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Le récidiviste Kishan Mowlah, 45 ans, tué lors d’un cambriolage : le village de Dagotière entre choc et interrogations

18 avril 2023

Les proches et amis de la victime étaient réunis pour ses funérailles hier.

Une atmosphère lourde régnait dans le village de Dagotière, en ce samedi 15 avril, après qu’un terrible drame est survenu la veille. Suivant une requête des habitants de la localité, les limiers du poste de police de St-Pierre s’étaient rendus à la rue EDC, près de la boutique Manohur, aux alentours de 21h45 le vendredi 14 avril. Sur place, ils y ont trouvé Jaydutt Kumar Mowlah, plus connu comme Kishan, avec de graves blessures blessures à la tête et aux mains. Il ne respirait plus lorsque les forces de l’ordre sont arrivés sur les lieux ; décès confirmé par le Dr Prem Chamane, médecin légiste de la police, qui avait également fait le déplacement avec les limiers du Scene of Crime Office (SOCO). Les recoupements d’informations ont vite révélé que cet habitant de la localité, âgé de 45 ans, avait été agressé mortellement pendant qu’il cambriolait le commerce. Il a été surpris par l’un des proches du propriétaire de la boutique Manohur, qui lui a infligé un violent coup à la tête avec un morceau de bois.

 

Dans le village de Dagotière, Kishan Mowlah était très populaire, mais pas pour les bonnes raisons. Il est également très connu des services de police, ayant un lourd casier judiciaire pour des affaires de vol. Ses amis l'avaient d'ailleurs surnommé Chessman, reprenant le nom d'un célèbre cambrioleur en Amérique. Si peu de langues se délient après son agression mortelle, ses partenaires de beuverie ont accepté de témoigner après beaucoup d’hésitation. Le soir du drame, disent-ils, le petit groupe se trouvait aux abords de la boutique Manohur pour prendre quelques bières ; l’une de leurs plus fidèles habitudes. «Chaque soir, le boutiquier ferme ses portes à 21 heures. Ce soir-là, nous l’avons entendu dire qu’il avait une sortie familiale après la fermeture. Chessman a sûrement vu une occasion se présenter à lui et s’est laisser emporter. Depi lontan li pa pe kokin, me li ena sa vis la», laisse entendre l’un d’eux. Lorsque le commerce a fermé ses portes, le petit groupe a quitté les lieux pour rentrer, mais le quadragénaire est vraisemblablement revenu sur place après le départ du propriétaire. «Lepok li ti pe travay mason avek so tonton, li ti deza vinn travay dan laboutik-la. Li ti sirman deza kone kouma li pou fer pou li kokin kan li finn trouv banla ale», confie l’un de ses amis.

 

La thèse de l’acte criminelle ayant été établie, la brigade criminelle de Moka a interpellé plusieurs membres de la famille Manohur. Soumis à un feu roulant de questions, le propriétaire du commerce a raconté que peu de temps après son départ, il a constaté qu’un cambrioleur s’était introduit dans sa boutique grâce à une caméra connectée à son téléphone portable. Il a aussitôt contacté un membre de sa famille, qui se trouvait dans leur maison qui donne directement accès au commerce. C’est ainsi qu’un dénommé Ganess Manohur, plus connu comme Danny, s’est rué vers la boutique pour maîtriser le voleur.  Questionné, il a déclaré qu’il s’est saisi d’un morceau de bois et a infligé un violent coup au cambrioleur à la tête pendant que celui-ci tentait de prendre la fuite en passant par une fenêtre après avoir fait main basse sur des articles et de l’argent. Appréhendé, Ganess Manohur a passé la nuit en détention avant de comparaître en cour, le lendemain, sous une accusation provisoire de meurtre. Il a ensuite été reconduit en cellule, la police ayant objecté à sa remise en liberté.

 

À ce stade de l’enquête, les amis et connaissances de Kishan Mowlah, ainsi que plusieurs habitants de la localité, se posent beaucoup de questions quant aux réelles circonstances du drame. «Nou tou konn Danny, li abitie donn koudme dan laboutik. Li enn dimoun mari trankil. Lorsque nous avons vu les blessures qu’avaient subi Chessman, nous nous sommes tous demandés s’il avait agi seul», s’interroge l’un d’eux. D’autres avancent avoir également constaté une lacération au cou de la victime. «Li pa paret en mark dibwa. Nou pa kone si finn servi zis dibwa pou agress li ou si linn gagn kout sab.» Bien qu’il reconnaissent que la victime n’aurait jamais dû cambrioler le commerce, ils estiment que «pa ti bizin touy li, ti kapav zis bat li. Akoz seki finn arrive, Danny pou bizin ferme akoz linn rod defann so laboutik». Orphelin depuis plusieurs années, Kishan Mowlah est le cadet d’une fratrie de trois enfants. Autrefois maçon, il ne travaillait plus et vivant d’une pension qu’il avait obtenue à cause d’un problème de santé.

 

Sollicités, les membres de sa famille n’ont pas voulu s’exprimer, occupés à organiser ses funérailles. Celles-ci ont eu lieu ce samedi, à 14 heures. Son frère aîné, récemment hospitalisé pour des problèmes de santé, a quitté l’hôpital pour pouvoir lui rendre un dernier hommage. La famille Manohur ne s’est pas, non plus, montrée plus bavarde, ayant uniquement avancé que «sa dimoun-la enn residivis notwar. Nou pa pou dir plis akoz lenket pankor fini». La police poursuit son enquête.

 

Elodie Dalloo & Stephanie Domingue

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