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29 mai 2022 19:35
Elles affichent un sourire mais leur coeur saigne. Et même si ce dimanche 29 mai est jour de fête, avec les mères qui sont à l’honneur, il y a, en elles, une part de tristesse. Elles, ce sont ces femmes, ces mamans, qui portent à jamais la douloureuse blessure d’avoir un jour perdu un enfant. Depuis, le temps est passé, elles avancent mais elles n’oublient pas.
L'épreuve de dire adieu à son unique enfant. Varuni Hanoomansing la connaît.Son fils Sanyam Beenessreesingh est décédé alors qu’il se trouvait en Inde, le 12 février 2019, à l'âge de 34 ans, après qu’il est tombé malade. Elle a pleuré, elle a été meurtrie mais elle est, aujourd’hui plus que jamais, convaincue que la mort n’arrête pas l’amour. «J’ai été la maman de Sanyam et je reste sa maman, même s'il n'est plus là physiquement. Je reste une maman. Je suis une maman», lâche Varuni, un sanglot dans la voix, lorsqu’on lui demande comment elle a surmonté la disparition de son fils.
Comme un besoin essentiel pour elle, elle ne rate jamais une occasion de publier un hommage ou une pensée pour son fils sur son profil Facebook. «Je ne veux pas oublier que mon fils a existé. Pour moi, il est toujours là. Ces publications sur ma page Facebook sont le moyen que j’ai trouvé de cultiver son souvenir, de perpétuer sa mémoire, même s’il est constamment dans mes pensées et dans mon cœur. Ces mots et ces photos que je publie m’apaisent et me réconfortent. Certaines personnes ne comprennent pas. Elles me disent de move on... Mais rien ne m’empêche d’avancer, tout en faisant quelque chose qui me fait du bien. À travers ces publications, je ne fais que démontrer que je suis une maman qui aime et qui est fière de son enfant. C’est ma façon de le maintenir en vie. On dit que la parole libère, qu’elle aide, et moi, c’est ce qui m’aide. C’est ma façon de faire. Même si la mort est passée par-là, personne ne pourra m’enlever mon enfant de mon cœur et de ma vie. Qu’on perde un enfant en bas âge ou un adulte, le désarroi est le même pour des parents et surtout pour la maman», nous confie Varuni, en essuyant quelques larmes. «Voir mourir son enfant est la plus grande souffrance qui puisse exister. J’ai l’impression d’avoir perdu un peu de moi-même...»
Le deuil a été un long chemin mais aujourd’hui, Varuni s’accroche à tous ces souvenirs qu’elle a avec Sanyam : «Il y a plein de petites choses laissées par mon fils, un petit mot, une petite attention, sans oublier tout ce qu’on a vécu ensemble, qui me donnent la force de continuer sans lui. Je dis sans lui mais je sais qu’il est toujours là, avec moi. Il m’accompagne. Il veille sur moi. Je suis une maman et je ressens ce genre de choses. Sanyam a toujours été un bon fils pour son père et moi. Il nous a rendus très fiers de lui et pour nous, c’est un très beau cadeau qu’il nous a fait, qu’il nous a laissé : celui d’avoir contribué à faire de lui quelqu’un de bien...»
Et aujourd’hui, jour de la fête des Mères, elle sait que l'émotion va l'envahir mais elle sait aussi que son fils va lui donner le courage de surmonter cela. «C’est difficile. Que ce soit pour la fête des Mères, pour mon anniversaire ou pour le réveillon du 31 décembre, Sanyam était toujours la première personne à me transmettre ses vœux. Aujourd’hui, je n’ai plus ça», laisse échapper Varuni en pleurant, avant de se ressaisir : «Mon fils, une fois adulte, m’a transmis des choses. Il m’a toujours dit qu’il aimait me voir sourire et il me disait : "be strong". Je me dois d’être cette femme forte qu’il voulait que je sois. En ce jour spécial, je pense à toutes ces mamans qui portent cette blessure, qui ont perdu un enfant, à la naissance, en accouchant ou après, dans des circonstances différentes. Dès qu’on commence à porter un enfant, on est déjà sa maman... Donc, mes pensées aujourd’hui vont à toutes les mamans, qu’elles soient heureuses ou tristes. Et je tiens aussi à leur dire qu’un enfant demeure à jamais dans nos cœurs où qu'il soit...»
