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3 mai 2020 19:53
Chaque matin, quand Zafirah Luckhun Somauroo quitte sa maison pour se rendre au travail, c’est la même pensée qui l’habite. «Oui, il y a la peur que je ramène le virus à la maison car je suis en contact direct avec ceux qui sont potentiellement infectés mais j’ai choisi d’être infirmière. J’aime mon métier. Je ne vais pas travailler par obligation.»
Infirmière à l’hôpital Jeetoo depuis 17 ans, cette maman de trois enfants – Firdaus, 14 ans, Asmaa, 12 ans, et Abdullah, 2 ans – a été récemment transférée au centre de vaccination Vaxigrip. Du coup, Zafirah emploie les grands moyens. Une fois chez elle, c’est tout un processus. «Je me douche à l’extérieur. Je lave mon uniforme, mes chaussures et mon sac. Je désinfecte mes clés et mon portable avec de l’alcool. Quand je rentre, je reprends une douche, je me gargarise la bouche avec de l’eau salée.»
Être au front, comme l’impose son métier, implique aussi de mettre une certaine distance physique entre ses proches et elle. «Mon petit reste chez ma mère et ce n’est que tard dans la soirée que je vais le chercher. Et des fois, je le laisse dormir là-bas. C’est dur mais c’est nécessaire.»
Malgré tout, son travail, elle l’exerce avec amour et conviction. C’est un engagement qui fait partie intégrante de sa vie même si des fois elle a du mal à comprendre certains comportements. «Souvent, quand je me rends au travail, je vois des gens qui s’attroupent pour bavarder, sans masque, sans distance. C’est chagrinant.»
Pour s’occuper de ses trois enfants, Zafirah peut compter sur le soutien de son époux et de ses parents, qui sont tous très fiers de son engagement. «Ils m’encouragent beaucoup et me disent souvent qu’ils sont fiers de moi.» Pour elle, c’est l’une des plus belles récompenses.
Chaque année, Pâques est un grand moment chez les Pouronne. Cette fois, c’est confinés chez eux qu’ils ont fêté. Une célébration dans la simplicité dont Natacha Pouronne, employée dans un supermarché des Plaines-Wilhems, et les siens ont saisi toute l’importance. «Au début, les enfants n’ont pas trop compris mais on leur a expliqué et désormais, ils sont conscients de ce qui se passe.»
Tous les jours, après une dure journée de travail où elle est au plus près des Mauriciens, cette mère de trois enfants – Jeremy, 14 ans, Mathieu, 12 ans, et Nigel, 9 ans – rentre chez elle retrouver sa famille. La fatigue est là. La peur de contaminer ses proches aussi. Chaque soir, c’est la même routine. «Je vais directement me doucher avant d’aller voir les enfants. Je suis très vigilante car j’ai déjà un problème de santé.»
C’est alors une autre paire de manche. Entre les devoirs à gérer, le repas à préparer, le ménage à faire, les journées sont souvent interminables. Heureusement, elle peut compter sur l’aide de son mari. Chez eux, le dialogue est important. «Ils sont des enfants et ils n’ont pas forcément toujours conscience de ce qui se passe.» Ces moments familiaux sont des trésors que la mère de famille chérit encore plus aujourd’hui.
Ces dernières semaines, les journées sont interminables. Au bout de sa garde de 24 heures à l’hôpital Jeetoo, le Dr Vurnah Paupamah, maman de Noah, 4 ans, et de Nessa, 15 mois, ressent tout le poids de cette fatigue. C’est dans son département que tous les patients présentant des symptômes du Covid-19 sont admis avant d’être acheminés vers les centres de soins spécialisés s’ils sont testés positifs. Alors oui, malgré toutes les précautions, la peur de ramener ce virus à la maison est là. Cependant, pas question de laisser la frayeur prendre le dessus.
Il faut être fort physiquement et psychologiquement. «Je compte sur la grâce de Dieu. Heureusement, tout va bien jusqu’ici. Je fais tout pour protéger ma famille. Je me dis que je ne dois pas paniquer. J’ai l’obligation de garder le moral pour soigner les malades et préserver les miens.»
Alors, elle se rend après chaque tour de garde directement chez ses parents pour essayer de récupérer. «J’ai essayé de ne pas rentrer à la maison pendant une semaine mais les enfants, qui sont encore petits, ne comprennent pas. Ils ont besoin de leur maman.» Alors, elle essaie de prendre le maximum de force avant de rentrer. «Une fois à la maison, c’est reparti pour un autre tour de garde (rires). Les enfants sont pleins d’énergie. Il faut s’occuper d’eux, de la maison. Ce n’est pas facile mais je peux heureusement compter sur mon époux qui m’accorde tout son soutien.»
Jongler entre le travail et la vie de famille en ces temps de crise est compliqué. Le rythme est souvent éreintant mais le Dr Vurnah Paupamah ne se démonte pas. «Mon aîné pose toujours les mêmes questions. ‘‘Maman, tu vas rester avec nous ?’’, ‘‘Maman, tu vas travailler aujourd’hui ?’’ C’est difficile pour eux de ne pas avoir leur maman. Pour nous aussi, les frontliners, ce n’est pas facile. La famille nous manque.»
En attendant des jours meilleurs, le Dr Vurnah Paupamah s’accroche à l’amour de sa famille.
Il y a quelques jours, elle a effectué le test PCR. Lorsque celui-ci s’est révélé négatif, elle a senti la boule qu’elle avait au ventre s’évaporer. Sa première pensée a été pour son fils Ethan, 12 ans, et Eva, sa fille de 7 ans. «Je suis soulagée et encore plus déterminée à poursuivre mon travail avec ferveur.»
En effet, une fois qu’elle a enfilé son uniforme et son masque, Wendy Wong, affectée au poste de police de Beau-Bassin, met ses angoisses de côté. «C’est mon devoir. Je suis très fière de porter l’uniforme et de savoir qu’en tant que femmes et mamans, nous avons notre place et notre rôle à jouer.» À la maison, la vigilance est toujours de mise. «Les vêtements vont directement dans la machine à laver. Je nettoie aussi mon name plate. Il y a également aussi le grand ménage que je fais deux fois la semaine.»
Face au Covid-19, Wendy a dû revoir l’organisation familiale. «J’ai de la chance d’avoir des parents formidables et les enfants habitent avec eux depuis l’annonce de ce virus. J’évite les câlins et on se parle à plus d’un mètre ou sur WhatsApp pour les protéger au maximum, surtout qu’ils souffrent d’asthme.» Chaque soir, elle prépare le repas que son époux va déposer. Et même si en ce moment, elle ne peut pas les aider personnellement avec les devoirs, Wendy veille au grain. «Il y a le téléphone et ça se passe aussi par la fenêtre (rires). Je fais attention à ce qu’ils ne se couchent pas tard et qu’ils gardent les bonnes habitudes.»
Avec ses enfants, les conversations tournent souvent autour du travail de maman. Voir la fierté dans leurs yeux est ce qui lui donne, dit-elle, la force de continuer.
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