Publicité
1 octobre 2023 12:27
C’est un sujet qu’il connaît bien et qui lui tient à cœur. Atteint de Post-Polio Syndrom (PPS), Dev Virahsawmy, 81 ans, ancien politicien, écrivain et linguiste, a très souvent fait entendre sa voix, sur la question de rendre accessible le cannabis médical à Maurice.
«PPS is killing me slowly and maliciously. I badly need easy access to CBD oil, which is now legal but not yet openly commercialised and easily accessible. It is State-controlled and hence gives extra power to a handful of unscrupulous medical and non-medical civil servants», avait-il écrit dans une lettre ouverte adressée au ministre de la Santé, Kailesh Jagutpal, le 30 juillet et d’interview en interview, il n’a cessé de dénoncer cet état de fait.
Depuis quelques semaines, le cannabis thérapeutique a sa place à l’hôpital Victoria à Candos avec un premier groupe de patients qui est concerné par le traitement. «Le cannabis médical est une réalité à Maurice. Nous avons déjà un médicament qui est là. En ce moment, nous procédons à une phase d’évaluation, notamment de la part des neurologues. Il y a eu une réunion, il y a deux semaines, avec tous les membres du Therapeutic Committee. Le comité se compose de 12 personnes : 10 spécialistes et 2 pharmaciens, à l’hôpital Victoria à Candos. On a passé en revue les cas des patients. Dans les 3 à 4 médicaments commandés, un seul a été livré et il se compose de 25 flacons et concernant le médicament qui est disponible, ses indications sont restreintes et concernent notamment les patients qui souffrent de sclérose en plaques. Il y a une deuxième et une troisième commande pour d’autres pathologies, qui doivent rentrer incessamment. Concernant surtout le CBD (cannabidiol) ena pasyan pe atann. Kouma li rantre, nou pou lans bann tretman la. On est dans l’attente de commandes venant de l’Espagne et des États-Unis. Les médicaments commandés auraient dû rentrer depuis longtemps. Mais c’est l’affaire, au plus tard, de quelques semaines», nous explique le Dr Anil Jhugroo, psychiatre à l’hôpital Brown Sequard.
Que pense-t-il du fait que le cannabis médical est maintenant une réalité dans l’île ? C’est la question que nous avons posée à Dev Virahsawmy. «Quand on parle du cannabis oil, il faut se rappeler qu’il y a deux variétés. Le cannabis oil donne ainsi du THC (tétrahydrocannabinol). Samem ki nou apel ganja dan Moris. On le qualifie comme du cannabis récréactionnel. Après, il y a une autre variété, qu’on appelle le hemp ou le chanvre. On le qualifie de cannabis industriel. Cette variété permet la fabrication de tissue, d’électricité ou encore de chaussures, mais elle fournit aussi un produit qu’on appelle le CBD (cannabidiol). Le CBD est un produit qui peut aider des personnes qui souffrent d’une série de problèmes de santé, par exemple l’Alzheimer, l’épilepsie, le cancer, entre autres. Il peut soulager au moins 15 pathologies. Il peut donc venir en aide à bann dimoun ki soufer enn seri problem lasante ek ki capav gayn soulazma ar sa. Il s’avère que maintenant le cannabis médical a été légalisé. Se enn gran ed pou bokou dimoun malad ki an soufrans me li pa enkor liberalize, car c'est un comité qui va décider qui en a droit ou qui n'en a pas. C'est un autre combat encore...», nous confie le linguiste.
Pour le défenseur du Kreol Morisien, il n’y a pas à en douter, le cannabis médical, souligne-t-il, a la capacité de soulager bien des maux : «Je connais très bien ce dossier et ce produit est capable d’aider et de soulager 250 000 à 300 000 Mauriciens en souffrance de plusieurs maladies et qui en ont besoin. Mon engagement dans ce combat était important, pour mon problème ki apel Post-Polio Syndrom (PPS), parce qu’un soulagement est possible à travers le CBD mais aussi à travers le THC. Les gens qui sont dans la même situation que moi, peuvent être soulagés grâce au cannabis médical. Il est aussi bien de préciser que pour des personnes malades, pou bann dimoune ki gayn cancer par exemp, ant lezot maladi, cannabis medical, se enn gran gran ed.»
