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Incidents impliquant les ministres Hurreeram et Toussaint : le «fighting mood» des habitants de Plaine-Magnien

10 avril 2022

Pour Nazim Gurib et son équipe, ils n'ont rien fait de mal.

Ils ne baisseront pas les bras. Malgré les accusations, les critiques et les menaces, Nazim Gurib et Vashil Jasray, respectivement président et conseiller du village de Plaine-Magnien, ainsi que Zaick Nadal, conseiller du district de Grand-Port, sont déterminés à «dibout» pour leur village et les habitants. Deux jours après les incidents survenus à Plaine-Magnien lors d’une réunion au Citizen’s Advice Bureau (CAB) en présence de deux ministres et de députés de la circonscription no 12, ils se sont exprimés pour la première fois face à la presse, le vendredi 8 avril, afin de donner leur version des faits.

 

Rappelons que Bobby Hurreeram, ministre des Infrastructures publiques, et Stephan Toussaint, ministre de la Jeunesse et des sports, ont présidé une réunion dans l’endroit ce jour-là pour parler des inondations survenues lors des dernières grosses pluies, affectant de nombreux villageois. Sauf que le président du village n’avait pas été mis au courant de cette rencontre. Avec ses deux conseillers et d'autres habitants, Nazim Gurib s’est donc rendu sur place pour, dit-il, s’entretenir avec les ministres et leur exposer le problème. «Il y a de l’eau dans les maisons, sur les routes, sur le chemin qui mène à l’aéroport. Les familles souffrent. Il y a un vrai danger pour nos automobilistes. L’eau a tout envahi depuis la construction de l’Industrial Park de la SME sur un terrain marécageux. Voilà de quoi nous voulions leur parler.»

 

Sur place, l’accès à la réunion leur est interdit, suscitant indignation et colère. «Comment se fait-il qu’une réunion sur les inondations dans le village se fasse sans ses représentants mais avec des agents du MSM ?» Les esprits se sont alors échauffés, nécessitant l’intervention de la police qui a escorté les ministres vers la sortie. Ces derniers ont grimpé dans leur véhicule, ignorant les insultes des habitants, et ont quitté les lieux dans une ambiance de forte tension.

 

Pour se défendre, Bobby Hurreeram a taxé ceux qui étaient présents à ce moment-là de «personnes ayant des agendas politiques qui veulent se donner en spectacle». La réplique de Nazim Gurib n’a pas tardé : «Nous avons été élus sous la bannière Mouvement Jeunesse de Plaine-Magnien. Venir dire que nous avons un agenda politique est un mensonge.»

 

Plainte à la police

 

Le ministre a surenchéri lors de la conférence de presse du gouvernement le samedi 9 avril. Bobby Hurreeram est revenu sur cet épisode, critiquant une fois de plus Nazim Gurib et les habitants présents ce jour-là. «Ce n’était pas une réunion pour les membres du public. Il y avait quelques personnes avec un agenda politique. Elles sont venues faire du cinéma. Elles ont agressé verbalement un de mes officiers et c’est inconcevable.» Face aux critiques qui pleuvent après la tenue de cette réunion au CAB, alors que celui-ci est supposé être fermé à cause des restrictions sanitaires, il a expliqué qu’il n’y avait pas de meilleur endroit pour rencontrer les officiers. «Je devais voir la police, les pompiers, SMF, LDA, RDA. C’était plus facile de les rencontrer au CAB. Il y avait moins de 50 personnes.» Lors d’une fonction, le ministre Toussaint, lui, a esquivé les questions de la presse, prétextant que ce n’était pas le sujet du jour.

 

Pour sa part, Vishal Jasray explique que lui et les autres n’avaient à aucun moment l’intention de faire du grabuge. «Nous sommes partis dans l’objectif de parler aux ministres afin de leur exposer le problème. On avait trois questions : pourquoi interdire l’accès de la réunion au président du village ? Comment le SME Park a-t-il obtenu un EIA ? Et s’il a eu l’autorisation de construire, comment nos députés ont-ils pu le laisser faire sur un terrain marécageux ? Nous ne sommes pas allés nous bagarrer.» Les villageois ont exprimé leur colère, dit-il, lorsque les ministres ont refusé de les écouter.

 

C’est la première fois que les villageois se retrouvent dans une pareille situation, souligne Nazim Gurib. «Il n’y a jamais eu d’inondations à Plaine-Magnien avant. Tout le monde sait qu’il y a un marécage derrière le terrain de foot et c’est là que le gouvernement construit. Toute l’eau de pluie est refoulée et se déverse dans le village.» Entre-temps, un stop order a été émis par le Conseil de district de Grand-Port après que des anomalies ont été trouvées dans le plan de la DBM, le promoteur du SME Park.

 

Depuis ces événements, l’affaire a pris une autre tournure avec une plainte du CAB Organizer concernant les incidents du mercredi 6 avril. Nazim Gurib s’est, lui aussi, rendu à police pour consigner une precautionary measure par crainte de représailles. Il dit avoir reçu des menaces le faisant craindre pour sa sécurité, celle de ses proches et de ses collègues. Malgré tout, son équipe et lui ne lâchent rien. «En tant que président du village depuis 2012, je ne peux pas laisser les habitants à terre. Ils ont placé leur confiance en moi à deux reprises. Il y a pas mal de pression sur nous. Nous avons reçu des menaces mais nous allons persévérer pour notre endroit, pour nos villageois qui souffrent.»

 

Depuis une semaine, il dit faire face au désarroi des familles victimes des inondations. «Les ministres n’ont jamais travaillé en collaboration avec nous. Leur façon de faire est injuste et discriminatoire. Notre budget a été réduit. Il y a zéro développement dans le village. Cinq camions poubelles sont actuellement en panne. Quand vous dites la vérité, vous êtes celui qui est en tort, vous êtes de trop.» S’il ne recule pas, confie Nazim Gurib, c’est parce qu’il est pleinement conscient de ses responsabilités et de la confiance qui a été placée en lui. «Je me bats pour nos droits. J’ai pris un engagement et je me tiens debout comme un combattant. Je ne crois pas que nous avons tort de poser des questions.»

 

Face à la possibilité d’une interpellation dans le cadre de la plainte déposée, lui et Vishal Jasray disent rester sereins. «Nous sommes cool car nous savons que nous n’avons rien fait de mal. Et les villageois sont derrière nous.»

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