L’agroécologie vue par l’agronome Isseyen Sannassy

Votre guide dans l’agroécologie ?

Un des pionniers de l’agroécologie, Pierre Rabhi, est une source d’inspiration pour un grand nombre. Il est aussi le fondateur du mouvement Colibris, qui a grandement aidé à créer une société écologique et solidaire, et de Terre et Humanisme, un réseau de soutien à une agriculture durable. Voici quelques idées présentées par Pierre Rabhi1 : «L’agroécologie est une technique inspirée des lois de la nature. Elle considère que la pratique agricole ne doit pas se cantonner à une technique, mais envisager l’ensemble du milieu dans lequel elle s’inscrit avec une véritable écologie. Elle intègre la dimension de la gestion de l’eau, du reboisement, de la lutte contre l’érosion, de la biodiversité, du réchauffement climatique, du système économique et social, de la relation de l’humain avec son environnement. La pratique agroécologique a le pouvoir de fertiliser à nouveau les sols, de lutter contre la désertification, de préserver la biodiversité, d’optimiser l’usage de l’eau. Elle est une alternative peu coûteuse et adaptée aux populations les plus démunies. Par la revalorisation des ressources naturelles et locales, elle libère le paysan de la dépendance des intrants chimiques et des transports générateurs de tant de pollutions et responsables d’une véritable chorégraphie de l’absurde, où des denrées anonymes parcourent chaque jour des milliers de kilomètres plutôt que d’être produites à l’endroit de leur consommation. Enfin, elle permet de produire une alimentation de qualité, garante de bonne santé pour la terre et pour ses enfants.»

Un mode de vie

Il est important de nous recentrer sur nous-mêmes, de territorialiser notre alimentation, de favoriser les circuits courts, finalement de consommer le plus local possible avec des produits de saison. «C’est un ensemble d’actions individuelles qui permettront de faire avancer la transition écologique. Chacun, à son propre niveau, peut contribuer. D’ailleurs, Formaterra, l’établissement public de formation en agriculture de la Réunion, partenaire de l’Académie du Vélo Vert, explique dans ses livrets "Jardiner avec la Nature"2 que chacun peut contribuer à son niveau en commençant par le jardinage», explique Isseyen Sannassy. Chez Formaterra souligne l’agronome, il ressort que : «Le jardin est le lieu idéal pour commencer cette transition écologique, pour échanger entre jardiniers sur des pratiques moins consommatrices d’intrants, pour valoriser les déchets organiques en compost pouvant fertiliser la terre, pour protéger la biodiversité animale et végétale si indispensable aux équilibres de la vie, pour se réaliser dans un projet concret pour une alimentation saine, locale et durable.»

Jardin Créole traditionnel

Formaterra présente également dans ses livrets différentes techniques pour jardiner naturellement. Ils présentent entre autres le système du Jardin Créole3. «La biodiversité du jardin créole traditionnel est connue pour son mélange de plantes ornementales fleuries aux côtés de plantes médicinales utilisées pour leurs vertus non loin des plantes légumières et des arbres fruitiers. Ce savant mélange apporte des bénéfices mutualisés qui permettent au sol de s’enrichir en nutriments, aux auxiliaires insectes utiles de trouver un logis et de la nourriture et une protection face aux bioagresseurs», peut-on lire dans le livret «Jardiner avec la Nature».

Jardin forêt (Agroforesterie) : Pourquoi planter des arbres?

Comme expliqué dans le «Guide Pratique de l’Agroécologie» rédigé par le GRET4, association de solidarité internationale pour le développement durable, l’arbre est un élément clé en agriculture et en jardinage. Parmi les avantages de planter des arbres, le Guide pratique cite :

– un arbre apporte de la matière organique via la chute des feuilles. Les organismes vivants dans le sol dégradent cette matière organique qui est alors disponible pour nourrir les cultures.

– il freine la vitesse d’écoulement de l’eau et favorise son infiltration dans le sol jusqu’aux racines des cultures.

– il récupère ce qui s’est infiltré en profondeur et que les cultures ne peuvent plus atteindre, grâce à ses profondes racines.

– ses racines stabilisent le sol.

– De plus, l’arbre apporte de l’ombre aux cultures qui en ont besoin. Il produit du bois, parfois du fourrage, des fruits, ou des ingrédients pour la médecine traditionnelle.

– il peut également servir de refuge pour le gibier et les insectes.

L’Association Française d’Agroforesterie5 promeut également les systèmes forestiers. «Les jardins forêts se basent sur la succession écologique et intègrent donc un processus d’évolution du milieu naturel au cours du temps. Le principe des forêts nourricières est de se baser sur l’avenir forestier du sol pour mimer la dynamique d’un jeune boisement naturel. Ces forêts comestibles sont constituées principalement de plantes pérennes, choisies pour leurs intérêts nourriciers, médicinaux, matériels et énergétiques. Les jardins forêts sont des écosystèmes productifs qui se déploient dans un espace constitué de différentes strates (rase, basse, moyenne, haute, émergente, lianes) : la productivité de ces systèmes agroforestiers est optimisée par une densification des plantations et une diversification des cultures», précise-t-elle.

Voici quelques idées de plants à cultiver dans votre jardin pour créer votre propre jardin forêt. Pour des arbres fruitiers simples, Isseyen Sannassy propose des bananiers et papayers, alors que pour des arbres fruitiers de grande taille, vous pouvez opter pour des manguiers, avocatiers, jamalac, longanes, fruits à pain et bibasses. Pour des arbres de plus petites tailles à placer entre ceux cités précédemment, il peut y avoir du manioc, des caféiers, des cacaoyers, des embrevades, des moringa.

Enfin, pour la strate de plantes la plus basse, vous pouvez cultiver des patates douces, des ananas, du gingembre, du curcuma, des songes, de la citronnelle, du maïs, etc. L’agronome recommande d’agrémenter ce système avec de la citronnelle, des grenadines et de la vanille qui peut pousser sur les arbres. Et dans l’idéal, pensez à ajouter des espèces endémiques.

Références de l’agronome pour ses conseils

1. Pierre Rabhi : https://www.pierrerabhi.org/lagro%C3%A9cologie-en-bref-sous-agro%C3%A9cologie

2 et 3. Formaterra – Jardiner avec la nature : https://formaterra.re/wp-content/uploads/2023/11/LivretGuideDuJardin-vol3_13-12-2022_WEB3-rvb-1.pdf

4. Guide Pratique de l’Agroécologie rédigé par le GRET : https://gret.org/wp-content/uploads/2021/12/guide-pratique-agroecologie_pdf.pdf

5. Association Française d’Agroforesterie : https://fr.linkedin.com/posts/association-francaise-d-agroforesterie_jardinfor%C3%AAt-agroforesterie-for%C3%AAtnourrici%C3%A8re-activity-7030513598493786112-rE8e?trk=public_profile_like_view