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L’école au temps du coronavirus

28 décembre 2020

Jenna Bussier travaille au collège Solveig Anspach, à Montreuil, comme professeure certifiée en Éducation musicale et chant choral. Elle nous propose une photo de son lieu de travail.

Il a chamboulé bien des choses sur son passage. Il a brisé des familles, mis en difficulté des entreprises et provoqué des réaménagements dans de nombreux secteurs. Le milieu hospitalier, dans bien des pays, souffre, tout comme le domaine éducatif qui a dû se réinventer. Le responsable de ces bouleversements : le coronavirus qui, plusieurs mois plus tard, continue de tenir la planète en otage. Car la liste des restrictions continue de s'allonger malgré l'espoir des vaccins. À New-York, qui comme plusieurs grandes villes se retrouve sous l'emprise du virus avec un nombre impressionnant de contaminés jour après jour, les écoles ont été fermées et l'éducation à distance privilégiée. Ce qui est devenu dans plusieurs parties du monde un moyen de ne pas pénaliser les étudiants, même si les avis divergent sur ce procédé.

 

En France, qui est aussi, il y a quelques semaines, repassé en confinement avec une deuxième vague de contaminations qui sévit, l’évolution du virus dans les établissements scolaires est suivie de très près. Durant ce deuxième confinement, les écoles restent ouvertes, avec les enfants masqués dès 6 ans, ce qui change par rapport au premier confinement durant lequel les écoles étaient restées fermées et avaient rouvert petit à petit avec le déconfinement. Le rôle des écoles, et donc celui des enfants et des jeunes dans la transmission du virus, est ainsi au centre de débats entre scientifiques mais aussi pour tous ceux qui estiment qu'il est difficile de surveiller les jeunes lorsqu'ils sont entre eux.

 

En Australie, par exemple, les écoles ont été vues comme peu contaminantes mais l’épidémiologiste Zoé Hyde remet en cause cette vision. Elle a fait part de ses inquiétudes dans un récent article : «Nous ne pouvons plus nous permettre de fermer les yeux sur le rôle des enfants dans la transmission si nous espérons contenir le virus.» Selon l'experte, un protocole doit être mis en place pour permettre de limiter la circulation du virus au sein des écoles. En France, les autorités rassurent. Le nombre d’élèves positifs à la Covid-19 serait «un chiffre maîtrisé», disent-elles face à ceux qui doutent et s’inquiètent. Dans une récente déclaration, le ministre de l’Éducation nationale parle d'un chiffre qui semble stable dans le temps depuis la rentrée et qui permet au ministre de conclure que la situation sanitaire ne se dégrade quasiment pas dans les écoles du pays.

 

Comment cela se passe pour ceux et celles qui évoluent dans ce secteur ? Une compatriote nous parle de sa réalité. «Je m'appelle Jenna Bussier et je travaille au collège Solveig Anspach à Montreuil, en tant que professeure certifiée en Éducation musicale et chant choral», nous confie notre compatriote. L'établissement dans lequel elle travaille compte 400 élèves dont 17 classes : «Dans ma discipline, j'ai l'occasion de côtoyer toutes les classes car l'enseignement artistique est obligatoire en France.» Les derniers mois ont été bien évidemment riches en chamboulements : «Le confinement a été une période très compliquée pour les élèves, parents et professeur.e.s. Nous avons dû revoir nos pratiques et faire face à un “nouveau métier”. Donner des cours en distanciel s'avère extrêmement complexe. Une notion expliquée en classe sera comprise beaucoup plus facilement que derrière un écran. La dimension humaine entre un.e professeur.e et ses élèves n'est pas négligeable. Un lien de confiance se tisse au fil des mois, voire des années, et une fois que cela est fait, l'élève se sent dans un climat rassurant et peut progresser. Pendant le confinement, les élèves étaient souvent seul.e.s face à leurs difficultés ou réussites. Cette situation en a déstabilisé plus d'un. Les élèves ont besoin qu'on les encourage et qu'on les félicite constamment. Ils ont besoin de présence humaine pour grandir. Ils semblent vraiment très heureux d'avoir repris le chemin de l'école... et moi aussi», poursuit notre compatriote.

 

Et comment s'organise-t-elle pour faire face à la situation ? «Ce n'est pas “moi qui m'organise” mais c'est le collège dans son ensemble qui a dû revoir toute son organisation. Depuis la Covid-19, le port du masque est obligatoire et le gel hydroalcoolique coule à flot. Les élèves et tout le personnel du collège portent le masque toute la journée. Nous nous sommes habitué.e.s à cette situation si particulière et les élèves respectent plutôt bien cette règle. Chacune des classes a également une salle attribuée. Ce ne sont plus les élèves qui se déplacent mais les professeur.es car cela évite le brassage.»

 

Se réinventer

 

Avec la crise sanitaire, le métier, explique Jenna Bussier, se réinvente : «C'est très compliqué pour les professeur.e.s de changer de salle constamment car il faut également bouger avec tout le matériel nécessaire au bon déroulement du cours. Mes collègues ont une capacité d'adaptation extraordinaire et arrivent à faire des super cours malgré les conditions difficiles. Ce n'est pas rare de voir des professeur.e.s naviguer entre les classes avec leur chariot à roulettes qui déborde de livres et matériels en tout genre. C'est assez drôle comme image. Ayant une salle spécifique équipée d'un piano, de divers instruments et de puissantes enceintes, je n'ai pas à changer de salle. Je mesure ma chance !»

 

Et c'est en respectant les protocoles qui ont été mis en place que la professeure s'adonne à son travail de façon sereine : «Je pense qu'on connaît très mal ce virus et que nous n'avons pas suffisamment de recul pour réussir à établir des conclusions. Dans mon collège, nous avons beaucoup de chance car les locaux sont neufs, spacieux et agréables. Nous avons un renouvellement de l'air en flux continu dans toutes les salles du collège. Depuis le début de cette pandémie, il n'y a eu que très peu de cas de Covid dans mon établissement. Nous avons également la chance d'avoir une principale (cheffe d'établissement) vraiment à l'écoute de son personnel. Nous avons travaillé ensemble pour appliquer le protocole et rien ne nous a été imposé de façon arbitraire. Je sais que ce n'est pas le cas de tous les établissements scolaires et que nous faisons partie des privilégié.e.s. Certains collègues travaillent dans des conditions extrêmement difficiles en ce moment. Leurs établissements sont vieux, étroits, voire inadaptés, ce qui rend le protocole sanitaire difficilement applicable. Au collège Solveig Anspach, nous apportons tout notre soutien à ces établissements et participons activement aux divers rassemblements organisés», soutient Jenna Bussier qui espère de tout cœur que la situation va vite s'améliorer. «Vivement la fin de ce virus, pour qu'on puisse respirer et se déplacer librement. Je rêve de venir à Maurice pour retrouver mes proches qui me manquent tant...»

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