Publicité

Encore des dégâts conséquents à Canal Dayot, à Petite-Rivière et au Caudan Waterfront : des sinistrés exaspérés témoignent de leur ras-le-bol

21 janvier 2024

La maison de la famille Eriksson se retrouve submergée à chaque grosse averse.

Le constat est triste et désolant pour bon nombre de Mauriciens à la levée du confinement ce mardi 16 janvier lorsqu’ils découvrent, impuissants, l’ampleur des dégâts occasionnés par le cyclone Belal. Dans plusieurs régions durement touchées, cette scène de désolation ne fait qu’éveiller les tristes et douloureux souvenirs d’une catastrophe déjà vécue : les inondations meurtrières de 2013, qui avaient coûté la vie à 11 personnes. Dans la région de Port-Louis, plus particulièrement au Caudan Waterfront, où le plus grand nombre de morts avait été répertorié lors de ce dernier cataclysme, la montée des eaux n’a, certes, fait aucune victime, mais les dégâts matériels restent impressionnants.

 

Ce jeudi 18 janvier, l’opération de nettoyage et de déblayage était toujours en cours, nécessitant la délimitation d’une bonne partie du centre commercial, submergé d’ordures et de boue. L’évacuation de la montagne de déchets s’étant accumulés au front de mer aura même requis l’utilisation de tractopelles pour un nettoyage plus rapide. L’état déplorable des lieux après le passage du cyclone Belal ne peut que nous laisser deviner qu’aucune solution concrète n’a encore été trouvée pour venir à bout des débordements. Ayant eu pour mot d’ordre de la direction de ne pas s’adresser à la presse, comme nous l’a laissé entendre une employée, les commerçants et restaurateurs venus faire un constat des pertes encourues sont peu bavards. Bien que le coup reste rude, l’un d’eux, qui y gère sa boutique depuis très longues années, tente tout de même de voir le bon côté des choses. «Siklonn-la pann fer otan dega ki kan ti ena inondasion», lâche notre interlocuteur, en prenant le soin d’éviter de trop en dire.

 

Les conséquences du cyclone étaient également encore visibles à Canal Dayot, où plusieurs habitants se retrouvent dans une situation chaotique à chaque épisode de pluies diluviennes à cause de la montée des eaux dans la rivière. Chez le couple Eriksson, l’heure était toujours au grand nettoyage en ce jeudi 18 janvier. Leur fille Nathalie, qui habite à La-Tour-Koenig, explique qu’elle n’a eu autre choix que de prendre une semaine de congés pour venir aider ses parents. «Lindi dernye, mo ti lakaz. Monn sonn zot pou demande kouma delo ete dan la rivyer. Zot inn dir mwa ki tou korek, ki li ankor lamoitie», raconte-t-elle. Surveiller le niveau de l’eau est devenu une habitude, car la maison de ses parents se retrouve submergée à chaque grosse averse. Le temps pour elle de quitter sa maison pour les rejoindre, la situation avait drastiquement changé : «Zot inn avoy mwa foto ek video ki zot lakaz pe fini inonde. Linn arive an enn fraksion segonn. Monn bizin marse pou vinn zwen zot lerla.»

 

Les traces de boue encore visibles sur les murs de leur salle à manger témoignent de la situation chaotique que les Eriksson ont à nouveau vécue. Des meubles ont été endommagés, les lits sont abimés et les matelas sont gorgés d’eau. Amère, notre Nathalie lâche : «Mo bann paran ti perdi boukou dan inondasion an 2013. Ti bizin refer lakaz, refer partou. Ce qu’ils ont pu récupérer pendant 10 ans après avoir durement travaillé, ils l’ont à nouveau perdu lors du cyclone.» Elle raconte que des projets devaient être entamés pour faire agrandir la rivière située derrière leur maison mais que les travaux n’ont jamais démarré. «Finn ariv ler pou zot trouv enn solisyon pou sa larivier-la, zot fer enn kanal pou ki delo ki sorti lor montagn pa akimile. Nou kompran ki ena sanzman klimatik, me bizin kone ki pou fer pou epargn bann dimoun ki abit isi.»

 

Les dégâts sont tous aussi conséquents chez Danielle, une autre habitante de la localité, dont la maison subit des inondations à répétition. «Les eaux sont montées très rapidement car la rivière a débordé. Nous avons dû nous réfugier à l’étage. Nous n’avons pas pu fermer le portail à cause de la pression de l’eau qui a même brisé une vitre», lâche-t-elle, visiblement excédée. Elle estime qu’il est grand temps pour le gouvernement de trouver une solution pour tous les habitants de Canal Dayot dont les maisons sont submergées lors des averses. «Car même si la situation n’a pas été aussi chaotique qu’en 2013, nous avons subi beaucoup de pertes. Nous devons tout jeter !» Lorsque nous l’avons rencontrée, soit trois jours après le passage du cyclone Belal, les autorités n’avaient pas encore pris contact avec les sinistrés de Canal Dayot. «À ce stade, nous avons seulement consigné une déposition au poste. Une longue procédure nous attend alors que nous avons déjà beaucoup à faire ; tout cela pour obtenir seulement un dédommagement de Rs 500 de la Sécurité sociale. Cela n’en vaut même pas la peine. Nous espérons que le gouvernement nous indemnisera pour tout ce que nous avons perdu, comme en 2013. »

 

Les habitants de Petite-Rivière ont également été fortement impactés par le cyclone Belal, qui a transformé la route principale en rivière. En raison des accumulations d’eau qui ont provoqué l’inondation de sa maison, Jennifer La Rose, qui élève seule ses trois enfants mineurs, dont l’un a été amputé des deux jambes, a dû abandonner sa demeure à Richelieu pour se réfugier chez ses voisins. «À l’approche du cyclone, j’avais pris mes précautions en achetant des provisions mais j’ai été prise au dépourvu. J’ai tout perdu», lâche-t-elle, désespérée. Ceux souhaitant lui venir en aide en lui offrant des vêtements, des draps et de la nourriture peuvent la contacter sur le 5472 0876.

 

Idem pour Véronique Perrine, qui habite la localité depuis 45 ans et dont la maison a été complètement submergée. «Ce n’est pas la première fois que le mauvais temps entraîne des accumulations d’eau, mais ce que nous avons vécu pendant le cyclone a été traumatisant. La situation était bien pire que durant les inondations de 2013. Ti deza ena problem trwa fwa akoz delo monte dan enn kanal, me sakoula kan miray lekol inn kase, tou delo inn vinn dan nou lakaz, inn derasinn nou laport. Zame nou fami inn viv enn zafer parey. Nounn bizin pass par enn lafnet pou kapav sorti akoz presion delo.» Vivant avec ses enfants et ses trois petits-enfants, âgés de 8 ans, 6 ans et 1 an et demi, elle dit avoir impérativement besoin d’une armoire, de matelas, de vêtements, de provisions et de matériel scolaire pour les plus jeunes. «Bann konseye vilaz ti vinn get nou, ti promet nou enn matela, me ziska ler nou ankor pe atann. J’espère vraiment que la population pourra nous venir en aide.» Elle est joignable sur le 5793 0069.

Publicité