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7 mars 2022 14:40
C'est de la Pologne, où il se trouvait toujours au vendredi 4 mars, que le jeune Mauricien Comal Luchan nous raconte sa pénible expérience. Au moment de l'interview, il préparait son retour imminent au pays. Il revient sur l'expérience pénible qu'il a vécue. «Après avoir quitté l'Ukraine, je suis arrivé dans un camp de réfugiés en Pologne. À 60 km de la frontière allemande, près de Berlin. J'ai voyagé pendant trois jours. J'ai passé 24 heures entières dans un minibus, la plupart du temps coincé dans les embouteillages à cause des contrôles de police obligatoires. J'ai passé deux jours dehors. Nous faisions la queue près des frontières, dans le froid glacial. Il y avait des problèmes avec l'armée. Tout ce que vous avez entendu, le racisme, les passages à tabac, entre autres, c'est vrai ! Pendant trois jours, je n'ai pu dormir. À la frontière, il n'y avait pas assez de lits. Peut-être parce qu'ils ont pris des dispositions pour 30 à 50 personnes, alors qu'il y avait des gens alignés par milliers. Je devais gérer la batterie de mon téléphone et l'utiliser pour les choses les plus importantes, comme contacter l'ambassade et mes parents. J'ai réussi à maintenir la communication pendant trois jours, avec une seule charge de téléphone, et j'utilisais mon ordinateur portable pour recharger mon téléphone. Jusqu'à présent (jeudi), je n'ai toujours pas pris de douche. Il y a des douches ici dans le camp de réfugiés. Mais elles ont été rapidement mises hors d'usage. Au camp de réfugiés, nous avons reçu de la nourriture et les premiers soins. C'est la première fois que je suis détendu après tout ce qui s'est passé. Demain (vendredi), je serai dans la capitale, Warsar. C'était réconfortant de savoir qu'il y avait des personnes qui me soutenaient. M. Jankee de l'ambassade de Maurice à Moscou, Mme Christelle de l'ambassade de Maurice en Allemagne, Dr Kureemun, haut consule d'Ukraine à Maurice, Mme Emma (étrangère) de l'immigration polonaise, ont tous gardé un contact très étroit avec moi afin de me guider de la meilleure façon possible. J'étais censé être pris en charge par un Mauricien à la frontière polonaise et je devais rester un peu avec lui mais il y a eu des changements dans mon plan.»
«Je m'appelle Anton Kryuchkov. Je suis un citoyen ukrainien. Je suis né à Gorlovka le 23 février 1996. J'ai vécu dans la ville de Marioupol. Le 24 février, à 4 heures, tout comme l'Allemagne en 1941, des envahisseurs ennemis de Russie ont tiré sur mon pays, ma ville, la capitale de mon pays. Il y a une vraie guerre. Des civils et des enfants meurent. Le mardi 1er mars, ils ont bombardé plusieurs nouveau-nés dans une maternité. Depuis le début de la guerre, je ne dors pratiquement plus, ma matinée commence par un message à ma mère : "Maman, tu es vivante ? Tu vas bien ?" Si elle ne me répond pas tout de suite, je m'inquiète... Mon père se bat pour l'armée ukrainienne depuis déjà trois ans. Dans notre pays, la guerre a commencé en 2014. Pendant tout ce temps, c'était une guerre hybride. La Russie s'est saisie de notre territoire et maintenant, elle a commencé une guerre avec tout le pays. À titre d'information, le territoire de l'Ukraine est deux fois plus grand que la France. J'ai décidé de retourner en Ukraine pour aider mes parents, amis, collègues et citoyens ordinaires. Il faut arrêter la Russie. Maintenant, ma mère est assise dans son appartement et regarde une bataille de chars à travers la fenêtre. Dans une ville où vivent 700 000 personnes, il y a une bataille de chars ! Je ne peux pas rester assis ici et regarder mon pays se noyer dans le sang.