Revenant sur sa longue bataille, Dev Virahsawmy ne peut pas occulter les moments difficiles : «En l’absence de traitement avec le cannabis oil, mon prefer manz mo margoz trankil.» Tout au long de son combat, Dev Virahsawmy n’a cessé d’attirer l’attention sur certains faits : «Concernant, le THC, qu'on appelle gandia à Maurice, je tiens à souligner, qu'il existe une liste de 10 drogues classifiées comme étant les plus dangereuses. Sur la liste, il y a l'alcool, la nicotine donc le tabac, entre autres, et sur cette liste, le cannabis n'est pas mentionné. Ce qui veut dire que le cannabis n'est pas une drogue dangereuse. Kifer li ilegal dan Moris ? C’est parce que les producteurs d’alcool et de tabac, zot kone ke si kanabis liberalize, zot biznes pou afekte.»
Il tient aussi le même discours concernant le CBD et sa libéralisation : «Il y a aussi une forte résistance de la part des médecins. Par exemple, si des personnes souffrent d'atroces migraines, elles vont définitivement se tourner vers un médecin pour les soulager à travers une prescription de médicaments disponibles à la pharmacie. Mais si ces mêmes personnes qui souffrent de migraines ont accès à l'huile de cannabis, elles ne trouveront pas la nécessité d'avoir recours à un médecin. Les médecins mettent ainsi une pression pour que le cannabis oil ne soit pas libéralisé. D’un autre côté, il y a aussi un lobby d’importateurs de médicaments. Ils craignent aussi que leurs business soient affectés par cette libéralisation. Et ils sont aussi en train de faire pression pour que le cannabis oil ne soit pas libéralisé. Pour les malades, il y a des vested interests qui nous empêchent d’avoir accès à un médicament qui peut nous aider.»
Il y a, dit-il, des incohérences qui le désolent : «Le cannabis THC, ne figure pas sur la liste des drogues dangereuses à Maurice. On peut acheter de l’alcool qui peut détruire la santé d’une personne partout, mais on ne peut pas se procurer le cannabis THC qui n’est pas considéré comme dangereux. On est dans une situation kot seki bon pou nou lasante nou pa gagne, me seki pa bon nou gayn li legaleman dan tou kwin lari. C’est cela mon combat.»
Selven Govinden, porte-parole de Claim (Cannabis Legalization And Information Movement) Mauritius abonde dans ce sens. «On se dit qu'au moins le gouvernement a fait quelque chose par rapport aux réclamations concernant le cannabis. Mais on constate qu'il y a beaucoup de pathologies qui sont mises de côté. Le cannabis médical a fait ses preuves. Il faudrait qu'il puisse être utilisé pour d'autres pathologies. En ce moment, dans le monde, on constate aussi que les gens ont affaire au stress, à des tensions, à des pressions. Tout cela fait partie des maladies qui affectent de plus en plus les gens. Le traitement actuel est ciblé, mais il faudrait considérer toutes les pathologies. Cela fait des années qu'on a tiré la sonnette d'alarme et qu'on attire l'attention sur le cannabis et ses bienfaits sur la santé. C'est reconnu par de grandes organisations internationales, que le cannabis n'est pas considéré comme une drogue dangereuse. Le cannabis, même avec un pourcentage de THC, n’a fait aucun mort. C’est aberrant qu’un médecin ne puisse toujours pas le prescrire à un patient qui en a besoin. Un malade qui arrive à un état de bien-être grâce au cannabis arrive à ne pas ressentir les effets secondaires de sa maladie», nous déclare Selven Govinden qui souligne aussi que le cannabis outre son aspect de santé, représente également des avantages économiques.
Des faits que Claim adressée une lettre aux autorités en juin... dans laquelle, comme d’autres voix, ses membres mettent en avant les bienfaits du cannabis pour soulager de nombreux maux...
Publicité