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Iframac : en panne sèche

8 septembre 2015

Ashok Subron, syndicaliste, et des employés après une réunion avec les autorités.

Mélodie erratique. Notes dissonantes. La partition de New Iframac Motors Ltd (NIM) a des ratés. Et ce n’est pas la seule dans la symphonie de la chute de la BAI. Cacophonie politique oblige. Néanmoins, ces derniers jours, c’est l’enseigne – qui distribuait jusqu’à il y a quelques semaines la marque Mercedes, par exemple – qui a enchaîné les tempos incompatibles. D’abord, il y a eu, lors de la séance parlementaire du mardi 1er septembre, une envolée positive : Roshi Badhain, ministre des Services financiers, de la bonne gouvernance et des réformes institutionnelles, a annoncé, suite à la Private Notice Question (PNQ) de Paul Bérenger, que les discussions avec FleetAfrica pour la reprise d’Iframac étaient avancées et qu’E.A.L. Man Hin était également dans la course. Puis, au fil des jours, la tonalité a pris un tour plus sombre. Ces deux entreprises se sont désistées. Quelles seront les prochaines gammes de NIM qui seront jouées par le gouvernement ?

 

Pourtant, tout semblait aller selon le souhait du gouvernement. Les représentants de FleetAfrica étaient arrivés à Maurice en début de semaine, les discussions pour la reprise de NIM étaient bien entamées. Néanmoins, les négociations n’ont pas abouti. Yacoob Ramtoolah, le nouvellement nommé administrateur spécial de la BAI, a précisé que les conditions imposées par le consortium sud-africain auraient été trop contraignantes et problématiques. Il restait donc E.A.L. Man Hin, le concessionnaire de la marque Honda. Un nouveau pion à avancer dans le jeu gouvernemental. Mais la partie a été perdue.

 

Les déclarations assurées et rassurantes de Roshi Badhain concernant le partenariat entre E.A.L. Man Hin, NIM et le gouvernement (qui serait un actionnaire minoritaire dans ce deal, alors que les deux autres se partageraient 80 % des actions restantes), étaient de bon augure. Il annonçait même que l’accord serait finalisé en fin de semaine, soit le jeudi 3 septembre ou le vendredi 4 septembre, selon les renseignements obtenus auprès de la Financial Services Commission. Cependant, la situation a pris une direction moins «joyeuse» en fin de semaine, quand les gérants d’E.A.L. Man Hin ont annoncé, par le biais d’un communiqué, qu’ils se retiraient de la course. Plus de négociations, plus d’accord. «Peu importe la formule qui sera trouvée, nous avons cessé les négociations, vu qu’E.A.L. Man Hin a demandé un temps de réflexion», a annoncé Yacoob Ramtoola.

 

Retour à la case départ, mais pas à celle du silence. Car NIM, pour sa survie, doit absolument trouver un nouveau partenaire ou une nouvelle façon d’opérer. Pour Ashok Subron, représentant des employés de NIM, la solution de l’autogestion serait la plus appropriée. D’ailleurs, la majorité des employés de cette ancienne filiale de la BAI ont exprimé le souhait que ce soit le cas. Néanmoins, le syndicaliste précise que c’est au gouvernement de prendre une telle décision : «Nous privilégions les discussions avec l’État et le ministre Roshi Badhain. Nous faisons un appel à Vishnu Lutchmeenaraidoo pour qu’il rejoigne les négociations et qu’il fasse confiance aux employés. Il ne cesse de dire que les Mauriciens doivent croire en leur pays.»

 

Mais sans marque, que ferait cette entreprise ? IMC s’est déclarée comme repreneur de Mercedes. Axess a fait part de la reprise de Peugeot. Leal celle de Mitsubishi et ABC Motors aurait récupéré Chrysler, Dodge et Jeep. Pour certains employés, qui ne veulent pas parler ouvertement pour l’instant, il serait plus intéressant que l’État s’engage à trouver de nouvelles marques ou à faire revenir les anciennes. Ils sont dans le flou depuis plusieurs mois, et la tension et l’incertitude font partie de leur quotidien. Qui garantira leur emploi en cas d’autogestion ? C’est la question qui est sur de nombreuses lèvres. «Je crois que le gouvernement doit s’associer avec nous. Ensemble, nous nous en sortirons», confie un des employés de NIM, qui a voté pour l’autogestion et qui avoue être dépassé par les récents événements.

 

Les prochaines notes de la mélodie erratique de NIM seront-elles plutôt joyeuses ou sombres ? Pour l’instant, les employés
de cette structure ne le savent pas. Le gouvernement, non plus, visiblement.

 


 

Mais aussi…

 

● Les emplois perdus. Lors de la réponse à la PNQ de Paul Bérenger, Roshi Badhain a confié que 101 personnes ont été limogées depuis l’éclatement de l’affaire BAI. Les licenciements ont eu lieu à la GRNW Boatyard, Publico Ltd, Yukondale et Le Voyageur Travel Tour. Mais pas à BA Insurance ou à Iframac. A Apollo, des membres du top management ont été priés de partir. Dans sa liste de personnes licenciées, il semble que les filles Rawat et leur époux ne sont pas inclus.

 

● Du côté d’Apollo Bramwell. Il a été décidé, cette semaine, qu’un Management Steering Committee sera institué afin de gérer l’hôpital en attendant qu’une décision soit prise pour le transformer en hôpital universitaire ou qu’il entre en partenariat avec Apollo India. Néanmoins, le porte-parole de la CTSP, représentant des travailleurs, estime que l’établissement hospitalier ne peut se transformer en clinique privée : «Ce n’est pas normal de prendre l’argent des contribuables pour acheter cet hôpital et ensuite demander aux contribuables de payer pour bénéficier des services de ce même hôpital», a déclaré Reaz Chuttoo. L’hôpital affiche, pour l’instant, un déficit de Rs 440 millions.

 

● Courts devient Mammouth. Ce changement aura lieu le 10 septembre. Sur le plan humain, ce sont 185 personnes qui seront mises à la porte : les 20 % qui devaient être licenciés. Et les syndicalistes se mobilisent pour qu’elles aient une compensation qui ne se résume pas à 15 jours par année de service.

 


 

Paul Bérenger, pessimiste

 

Comme pour ne pas changer. Comme quand il n’y a pas de koz koze. Le leader du MMM a animé une conférence de presse, cette semaine, pour faire le point sur l’affaire BAI suite à sa PNQ. Paul Bérenger, en se basant sur le rapport final de PricewaterhouseCoopers concernant l’ex-empire de la famille Rawat (déposé au Parlement par Roshi Badhain), a constaté qu’il y aurait une somme manquante de Rs 13,6 milliards après que les avoirs de la BAI ont été liquidés : «Ce sont les contribuables qui devront payer. À partir de 2016, le gouvernement devra trouver Rs 3 milliards chaque année en raison de ces debentures.» Il estime que Vishnu Lutchmeenaraidoo et Roshi Badhain «mènent le pays et les salariés vers des situations dramatiques».

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