Putin is the Hitler of the present 21st century. Je lance un appel à tous les citoyens mauriciens ; vous êtes un peuple merveilleux, fort et très sympathique, qui a connu de nombreux troubles au cours de sa riche histoire. S'il vous plaît, faites attention aux problèmes de l'Ukraine. La Russie veut nous transformer en esclaves du régime de Poutine. Je suis reconnaissant à tous ceux qui m'ont aidé, qui ont acheté des médicaments et de la nourriture pour bébé. Je vais certainement le transmettre à notre armée. Je me mets à genoux et je vous remercie. Toute l'Ukraine vous est reconnaissante. Nous sommes maintenant au bord de la Troisième Guerre mondiale et c'est l'Ukraine qui essaie de protéger le monde entier du tyran Poutine. Gloire à l'Ukraine !»
«Comme j'habite en Pologne qui partage une frontière avec l'Ukraine, et comme les réfugiés passent par la Pologne, j'ai voulu passer un message au cas où il y avait une personne ou une compatriote qui avait besoin d'aide. Ma maison est en construction et les travaux sont en phase d'être terminés. La cuisine n'est pas complétée et c'est dans le sillage d'accueillir quelqu'un que j'ai acheté tout récemment une cuisine temporaire pour dépanner. Maintenant, je vais voir si on fait appel à moi. Bien évidemment, je suis aussi prêt à accueillir d'autres personnes d'autres nationalités, si jamais je n'ai pas de Mauriciens qui se tournent vers moi. C'est important pour moi de proposer mon aide car je suis touché par la situation et de voir des familles entières en difficulté. Nous sommes une petite communauté de Mauriciens en Pologne et je me suis dit que si je peux aider, pourquoi pas !
C'est réconfortant de voir qu'il y a actuellement un grand élan de solidarité en Pologne. Les Polonais se rendent à la frontière pour accueillir les réfugiés avec de la nourriture et des boissons chaudes, alors que d'autres se proposent d'accueillir des gens chez eux. Ils ont connu la guerre dans le passé et ils connaissent cette réalité. Mon épouse est Polonaise et elle me racontait que le pays a été au coeur des guerres mondiales dans le passé et que les habitants connaissent cette souffrance. C'est pour cela que beaucoup de personnes répondent présents pour venir en aide à ceux qui en ont besoin. En ce moment, on voit beaucoup d'Ukrainiens en Pologne. Ça fend le coeur de voir ces familles en détresse qui ont dû fuir leur pays. J'ai souvent vu des mamans avec leurs jeunes enfants sans leur époux. C'est vraiment réconfortant de voir cet élan de solidarité. De nombreux Polonais se sont mobilisés. Je suis en Pologne depuis huit ans et j'habite en Krakovie. C'est un peuple très accueillant. Le message le plus important à passer, c'est que je suis disposé à accueillir des Mauriciens qui passeront la frontière et qui ont besoin d'un logement. Mais si jamais nos compatriotes arrivent à s'en sortir et ne font pas appel à moi, je suis aussi disposé à accueillir d'autres nationalités qui passent actuellement par des moments difficiles.»
«Il y a une possibilité que je me rende en Ukraine. Je suis en attente des termes de mon contrat. C'est à partir de là que je vais prendre ma décision. Cette démarche concerne tous ceux qui ont une formation militaire ou en sécurité, en extraction et autres, ce que j'ai. C'est pour protéger les civils mais aussi pour protéger les convois. Ça n'a rien à voir avec les soldats qui sont au front. Si j'y vais, je n'irai pas pour me battre pour l'Ukraine ou encore pour la Russie, loin de là. Si je me décide à partir, je serai impliqué dans la protection des civils, les sécuriser et les évacuer d'endroits à risques ou encore pour faire des extractions pour des personnes qui se retrouvent prises dans des pièges...»
➢ Le PM, Pravind Jugnauth : «Cette guerre aura un impact sur notre économie mais ma préoccupation, c'est faire face à ces défis.»
➢ Alan Ganoo, ministre des Affaires étrangères : «On a mis en place une cellule d'aide pour assister les Mauriciens qui sont en Ukraine.»
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