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Éboulement à Macondé : L’inquiétude des habitants de Baie-du-Cap et Rivière-des-Anguilles

19 mai 2014

Deux maisons sur le flanc d’un ravin. L’angoisse permanente pour les deux familles.

«Nous vivons dans une angoisse permanente.» C’est ce qu’affirme Kamini Jodhee, conseillère du village de Baie-du-Cap. En effet, c’est l’inquiétude dans ce village du sud de l’île depuis qu’un rocher est tombé sur la route de Macondé, forçant les autorités à interdire l’accès à cette voie aux automobilistes et aux piétons, bien que certains s’y opposent (voir plus loin).

L’angoisse touche particulièrement les habitants de Baie-du-Cap et de Rivière-des-Anguilles, notamment ceux qui habitent sur le flanc des montagnes. «Nos vies sont menacées. Le National Disaster Management Committee doit impérativement mettre en place un plan d’évacuation d’urgence en cas d’éboulement ou de grave érosion», avance Kamini Jodhee. Dans un premier temps, suggère-t-elle, les autorités pourraient organiser régulièrement des simulations, avec la collaboration des habitants.

Rita Rajgopal, une habitante de Rivière-des-Anguilles âgée de 65 ans, abonde dans le même sens. Elle soutient qu’un plan d’évacuation est essentiel pour protéger les habitants de ce village. En attendant l’élaboration d’un tel plan, elle propose que des experts fassent des visites régulières sur le terrain, après les averses et le passage de cyclones notamment. C’est d’ailleurs en ce sens que des habitants de ce village auraient adressé une lettre à Hervé Aimée, ministre des Administrations régionales (voir hors-texte).

Rita Rajgopal, elle, vit sur le flanc d’un ravin depuis 37 ans. Bien que celui-ci se soit déjà effondré dans le passé, c’est depuis l’éboulement de Macondé qu’elle craint davantage pour sa sécurité. «Letan nou finn aprann se ki finn pase Macondé, nou finn koumans gagn plis per. Nou pe demande ki kapav arive enn zour», confie-t-elle.

Au quotidien, Rita Rajgopal tente de vivre normalement, d’oublier les potentiels dangers. «Nous avons fait d’énormes sacrifices pour pouvoir construire notre maison. Nous n’avons pas le choix, nous sommes obligés de vivre ici. La plupart du temps, l’on vaque à nos occupations pour oublier la peur», avoue-t-elle.

Benjamin Perle vit aussi avec la peur au ventre. Cela, depuis un peu plus de
15  ans. Cet habitant de la montagne Ruisseau  à Baie-du-Cap, âgé de 65 ans, ne cesse de se répéter que sa maison peut être balayée à tout moment par des éboulis provenant de la montagne. Ce qui lui serait d’une grande aide, dit-il, c’est d’être informé des mesures de précaution à prendre en cas de danger. «Li bien inportan ki aprann bann abitan kouma bizin fer si enn zour ena enn danze», avance-t-il.

Un de ses voisins, qui a souhaité témoigner sous le couvert de l’anonymat, déplore, pour sa part, les conditions dans lesquelles il doit chaque jour regagner son domicile. «Nous parvenons à rentrer chez nous grâce à des sentiers qui font deux mètres de large et des marches construites par le Conseil de district de Rivière-Noire. Je préfère ne pas imaginer ce qui peut arriver aux habitants, particulièrement aux enfants, si les rochers dévalent un jour les pentes de la montagne», fait-il ressortir.

Devant la détresse des habitants de Baie-du-Cap, Joe Ramalingum, ancien conseiller de village du Morne, ne peut s’empêcher de déplorer l’inaction des autorités. «Qu’allons-nous faire si, un soir, des rochers s’échappent subitement de la montagne et endommagent les maisons et infrastructures alentour ? Nous ne sommes pas préparés à faire face à une telle situation. Ce serait certainement le sauve-qui-peut général. Il est temps que chacun assume sa part de responsabilité», insiste-t-il.

Pour l’heure, c’est toujours un sentiment de peur qui anime les habitants de Baie-du-Cap et de Rivière-des-Anguilles qui croisent les doigts dans l’espoir qu’un drame ne se produira pas de sitôt dans leur localité.

 



Hervé Aimée : «Nous ne pouvons les laisser vivre dans des conditions à risques»


Une lettre aurait été envoyée au ministre des Administrations régionales, afin de l’informer des risques de danger à Baie-du-Cap et Rivière-des-Anguilles. Interrogé à ce sujet, Hervé Aimée nous a déclaré avoir reçu une lettre d’Abu Kasenally, l’informant que les habitants de la montagne Ruisseau Créole seront bientôt relogés : «Avec ce qui s’est passé à Macondé, nous ne pouvons pas laisser ces personnes vivre dans des conditions à risques.»

 



Les villageois protestent


En colère. Nombreux sont les habitants de Baie-du-Cap à l’être. C’est pourquoi ils ont participé à une manifestation le mercredi 14 mai, à quelques mètres du barrage routier installé, pour réclamer qu’une voie de la route de Macondé soit rouverte à la circulation dans les plus brefs délais. Nisha Balloo, une habitante de Baie-du-Cap, confie, par exemple, ne pas pouvoir se rentre au travail à temps, à cause de l’obstruction de cette route. «Nous sommes en retard parce que nous devons passer par Chamarel. Se enn vre kalver. Nou la vi pe vinn enn lanfer. Ena zenfan ki pa pe al lekol», s’indigne-t-elle.

Moonesamy Mooneean, conseiller du village du Morne, est du même avis. «Traverser par Chamarel pour se rendre à Baie-du-Cap, c’est très pénible pour les employés d’hôtels qui travaillent au Morne, mais aussi pour les élèves qui fréquentent le collège Keats, à Chemin-Grenier», explique-t-il. C’est la raison pour laquelle il lance un appel au gouvernement afin qu’il démarre les travaux d’élargissement de la route de Macondé au plus vite.   


De son côté, Josique Redegonde, députée mauve, a déjà commencé à mobiliser les habitants de la région en vue d’une marche pacifique, le 24 mai, si les autorités ne rétablissent pas la situation.

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