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L’ambition de Xavier-Luc Duval

27 juillet 2015

Xavier Luc Duval prendrait-il goût au poste de Premier ministre ?

Avec l’Alliance Lepep, tout devient possible. Ces dernières semaines, la formule du célèbre jeu de hasard pourrait parfaitement correspondre au gouvernement. Les frontières de l’impensable sont abattues. Celles du pensable, redéfinies. Alors, dans ce tumulte de redéfinition à l’extrême, chacun peut tenter de changer sa réalité. Le pouvoir donne des ailes et des ambitions. Et Xavier-Luc Duval tenterait de surfer sur cette vague, le bec en avant. Et s’il prenait la tête de la basse-cour et faisait taire les caquètements de désapprobation ? Et s’il tentait de s’offrir la place en haut du poulailler sans y perdre ses plumes ? Un scénario que craignent des membres du parti majoritaire de cette alliance.

 

Depuis que Pravind Jugnauth a été reconnu coupable de conflit d’intérêts dans l’affaire Medpoint, ses chances de reprendre la place de son père au poste de Premier ministre sont sérieusement compromises pour ce mandat. Ce qui laisse la porte grande ouverte aux autres. Qui sont ces autres ? Certains membres du MSM, bien sûr, comme Showkutally Soodhun. Mais aussi le numéro deux du gouvernement (du moins, il l’espérerait), Xavier-Luc Duval, actuellement Premier ministre par intérim (sir Anerood Jugnauth est actuellement en déplacement en Angleterre). Une possibilité qui reste dans le domaine de l’hypothétique.

 

Du très hypothétique même, si ce n’était pour la réaction de Showkutally Soodhun. «Il se voyait peut-être en Premier ministre. Du coup, il fait n’importe quoi. Ça démontre qu’il a peur de la popularité de Xavier», confie un membre de la famille bleue. La guéguerre entre le ministre MSM et le leader du PMSD en a surpris plus d’un cette semaine. Au cœur de la colère du numéro trois du gouvernement Lepep : des banderoles où l’on voit Xavier-Luc Duval souhaiter Eid Mubarak pour l’Eid-ul-Fitr. Et c’est sur Radio Plus, le lundi 20 juillet, que Showkutally Soodhun a fait part de sa colère de voir que le leader du PMSD fait tout pour devenir «lerwa mizilman». Étrange !

 

Mauvais timing

 

Il s’agit là d’une pratique habituelle des leaders de parti. Du coup, la sortie de Soodhun en a fait tiquer certains (et même au sein du MSM). Mauvais timing, mauvaise façon de faire passer un message. Surtout qu’au final, Xavier-Luc Duval s’en sort bien et prend de la hauteur : «En tant que Premier ministre par intérim, je suis responsable envers les Mauriciens du bon fonctionnement du gouvernement en l’absence du Premier ministre. Je dois m’assurer de la cohésion du gouvernement dans l’intérêt du pays et au nom de la responsabilité collective. Je ne peux que regretter les écarts de langage de M. Soodhun et je souhaite que cela ne se reproduise pas», a écrit Xavier-Luc Duval sur son compte Facebook.

 

Avec classe, tout simplement, estime un député du MSM : «Soodhun a fait un faux pas, Duval s’en est bien sorti. Mais ça ne veut pas dire grand-chose. Il ne pourra pas accéder au poste de Premier ministre.» Et puis, comme le fait ressortir notre interlocuteur, SAJ est encore en pleine forme : «La question ne se pose pas. Quand le moment viendra, on s’interrogera sur
sa succession.» Mais un terrain aussi rocheux, ça se prépare.

 

Xavier-Luc Duval continue, semble-t-il, son entreprise de séduction avec une réunion avec un des dirigeants d’un mouvement hindou. La stratégie du PMSD semble être claire : devenir un parti national (et non représentant une seule communauté).

 

À cette partie plus que fine, le MMM s’est déjà cassé les dents. «Paul Bérenger a tout essayé et il continuera d’essayer. Mais c’est un unfair game quand on prend en compte la réalité mauricienne», confie un membre du MMM. Qu’importe les chances de réussite de Xavier-Luc Duval et de sa bande, les ambitions du leader du PMSD agacent. Après l’ambition déclarée de Xavier-Luc Duval (il souhaitait obtenir deux mairies) suite à la victoire de l’alliance aux dernières municipales, certains membres du MSM se posent des questions. «Quel est son hidden agenda ? On ne sait pas exactement. Peut-être qu’il veut simplement faire du bon travail», confie un député MSM. Chez les Bleus, on privilégie cette théorie. «Nous faisons notre travail en cohésion avec les autres membres du gouvernement. C’est tout ce qui nous intéresse», explique un conseiller PMSD.

 

Munitions

 

Se rapprocher de SAJ, faire de l’ombre au ML d’un Ivan Collendavelloo qui ne digère toujours pas sa rupture d’avec le MMM et prendre la place de Pravind Jugnauth pour la succession. Serait-ce le plan de Xavier-Luc Duval ? «Pas du tout», précise notre interlocuteur. Mais comment expliquer alors le ressenti de Showkutally Soodhun ? Pourquoi alors, dans une période de trouble (suite à l’affaire BAI et à celle du DPP), en rajouter une couche ? Pourquoi donner aux détracteurs de l’Alliance Lepep des munitions ? Les tensions entre le MSM et le PMSD ne datent pas d’aujourd’hui, mais en politique, lorsqu’elles sont visibles, elles ne sont que le sommet de l’iceberg. Que se passe-t-il dans les océans glacés et glacials de ces deux partis ?

 

Ce serait la question à se poser, estime un observateur politique  proche du PTr : «C’est dangereux ce qui se passe. Si deux partis d’un gouvernement sont à couteaux tirés, que va-t-il se passer pour l’avenir de ce gouvernement et du pays ?» Alors que cette période postélectorale devrait être un temps de reconstruction, elle dévie de cette route d’apaisement : «Les gens sont fatigués, ils veulent des solutions. Ils en ont marre de cette opération de nettoyage à outrance. Ils veulent envisager les mois prochains dans la sérénité.» Pour que cela se fasse, Xavier-Luc Duval devrait mettre ses ambitions «démesurées» de côté, estime cet observateur. Et prendre la place qui lui va le mieux : «Le PMSD est et sera toujours un partenaire. Sans plus.» 

 

Mais il ne faudrait pas l’oublier : avec l’Alliance Lepep, tout devient possible.

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