’a pas pu se faire vacciner mardi, se souviendra toute sa vie de cette expérience. «La journée de vaccination au Plaza a été une très mauvaise expérience. Déjà, parce que ma famille et moi étions convaincues de pouvoir nous faire vacciner en arrivant sur place bien avant le début de l’exercice. Visiblement, nous n’étions pas les seuls à avoir eu cette idée et à 8h30, la file d’attente s’étendait déjà sur plusieurs mètres alors que l’exercice n’avait même pas démarré. Le fait que l’ordre alphabétique n’était pas appliqué dans ce centre mobile (NdlR : un critère appliqué dans les hôpitaux régionaux) n’a fait que compliquer les choses, vu la grande affluence», nous confie la jeune femme avec frustration car, comme dans les hôpitaux, une fois le quota de personnes (entre 800 et 900 personnes ce mardi) atteint, les officiers de la Santé ont demandé aux autres de quitter les lieux. «Le plus dérangeant, c’était que d’innombrables personnes ne portaient pas de masque et ne respectaient pas la distanciation sociale. Nous avons patienté sous un soleil de plomb pour qu’à 9h30, on nous demande de rentrer chez nous car il n’y avait déjà plus de vaccins. C’est dommage que les dispositions nécessaires n’aient pas été prises pour en fournir le maximum alors que la situation était similaire la veille. Nous avons tâché de garder notre calme, bien que nous ayons perdu du temps et que nous nous soyons déplacés pour rien. Mais pour certains, notamment ceux ayant fait le déplacement pour la deuxième fois sans pouvoir se faire vacciner, la frustration était grande.»
D’autres, à l’instar de Marina Ythier-Jacobsz, qui s’est prêtée à l’exercice lundi, retiennent surtout la satisfaction d’avoir pu recevoir le vaccin. «J’étais contente que ma fille et moi, nous nous fassions vacciner ensemble et d’avoir pu faire une photo parce que j’ai vécu cette vaccination un peu comme un rite de passage… Après une longue attente, lorsque l’infirmière a plongé le vaccin dans mon bras, je n’ai pas ressenti beaucoup de sensations physiques mais beaucoup d’émotions. Après un an d’inquiétude, c’est comme si je reprenais un peu le contrôle de ma vie en faisant quelque chose de concret pour écarter de mon chemin cet horrible virus», nous confie Marina. Depuis, elle se porte bien : «Je n’ai pas eu d’effets secondaires autre qu’une grande fatigue le lendemain. Pas assez pour ne pas ressentir du soulagement d’avoir fait ce vaccin, même si je sais que seul, il ne protège qu’en partie !»
Avant de se lancer, elle s’est beaucoup renseignée sur le sujet : «Mes parents approchent tous deux les 80 ans et habitent juste à côté de chez moi. Je les aime. Je m’aime. J’aime mes enfants, ma famille élargie, mes voisins, mes collègues, mes amis, mon pays. Il était hors de question de ne pas me faire vacciner parce que, pour le moment, c’est le seul véritable moyen de me protéger de la Covid-19 et de protéger les autres. Pourtant, je suis à la base anti-vaccins et anti-médicaments, et plutôt très “bouillon chaud, miel, naturopathie et méditation” dans mon approche santé ! Mais curieuse de nature, je m’étais bien renseignée. Ayant la chance d’avoir dans mon entourage des médecins autres que Dr Google, je n’avais pas peur, même si ce vaccin a été développé très vite. La communication étant mon métier, j’ai aussi préféré reléguer à leur juste place les exagérations et autres théories de conspiration autour de ce vaccin. Sérénité, impatience et gratitude étaient donc à l’ordre du jour. Par solidarité pour les plus vulnérables qui ne peuvent pas le faire, nous nous devons de nous faire vacciner.»
Si beaucoup pensent le contraire, il y a surtout ceux pour qui la vaccination constitue une lueur d’espoir en vue d’un monde où le coronavirus sera sous contrôle...
«La vaccination est la solution contre la Covid-19», a encore une fois martelé le Dr Zouberr Joomaye, du High Level Committee sur la Covid-19, lors de la conférence de presse du comité, le jeudi 11 mars. Il a ainsi précisé que la campagne de vaccination reprendra, que 14 vaccination centres ont été identifiés et que 8 cliniques offriront aussi ce service. «Je rappelle au public que le vaccin est gratuit mais dans les cliniques, il y aura un "service charge" qu'il faudra payer», a-t-il déclaré.
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