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4 juillet 2016 03:28
Les souvenirs sont intacts et les émotions toujours aussi fortes, violentes et pénibles. Dans leur maison à Grand-Baie, où ils habitent depuis le drame, David et Yvelaine Donald essaient de mettre un pied devant l’autre pour enfin avancer. Aujourd’hui, ils remercient le ciel et leurs anges gardiens de leur avoir permis de donner un nouveau sens à leur vie. Elle s’appelle Lexia. C’est leur petite fille qui est venue au monde un an après que ce terrible drame a tout fait basculer. C’est elle qui leur donne aujourd’hui la force et le courage d’avancer. Mais voilà, oublier ce qui s’est produit ce jour fatidique de novembre 2013 leur est impossible. Souvent, ils remontent le fil de ce cauchemar, se demandant pourquoi Kayla et Kiara, leurs merveilleuses petites filles, leur ont été arrachées si soudainement, si brutalement. Elles qui n’étaient que de toutes petites filles et qui avaient toute la vie devant elles.
Ce jour-là, se rappelle Yvelaine, dans la nuit du 13 au 14 novembre 2013, tout le monde était allé se coucher après un parfait moment en famille. Le bonheur qu’ils vivaient à ce moment-là était tellement intense, si pur ! Dans la nuit, ils avaient été réveillés par un violent incendie qui s’était déclaré dans la chambre de leurs jumelles, alors âgées de 8 ans, après que le ventilateur, vraisemblablement en surchauffe, a explosé. Les petites filles sont décédées d’une asphyxie causée par une forte inhalation de fumée dans leur maison à Cité-Chebel, Beau-Bassin, malgré tous les efforts de leurs parents pour les sauver. Ce départ tragique et subit avait plongé Yvelaine et David Donald dans un profond chagrin, une tristesse qui leur semble encore, trois ans plus tard, insurmontable.
Aujourd’hui, le couple a eu confirmation que c’est bien le ventilateur de la marque Pacificqui est à l’origine de l’incendie qui a provoqué la mort de leurs jumelles. Dans le cadre de l’enquête judiciaire instituée après la mort des jumelles Donald dans un incendie, et qui a débuté en cour le jeudi 30 juin, le Forensic Scientific Laboratory(FSL) a produit un rapport qui indique que c’est bien l’engin qui a provoqué ce sinistre. Selon les experts, les traces de flammes indiquent que le feu a pris à l’endroit où se trouvait le ventilateur qui a explosé parce qu’il était en surchauffe.
Cette déclaration officielle du FSL, souligne Yvelaine, n’est pas une surprise et ne fait que confirmer ce qu’ils ont toujours clamé. «Ce ventilateur n’était en marche que depuis deux heures maximum. On le nettoyait régulièrement. Pourquoi a-t-il donc explosé s’il n’était pas défectueux ? Pourquoi y a-t-il eu tellement d’autres incidents avec ces ventilateurs par la suite ? Est-ce qu’on a examiné ces appareils pour savoir s’il y avait des défauts de fabrication ?»se demande-t-elle. Connaître la source de ce tragique événement leur permettra-t-il de faire leur deuil ? «Non», répond Yvelaine. Car faire son deuil lui semble toujours impossible.
Des questions. Toujours les mêmes. Ce sont elles qui reviennent à chaque fois. Yvelaine et David veulent comprendre, mais ils savent bien que certaines d’entre elles resteront toujours sans aucune réponse. «On se demande toujours pourquoi elles et pas nous. C’est tellement injuste. On aurait préféré mourir à leur place»,confie David. La mort de leurs princesses les a plongés dans un gouffre dans lequel il n’y avait aucune lumière. Souvent, confie Yvelaine, elle a pensé au suicide. Elle ne voulait plus vivre sans ses deux petites filles. Elle qui les a portées pendant neuf mois, qui les a vu faire leurs premiers pas, dire leurs premiers mots. Elle, qui les a vu grandir jour après jour et devenir de magnifiques petites filles, se retrouvait subitement démunie. Avec David, ils les aimaient tellement, les chérissaient tant, qu’ils ont failli en mourir lorsqu’ils les ont perdues : «Pas un jour ne passe sans qu’on ne pense à elles, sans que je ne pleure. Heureusement que nous avons pu compter sur nos proches qui nous ont apporté du soutien.»
C’est là, dans le pire cauchemar de leur vie, qu’une arrivée inattendue les a sauvés. Un 20 août 2014, Yvelaine donne naissance à Lexia, une petite fille qui leur a, de nouveau, apporté de l’espoir et une raison de vivre. Avec elle, ils ont rappris à sourire, à s’émerveiller. Redevenir parents leur a permis de vivre à nouveau et de ressentir autre chose que de la douleur et du chagrin. Aujourd’hui, ils ne vivent que pour la petite Lexia qui fêtera bientôt ses 2 ans. Après ce qu’ils ont traversé, la peur et l’angoisse font partie de leur quotidien. Envers Lexia, ils se montrent surprotecteurs. «Elle est très joyeuse et souriante. C’est elle qui nous pousse à nous battre. Après ce qu’on a vécu, on redoute tellement qu’il lui arrive quelque chose. On a peur de revivre la même chose», confie la jeune maman.
Si Yvelaine et David ont trouvé une raison d’avancer avec la venue de Lexia, Kayla et Kiara sont toujours aussi présentes dans leur vie. Pas un jour ne passe sans qu’ils ne pensent à leurs filles. Le 15 juin, c’était leur anniversaire. Elles auraient eu 11 ans, souligne David. Avec sa femme, ils parlent souvent d’elles, de ce qu’elles feraient, de leurs réactions, de ce qu’elles auraient aimé ou pas. Kayla et Kiara sont toujours aussi présentes dans leur vie et dans leur cœur. «Avant, nos filles étaient notre but dans la vie. Puis, on les a perdues. Aujourd’hui, notre priorité, c’est de grandir Lexia. Je dis toujours que j’ai trois filles. Elles ne me quitteront jamais. Quand Lexia sera grande, on lui expliquera. On lui parlera de ses deux grandes sœurs»,confie Yvelaine.
Cette semaine, dans le cadre de l’enquête judiciaire, Yvelaine et David devront se rendre une nouvelle fois en cour. Un passage toujours aussi difficile à surmonter pour eux. «Nous y sommes allés deux fois déjà et c’est très dur parce qu’il faut revenir sur ce qui s’est passé et ça réveille toutes nos souffrances. Dans ces moments-là, on ne peut pas retenir nos larmes», explique David. Néanmoins, parce qu’ils veulent que justice soit faite, ils savent qu’ils n’ont pas le choix. Une fois que l’enquête sera bouclée, ils relanceront leur affaire en cour afin de réclamer justice. Ils ont recueilli les services de Me Erickson Mooneapillay :«On va aller de l’avant. Pas pour gagner, mais pour leur rendre justice et pour que d’autres personnes ne vivent pas la même tragédie»,dit-il.
Ce combat, ils sont prêts à le mener au nom de Kayla et Kiara.
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