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À l’approche des élections générales : ces nouveaux partis qui s’invitent dans la danse

Danny Varaden, le Dr Vasant Bunwaree et Selven Saminathen ont présenté de nouveaux partis politiques ces derniers jours.

Plus que jamais, période pré-électorale oblige, la marmite politique bouillonne. Et avec les législatives qui approchent à grand pas, on assiste à un scénario typique d’un feuilleton politique plein de rebondissements, comme on en connaît bien ici, à Maurice. Depuis quelques jours, de nouvelles effervescences avec l’arrivée de nouveaux partis, animent l’échiquier politique. Coup de projecteur...

Il y a du nouveau dans le paysage politique de l’île. Car en cette période pré-électorale, avec les alliances qui se concrétisent pour certains et les négociations qui s’accentuent pour d’autres, sans oublier ceux et celles qui arpentent, de long en large, le terrain pour aller à la rencontre des électeurs, l’échiquier politique est plus que jamais en ébullition. Et à l’approche des législatives, de nouveaux partis s’invitent aussi dans la danse en promettant des alternatives aux Mauriciens et en proposant des programmes pour, disent-ils, rendre la vie des citoyens meilleure.

 

C’est ce qui est, par exemple, à l’agenda du Mouvman Verite & Zistis (MVZ). Lancée depuis peu, la nouvelle formation présentée par ses dirigeants Gaëtan Jacquette, Danny Varaden et Renaud Balaho disent oeuvrer pour le «mauricianisme» et se donne pour objectif de défendre les «laissés-pour-compte». C’est ce qu’a expliqué Renaud Balaho : «Dans notre équipe, il n’y a pas de personnes qui traînent des casseroles. Pena seki vinn anbet ou. On a des personnes qui vont représenter les Mauriciens avec dignité, sincérité et honnêteté. La différence entre nous et les autres, c’est que nous sommes là d’abord pour rassembler les minorités. Nou pa pran bann elektora pou depo fix ou pou marsandiz ki nou pou aste-vende. Nou pou montre ou seki zot pe kasiet nou...»

 

Danny Varaden, un autre dirigeant du parti, dit être animé d’un désir de faire autrement : «Au sein de MVZ, on ne prend pas d’argent avec le secteur privé ou avec les capitalistes pour financer notre campagne. Nous, on fait de l’autofinancement. Avek nou ti kas, nou pey tou seki nou ena pou peye par nou mem. Nou pa pren kas ar personn pou nou pa anba lipie person. Personn pa dikte nou. Nou, nou dikte par konsians lepep. Nou dikte par nou leker. Nou investi nou leker dan sa proze ki nou pe fer la. Nou investi nou leker pou bann Morisien. Nou bizin bann vre patriot pou nou sov nou pei...»  Ces derniers jours ont aussi vu le lancement du Rassemblement pour l’Avancement Moris qui réunit plusieurs autres partis, comme l’Union Socialiste Mauricienne, le Mouvement Travailliste Militant, le Mouvement Mauricien Socialiste Militant et le Regroupement des Diasporas de France. Parmi les dirigeants du nouveau parti : Vasant Bunwaree, ancien ministre de l’Éducation. En sus de prôner une manière différente de faire de la politique, on retrouve au coeur des objectifs du parti l’envie de travailler pour le progrès du pays. Et parmi les mesures contenu dans son programme, il y a l’installation de climatiseurs dans les foyers mauriciens.

 

«J’ai l’impression que la population mauricienne ne s’est pas habituée à ce qui se passe dans le pays sur l’échiquier politique depuis de nombreuses années. Quand on sonde un peu les uns et les autres autour de nous, on comprend que la population veut un changement. À chaque fois que les élections s’annoncent, tous les partis parlent de changement. Même les slogans ont tourné autour de ce mot : changement ! Fort de cela, le parti qu’on vient de lancer est pour l’avancement du pays et pour un vrai changement. On a ajouté le mot “vrai” parce que c’est ce qu’on propose à la nation. Il faut du vrai changement. Quand on regarde les partis qui sont au pouvoir et dans l’opposition, on entend des choses qui ne sont pas dans l’intérêt des Mauriciens. Et ce sont des choses qui ne sont pas acceptables. L’opposition ne fait que critiquer. Me ki ou pou fer ou ? Au sein des partis qu’on connaît, que ce soit ceux qui sont au pouvoir et ceux qui sont dans l’opposition, il y a des gens kinn deza fer, refer, defer, re-refer. C’est pour cela que nous voulons proposer une alternative», nous confie le Dr Vasant Bunwaree.

 

Il poursuit en nous expliquant ce que son nouveau parti veut apporter au pays : «Nous proposons un rassemblement pour l’avancement de Maurice. C’est-à-dire, ki realite ki pe dominn nou ek ki nou bizin fer pou nou pei avanse. On vient de l’avant avec des projets comme le concept de Sea Water Air Conditionning Authority. Dans le pays, il y a, par exemple, la Central Water Authority dont la responsabilité est de fournir de l’eau aux Mauriciens. La responsabilité du Central Electricity Board, c’est de permettre aux Mauriciens d’avoir de l’électricité. Avec la Sea Water Air conditionning Authority, nous voulons permettre aux citoyens de jouir d’une façon de faire qui existe au Japon, par exemple. J’ai aussi appris que ce système est utilisé au Canada. On est dans une île et c’est facile à mettre en place.»

