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Elle a fui l’Ukraine et attend de rentrer à Maurice - Shabnam Heerah : «Jamais sans mes animaux»

22 mars 2022

Notre compatriote avec ses deux animaux de compagnie :son lapin Blacky Choo et son chinchilla Alfred, qu’elle veut ramener avec elle à Maurice.

Pour rien au monde, elle ne les laisserait derrière elle. Pour ses animaux de compagnie, Blacky Choo et Alfred, un lapin et un chinchilla, Shabnam Heerah, jeune Mauricienne qui était jusqu’à récemment en cinquième année de médecine vétérinaire à la Sumy National Agrarian University, en Ukraine, est prête à tout, allant jusqu’à braver les dangers de la guerre avec ses petits protégés sur les épaules.

 

À vendredi, elle était en sécurité en Pologne et attendait de regagner Maurice. Mais sa priorité, c’est de rentrer au pays avec ses animaux. Dès qu’elle s’est retrouvée à l’abri, Shabnam – qui avait livré un témoignage dans une interview sur la chaîne d’informations américaine CNN – a remué ciel et terre pour trouver un moyen de les ramener avec elle. «C’est le mardi 8 mars que j’ai quitté l’Ukraine. J’ai voyagé dans un bus pendant 10 heures, puis 14 heures dans un train et j’ai marché 4 à 5 km. Je suis restée à la frontière pendant 4 heures et mes animaux étaient tout le temps avec moi. Ils sont ma force, mon soutien», confie la jeune femme.

 

Mais vendredi, une nouvelle l’a anéantie : «I didn’t receive an approval for my chinchilla. Apparently, he is a dangerous animal. Le vétérinaire m’a dit que je n’obtiendrai pas d’approbation.» À vendredi après-midi, Shabnam était effondrée : «Je pleure. Je ne me suis jamais sentie comme ça. Si j’avais su que tout cela arriverait, je serais restée en Ukraine, même si ma vie était en danger. Au moins, j’aurais été avec mes animaux. J’ai juste envie d’y retourner. Là-bas, personne ne me disait d’abandonner mon animal de compagnie.»

 

Avec ses animaux, elle dit avoir tout affronté. «Ils m’ont accompagnée dans tous mes moments en Ukraine. J’ai toujours eu des animaux à Maurice ; quand je suis arrivée en Ukraine, je me suis donc dit que j’allais prendre des animaux de compagnie. J’étais la seule Mauricienne à l’université. Je suis très introvertie et je savais que les animaux allaient pouvoir m’aider. Le fait de les avoir m’a rendue plus responsable. Je savais qu’ils étaient là, qu’ils comptaient sur moi et que je devais être présente pour eux. Il s’agit de deux êtres vivants.» Blacky Choo et Alfred ont été son réconfort quand elle faisait face à la réalité de la guerre, il y a quelques semaines : «Je suis restée forte et je ne me suis pas écroulée pour eux. Je sais que leur vie dépend de moi. Même quand il fallait se rendre dans un bunker pour se mettre en sécurité, ils étaient avec moi. Je ne les ai jamais abandonnés.»

 

Notre compatriote n’a pas hésité une seconde sur ce qu’elle devait apporter avec elle en quittant l’Ukraine. «J’ai choisi de quitter mon laptop juste pour pouvoir transporter mes animaux. Même à l’abri en Pologne, je suis encore marquée par ce que j’ai vécu. Quand j’entends un son d’avion ou d’hélicoptère, ma première pensée, mes premiers réflexes, c’est de me tourner vers mes animaux. J’ai toujours aimé les animaux, c’est pour cela que je me suis tournée vers des études de vétérinaire. Devenir vétérinaire, c’est mon rêve depuis la maternelle. Qu’importe où je vais, pas question de bouger sans mes animaux. J’ai quitté la guerre avec eux ; ce n’est pas pour les abandonner par la suite», s’écrit Shabnam qui n’a pas arrêté, ces derniers jours, de plaider la cause de ses protégés. «Je suis en sécurité mais je n’ai pas l’esprit tranquille concernant la suite de mon voyage. On m’a demandé des documents concernant mes animaux, que je n’ai pas avec moi et qui se trouvent en Ukraine. Mes amis qui étaient dans le même cas de figure que moi ont pu retourner dans leur pays, soit en Inde, avec leurs animaux, sans avoir eu besoin d’aucun document. Tout ce que je demande, c’est un peu de compassion…»

