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Le gouvernement en mode opération-séduction : entre applaudissements, craintes et interrogations

Sébastien Diolle, Anne Robert et Kris Valaydon commentent les récentes mesures annoncées par le gouvernement qui, selon les autorités, ont pour but d’améliorer la vie des Mauriciens.

Les récentes annonces du régime en place «pour améliorer la vie des Mauriciens» suscitent de nombreuses réactions.  Pour certains, il faut arrêter la surenchère parce que «le garde-manger national se vide». D’autres, approuvent, applaudissent et parlent de feel-good factor.

C’est définitivement le temps des grandes manœuvres... Le contexte électorale oblige, avec les législatives qui arrivent à grand pas, le gouvernement en place déploie l’artillerie lourde et brasse le terrain à coups d’annonces populaires, faisant plus que jamais les yeux doux aux électeurs. Car voilà plusieurs semaines que le Premier ministre Pravind Jugnauth s’est lancé dans une opération séduction affichant confiance et sérénité face à ses opposants, tout en multipliant les exercices de fer labous dou afin de séduire le maximum de Mauriciens. 

 

Parmi les dernières annonces : le réajustement salarial dans les secteurs public et privé, l’application des recommandations du rapport du PRB pour les fonctionnaires qui sera faite à partir de janvier 2025 avec un back pay en décembre de la même année, l’inauguration du nouvel hôpital Sir Anerood Jugnauth, à Flacq, une vague de promotions dans la force policière et un nouveau système de compensation les concernant, sans oublier l’entrée en vigueur des connexions d'Internet mobile gratuites pour les jeunes de 18 à 25 ans suivant une mesure annoncée dans le Budget 2024-2025. Bref, les bonnes nouvelles pleuvent, mais ne font pas l’unanimité...

 

Pour Sébastien Diolle, membre de l’aile jeune du MSM, les récentes mesures annoncées par les autorités ont pour but d’améliorer la vie des Mauriciens. «Le gouvernement socialiste du MSM, dirigé par le Premier ministre Pravind Jugnauth, démontre une fois de plus son engagement envers le peuple mauricien. La récente révision salariale pour les travailleurs des secteurs publics et privés est une preuve de cette détermination à soutenir les Mauriciens dans leur quête d’une vie meilleure», souligne Sébastien Diolle. La priorité du gouvernement de Pravind Jugnauth, précise le membre de l’aile jeune du parti Soleil, est de continuer à façonner une île où il fait bon vivre : «L’inauguration du nouvel hôpital Sir Anerood Jugnauth à Flacq marque un tournant important dans l’amélioration de l’accès aux soins de santé de qualité pour tous. L’application des recommandations du rapport du PRB à partir de janvier 2025, avec un back pay à partir de décembre de la même année, montre que le gouvernement est à l'écoute des besoins des fonctionnaires et agit en conséquence pour leur bien-être.»

 

«La gueule de bois du lendemain»

 

Pour lui, les récentes annonces ont été bien accueillies par les Mauriciens : «Ces mesures ont été largement appréciées par la population.» Est-ce que ces annonces peuvent convaincre les Mauriciens dans leur choix pour les prochaines élections ? Pour Anne Robert, responsable de la commission économique d’En Avant Moris, il faut arrêter la surenchère. «Je ne sais pas si les annonces du gouvernement ont convaincu les Mauriciens. Elles les ont certainement interpellés. Les multiples révisions salariales sont tentantes, même si les Mauriciens savent bien qu’elles n’apporteront qu’un bénéfice de court terme. Notre position là-dessus est claire. Tant que nous importons la majorité de nos besoins de consommation, le seul indicateur qui compte est le PIB par habitant en dollars américains. On peut imprimer des roupies, on ne peut pas imprimer imprimer des dollars. En revanche, il est fort de gaspiller nos réserves en dollars pour maintenir un gouvernement en place. A ce jour, nous puisons dans nos stocks sans les remplacer. Le garde-manger national se vide. Les cinq prochaines années seront très difficiles quel que soit le gouvernement en place. Il est donc important d’arrêter cette surenchère, de refuser d’entraîner les Mauriciens dans une forme de transe électorale sans tenir compte de la gueule de bois du lendemain», nous dit-elle, tout en soulignant ce qui devrait être la priorité : «Notre message est qu'il faut plus que jamais se rapprocher des Mauriciens les plus vulnérables. Leur fournir une canne à pêche plutôt que de distribuer du poisson. L'éducation, la santé financière des entreprises reste une priorité.»

 

Pour Kris Valaydon, observateur politique, cette opération séduction dans laquelle s’est lancée le régime en place est un aspect de notre systématique politique. «L’aspect le plus grave, c’est que toutes ces promesses qui sont faites soient devenues tout à fait légales, consacrées par les jugements de la Cour suprême en août 2022 et le Privy Council en octobre 2023 dans  l’affaire concernant la pétition de Dayal contre Pravind Jugnauth et ses colistiers au no 8. Ce qui est écrit dans le jugement du Privy Council, qui reprend celui de notre Cour suprême, ne fait que permettre qu'une vanne soit ouverte pour que tout gouvernement puisse, dans des conditions très généreuses et facilement remplies, annoncer toute une pléiade de mesures pour plaire à l'électorat. Le paradoxe veut que les annonces faites sur le PRB, par exemple, constituent les mêmes faits reprochés lors des élections de 2019, et sur lesquels rien a été trouvé d'illégal.  Pour l'hôpital, ils vous diront que ça fait partie du programme gouvernemental, tout comme pour les autres mesures, même si cela fausse le jeu démocratique, sachant que les élections viennent à grands pas. Ainsi s'est installé dans notre système politique un phénomène répétitif de pratiques contraires au principe de free and fair elections. Et si sur le plan légal, ces promesses et donations ne constituent pas un bribery, c’est tout à fait autre chose comme on le sait sur le plan de l’éthique et de la légitimité», explique Kris Valaydon.

 

Il souligne aussi le fait que ces annonces ciblent surtout les indécis. «L’effet de ces annonces sur l’individu indécis va dépendre de son degré de conscience et de sa vision qu’il se fait sur le bien commun, la motivation électoraliste des gestes généreux qu’annonce le gouvernement, le coût de ces largesses et sa réflexion sur le poids de la dette sur les générations à venir.  Il y a comme une "acceptation critique" de la part  des récipiendaires des offres du gouvernement. Le citoyen qui n’est pas dupe, ne se laissera pas convaincre par cette  générosité qu’il qualifiera d’éphémère, disparaissant lorsqu’il va "tirer sa ration". Le Mauricien commence à se poser des questions, il commence à comprendre que c’est son propre argent qui lui est donné. Certains vont plus loin en pensant à la dette publique et les charges et l’hypothèque sur les générations futures.  Quant au PRB, l’erreur du gouvernement, c’est de le présenter comme une faveur qu’il fait aux fonctionnaires. Et on ne comprend pas comment on peut prendre, aujourd’hui, une décision concernant les finances publiques, dont la gestion relève de la prérogative exclusive d’un prochain gouvernement», affirme le juriste en commentant les dernières mesures annoncées par le régime en place qui, plus que jamais en ce moment, brasse le terrain à coups d’annonces populaires...