Natacha Ecroignard, qui a, elle, enterré sa fille Ludivine il y a neuf ans, ne laisse pas non plus passer un jour sans penser à elle. «Avec Ludivine qui aurait eu 19 ans aujourd’hui, j’ai aussi deux autres enfants : Loïc, 21 ans, et Léanne, 18 ans. Mais je dis toujours que j’ai trois enfants. Ludivine n’est plus là mais elle est toujours au cœur de nos vies. Notre Ludivine était spéciale. Elle était atteinte d’hydrocéphalie (l’accumulation de fluides dans le cerveau) et de spina-bifida mais elle nous a apporté tellement de force. On s’est battus pour elle et elle s’est accrochée à la vie», nous déclare Natacha, des larmes dans les yeux.
Pour elle, cette journée spéciale n’est définitivement pas la même depuis que sa fille a quitté ce monde. «Avec mon époux Wesley, on pense à elle forcément. Je ne peux pas oublier qu’elle a fait partie de nos vies. C’est notre petit ange. J’ai mes autres enfants avec moi mais on ressent toujours qu’il y a quelqu’un qui manque à l’appel», dit Natacha qui se réconforte en regardant ses deux autres enfants. «Une maman n’est plus la même quand elle a perdu un enfant. Quand on porte un enfant, on est à jamais lié à lui et cette séparation par la mort est difficile. Quand je passe devant le cimetière en allant au boulot, je ne peux pas ne pas tourner la tête. Je sais que ce n’est qu’une tombe mais ça me rappelle tout ce qu’on a vécu. Je sais et je vois que Ludivine vit à travers son frère et plus particulièrement sa petite sœur», conclut cette maman dont le cœur bat tous les jours pour ses enfants, tous ses enfants, qu’ils soient toujours de ce monde... ou pas.
En ce dimanche spécial, il y a aussi de nombreuses personnes qui auront le cœur lourd en pensant à leur maman qui ne fait plus partie de ce monde. Adam Ramsahye, son frère Adil et sa sœur Sarah en font partie. Le 18 mai 2015, ils ont perdu leur mère Lynsie. «Depuis, la fête des Mères a pris une nouvelle forme pour nous car notre maman a quitté physiquement ce monde. C'est une souffrance indescriptible qui s'apprivoise et qui s'atténue grâce à l'amour sincère de notre entourage mais aussi grâce à l'amour du défunt, d'où l'importance de toujours savoir marquer les occasions car ce sont des réserves émotionnelles dans des moments pénibles», confie Adam qui sait que sa maman sera toujours là pour son frère, sa sœur et lui.
«Je crois fermement en la puissance de l'âme. Le départ physique d'un être cher n'entraîne pas la disparition entière de la personne car c'est l'esprit qui vivifie, la chair ne sert à rien. Basé dessus, nous avons donné une nouvelle forme à notre relation. Je sens ma mère toujours proche de moi à travers ses enseignements, ses valeurs, elle vit à travers toutes les personnes qu'elle a côtoyées car la mort ne dure qu'un instant mais l'amour est éternel. Si la vie peut être comparée à une course de relais, je considère que ma maman a honorablement passé le témoin et qu'il est de notre devoir de courir deux fois plus pour lui rendre le plus bel hommage. Et cela passe par la célébration de la vie à chaque instant car il y a une certitude pour moi : si l'âme de ma mère veille sur nous, elle serait bien plus heureuse de nous voir joyeux plutôt que de constamment nous lamenter sur une situation inévitable.»
Adam, Adil et Sarah penseront un peu plus fort aujourd'hui à leur mère que les autres jours. «Je pense que ce qui nous permet de trouver la force d'avancer vient d'une volonté de vivre sans regrets, de son vivant ; nous lui avons tout dit, merci, je t'aime, pardon, de simples paroles que nous n'exprimons pas assez par fierté mais elles sont essentielles pour avancer sereinement», conclut Adam, le cœur chargé d'émotion...
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