 

Au vendredi 18 mars, la Mauricienne était toujours dans le flou concernant son retour. Elle lâche, très triste : «Ce qui est sûr, c’est que je ne vais pas quitter mon animal. Pour un petit problème, ils en font un gros problème. Que ferait un chinchilla ? Tuer des gens ?» 

 


 

Ils retrouvent la sécurité et la sérénité à Maurice

 

«Mon fils va bien, même s’il a été perturbé par tout ce qu’il a vécu ces dernières semaines...» Yannick Parfait est un papa heureux. Après de longs jours d’incertitude, c’est avec joie et soulagement que son épouse Aleksandra et lui ont pu serrer à nouveau leur fils Jaden, 3 ans et demi, dans leurs bras. C’est le mercredi 16 mars que le petit est rentré d’Ukraine avec sa grand-mère Olga. «Mon fils a un souci de santé et il se trouvait en Ukraine chez mes beaux-parents car nous avions pu y trouver un traitement qui le convenait après avoir cherché beaucoup d’avis médicaux. Cette guerre est venue chambouler bien des choses, jusqu’à compromettre le traitement de Jaden auquel il réagit très bien. Quand je l’ai retrouvé il y a quelques jours, j’ai noté une nette amélioration dans sa façon de s’exprimer», confie Yannick. «Jaden était heureux de nous revoir. Il était au coeur de la guerre parce qu’il se trouvait à Kiev, là où tout se passe actuellement. Il y avait les bombes et les sirènes et tout mais je ne pense pas qu’il a compris ce qui se passe.»

 

 

Olga, une Ukrainienne, et son petit-fils Jaden, qui est mauricien, ont pu rentrer à Maurice mercredi.

 

Il est content que son fils soit à la maison : «C’était dur de savoir que son enfant et une partie de sa famille vivent des choses difficiles et inimaginables. Étant loin, on se sentait impuissants. On était en constante communication pour être sûrs que tout allait bien. Le 28 février au matin, j’ai eu comme un pressentiment et j’ai demandé à ma belle-famille de quitter la maison tout de suite. Heureusement qu’ils ont bougé car quatre jours plus tard, l’appartement a été détruit.»

 

C’est en Pologne qu’Olga et le petit Jaden ont pu se mettre à l’abri, avant de prendre l’avion pour Maurice : «Ma belle-mère quitte tout derrière. Elle laisse surtout son époux, qui a dû rester pour combattre pour son pays. Mon épouse est aussi sans nouvelles (à vendredi) de son grand-père qui a 97 ans. Les autorités nous ont été d’une grande aide pour le retour de mon fils et pour accueillir ma belle-mère qui est ukrainienne. Elles ont été formidables.» Le coeur tourné vers l’Ukraine, la petite famille savoure une sérénité retrouvée : «On a fait une sortie à la plage et on a été au jardin d’enfants et Jaden était tout sourire. On reste en contact permanent avec mon beau-père pour suivre l’évolution de la situation...»

 

Kevin Allagapen et sa famille sont au pays depuis lundi.

 

Après avoir vécu des moments difficiles en ayant côtoyé les réalités d’une guerre, un autre Mauricien, Kevin Allagapen, comme Comal Luchan, la semaine dernière, a dû tout laisser derrière lui en Ukraine pour retrouver son île natale avec sa compagne et son fils, ce lundi 14 mars. «Tout ce qu’on a vécu est encore dans nos têtes, on veut juste se reposer un peu...», nous a-t-il déclaré, soulagé de se retrouver à l’abri dans sa petite île.

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