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Lancement d’une garderie solidaire : Les Mirabelles, au bonheur des mamans

11 novembre 2015

Une vingtaine d’enfants profitent des avantages de cette garderie.

Des éclats de couleurs. Des éclats de joie. Des sourires partagés et des gazouillis échangés. Des petites maisons de poupées, des maxi Legos, des bacs à sable. Des tapis de jeux, des comptines chantées et des histoires murmurées. Le monde se contemple du haut de mini-chaises en attendant que la course des nuages cesse en cette fin de matinée pluvieuse, ce jeudi 5 novembre. Les bouts de chou de la garderie pas comme les autres, Les Mirabelles, à Flacq, sont tout contents.

 

Dans quelques minutes, la ministre de l’Égalité du genre et du développement de l’enfant, Aurore Perraud, accompagnée de personnalités, va venir couper un morceau de ruban rouge pour inaugurer ce lieu qui vient en aide aux familles défavorisées. Mais pour ces gamins âgés entre 3 mois et 3 ans, ce n’est pas le moment le plus important de la journée. Dans quelques minutes, leurs mamans, qui ont assisté à la cérémonie protocolaire, vont venir leur faire un petit coucou… Le bonheur !

 

Depuis quelques mois, une vingtaine d’enfants (mais la capacité d’accueil est plus grande) bénéficient de ce programme créé et mis en place par la fondation Antoine Tsia Lip Ken (celle de UDIS/Super U), en partenariat avec la Fondation pour l’Enfance de Terre de Paix. Le Early Childhood Centre, qui se trouve dans le bâtiment de Flacq Cœur de Ville, accueille des enfants âgés de 3 mois à 3 ans afin que leurs mamans puissent travailler. Pour Rs 200 par mois, les petits sont pris en charge, des repas équilibrés leur sont servis, et ils participent à plusieurs activités sympathiques. Une initiative sociale qui touche profondément les mamans concernées.

 

Elles peuvent, du coup, améliorer les conditions de vie de leur famille. Alors que les impératifs économiques exigent deux salaires, le monde du travail ne s’est pas encore adapté à la réalité des femmes (pas ou peu de flexitime, pas de facilités de garderie sur le lieu de travail, entre autres). Alors quand on a des enfants en bas âge et qu’on n’a pas les moyens de se payer une nounou ou une garderie, il est difficile d’aller travailler. Pendant neuf ans, Wendy Rosse, 34 ans, est restée à la maison pour s’occuper d’Ezzechiel, 12 ans, d’Ismael, 9 ans, de Yael, 4 ans, et de Yeshuael, 1 an.  Elle a mis sa vie d’employée en mode pause parce que ça coûtait bien trop cher de faire garder ses petits : «Il n’y avait personne pour s’occuper d’eux. Donc, c’était beaucoup plus simple que je le fasse. Mais ça faisait un salaire en moins.»

 

Toutefois, grâce à la toute nouvelle garderie, où elle dépose Yeshuael tous les matins, elle a repris ses activités de couturière et la vente, à temps partiel, d’ustensiles de cuisine. Avec son mari, qui travaille dans «mekanik», les fins de mois sont moins difficiles. Dans la voix de Wendy, une certaine fierté : «Je suis contente de pouvoir subvenir aux besoins de mes enfants.» Difficile, aujourd’hui, de se contenter de son rôle de mère (et pas uniquement pou roul la kwizinn). Pour s’épanouir pleinement, pour s’enorgueillir d’une certaine indépendance, il faut toucher un salaire. Sandra Casimir, 36 ans, est toute heureuse d’avoir, enfin, repris le chemin du travail. Pour ces raisons-là. Et pour d’autres…

 

Inondations meurtrières

 

Elle est rassurée : ses jumelles, Noémie et Naomie, 2 ans et demi, sont heureuses dans leur nouvel environnement.  Enfin, elle retrouve un semblant de stabilité. Celle qui vit à Poste-de-Flacq, habitait jusqu’au 30 mars 2013 à La Butte. Le jour des inondations meurtrières, sa maison a été envahie par l’eau et elle s’est échappée, in extremis, de son habitation avec ses deux filles, alors âgées d’un mois, dans ses bras. Depuis, grâce à Caritas, elle a été relogée dans l’est de l’île. Son mari y a trouvé du travail en tant que cuisiner. Et le couple a recréé sa vie, dans un autre lieu. Il ne manquait plus qu’à Sandra de trouver un moyen de travailler : «Avec les filles, c’était difficile. Je ne devais pas payer une place à la garderie, mais deux. Vous imaginez le coût ?»

 

Et puis, l’association l’a approchée et lui a parlé de cette main tendue aux mamans qui n’ont pas les moyens de payer pour une garderie traditionnelle : «Je suis heureuse ! Vous ne pouvez même pas imaginer tout ce que mes filles apprennent ici. Elles chantent, elles dansent. Elles apprennent des choses. C’est vraiment bien.»

 

«Ris diab»

 

Aujourd’hui, Sandra sert dans un snack et s’habitue à sa nouvelle vie : «Ce n’est pas facile de dépendre de son mari. Et puis, survivre avec un seul salaire, c’est très compliqué.» Le mode ris diab par lake, ça épuise. Ça brise les plus beaux rêves. Et les plus belles envies de mère : «Je voulais pouvoir faire plaisir à mes filles. Leur offrir tout ce dont elles ont besoin.» Au-delà de l’envie d’indépendance, de sécurité financière, c’est bien ce désir-là qui motive ces mamans à reprendre le chemin du travail. Joanna Edemben, 25 ans, le sait bien.

 

Maman de deux enfants, Angel, 3 ans (qui va à l’école), et Thavanesh, 5 mois (qui est à la garderie), elle a passé ces dernières années à «get zenfan» et «get lakaz». Depuis quelques semaines, elle est réceptionniste dans un «salon» et, avec son tout premier salaire, elle a acheté des choses pour ses enfants : «Je m’occupe d’abord de ce qui est essentiel : le lait, les couches... Ensuite, si c’est possible, je passe leurs petits caprices.» D’autres opportunités s’offrent à elle et à son mari, désormais. D’autres façons d’envisager l’avenir : «Je suis contente de pouvoir l’aider à construire notre vie. Maintenant, avec deux salaires, on peut épargner un peu. Avant, on ne pouvait pas le faire.» Alors, elle le sait bien, cette toute nouvelle garderie, c’est un peu sa chance à elle : «Ça peut sembler bête pour certaines personnes. Mais avoir un lieu où on peut quitter son enfant en toute sécurité, ça change tout.»

 

Et elle le sait, tous les jours pour Thavanesh, il y a des éclats de bonheur, des sourires échangés et des gazouillis partagés.

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