 

Des visions et des mesures pour changer la vie de la population, c’est ce que propose aussi Ene Nouveau Espwar (ENE), lancé le 14 septembre par Selven Saminathen. «Transparence,  responsabilité,  égalité des chances ou encore lancer de nouveaux secteurs économiques à forte valeur ajoutée» sont les projets phares du nouveau parti. «Ene Nouveau Espwar découle de la conviction que chaque Mauricien mérite une chance équitable de contribuer à l’avenir du pays, indépendamment de son origine, de sa classe sociale ou de son nom de famille. Le parti est fondé sur les principes de transparence et de responsabilité, et il s’engage à faire en sorte que ce soient les compétences et les capacités qui priment, plutôt que les relations ou le népotisme. Nous devons veiller à ce que chaque ministre nommé possède les compétences et l’expertise nécessaires dans les domaines relevant de son ministère», explique Selven Saminathen en s’adressant aux Mauriciens : «ENE n’est pas seulement un parti pour aujourd’hui, mais pour l’avenir de Maurice. Il s’adresse à chaque Mauricien, y compris ceux qui ne sont pas encore en âge de voter, car les décisions que nous prenons aujourd’hui seront déterminantes pour les jeunes générations. Nous voulons créer un pays où chacun a une voix et un rôle à jouer dans la construction d’un avenir commun et prometteur.»

 

Ces partis qui se positionnent à l’approche des législatives viennent créer un peu plus de mouvements sur l’échiquier politique déjà en ébullition en cette période pré-électorale. Quel est le poids de ces partis par rapport aux partis traditionnels et quel impact peuvent-ils avoir auprès des électeurs ? C’est ce que nous avons demandé au Dr Avinaash Munohur, politologue et consultant en stratégies politiques. Pour lui, ces nouveaux partis font partie du folklore local. «Comme c’est souvent le cas à la veille d’une élection, l’échiquier politique se met en marche avec les partis traditionnels qui finalisent leur alliance et leur programme, mais également avec de nouveaux partis ou mouvements qui se forment et viennent de l’avant avec leurs propositions, se positionnant, notamment, comme des alternatives faisant de la politique autrement. Ce phénomène fait partie du folklore mauricien et est rendu possible grâce au mode de fonctionnement même de notre système électoral. En effet, il n’y a que très peu d’impératif pour la création et l’enregistrement d’un parti politique à la veille d’une élection. Contrairement à d’autres pays où la création d’un parti politique doit se faire selon des modalités complexes, avec des prérequis et une procédure administrative assez lourde, nous avons cette particularité à Maurice d’avoir une approche extrêmement libérale et démocratique sur la possibilité de créer un parti politique. Je m’amuse souvent à dire qu’il est plus facile de créer un parti politique que de créer une entreprise à Maurice. Et c’est vrai dans le fond», souligne Avinaash Munohur.

 

Et qu’en est-il du rôle que ces nouvelles plateformes peuvent jouer face aux partis traditionnels avec les élections qui approchent à grand pas ? «Ça dépend. Nous n’avons pas, pour l’instant, vu émerger des partis politiques capables de sérieusement concurrencer les partis traditionnels. Aucune de ces formations n’est aujourd’hui capable d’avoir une assise territoriale proprement nationale et n’a une organisation et des instances bien structurées. Ne parlons même pas de la dimension idéologique et de la constitution d’un power base solide et stable dans le temps. Mais cela ne signifie pas que des individualités ne peuvent pas émerger par ce mode. Je pense ici à Oliver Thomas et à Patrick Belcourt, par exemple, qui ont fait des scores impressionnants en 2019. Ces scores peuvent d’ailleurs leur donner une marge de manœuvre pour négocier une entrée dans un parti traditionnel. Il y a également l’autre cas de figure, soit des individus ayant déjà eu une carrière dans des partis traditionnels qui décident de lancer leur propre mouvement. C’est le cas de Steven Obeegadoo, Alan Gannoo, Kavi Ramano, Ivan Collendavello ou encore Roshi Badhain. Dans ces cas, nous voyons clairement des individualités politiques reconnues qui ont su se constituer une base électorale solide. La preuve est que certains d’entre eux ont su négocier des alliances – au même titre qu’un parti traditionnel – et sont aujourd’hui au gouvernement», souligne le politologue.

 

Il conclut sur l’impact que peuvent avoir ces nouveaux partis sur l’électorat : «Il peut être réel. Dans une élection où les marges pourraient être extrêmement serrées, chaque vote comptera. Et chaque parti capable de prendre un vote à un parti traditionnel aura potentiellement un impact sur les résultats. La question reste maintenant : de quel côté des deux grands blocs est-ce que les partis émergents vont le plus gratter – pour utiliser le jargon du terrain ?» On verra bien dans les semaines à venir...