Publicité
Par Elodie Dalloo
21 novembre 2022 02:20
Ils se connaissaient depuis leur plus tendre enfance. Ayant grandi dans la même localité, à Chamouny, Leedish Ittoobah, 19 ans, et Ravnish Rammah, 18 ans, étaient de très bons amis et même «comme des frères», à en croire les membres de leur entourage. Ils ont fréquenté la même école primaire et le même collège mais bien qu’ayant eu des parcours différents, ils brillaient chacun à leur manière dans leur domaine.
Le premier, qui se passionnait pour la coiffure, venait tout juste de faire des travaux de rénovation dans son salon avec l’aide de ses amis et allait procéder à l’inauguration de celui-ci le mercredi 16 novembre. Il espérait également pouvoir entamer des démarches pour poursuivre sa carrière professionnelle au Canada une fois qu’il aurait obtenu son certificat du Mauritius Institute of Training and Development (MITD). Le second était, quant à lui, sur le point de terminer ses études secondaires. Actuellement en période d’examens du Higher School Certificate (HSC), il se voyait déjà intégrer l’Université de Maurice l’an prochain pour des cours de comptabilité. Malheureusement, leurs innombrables rêves et projets ne verront pas le jour. Car si la vie les a toujours réunis, la mort en a fait de même.
C’est à Bassin Ferraille, à Chamouny, que le drame s’est joué. Les deux amis, accompagnés de cinq autres camarades, s’y étaient rendus dans l’après-midi du mardi 15 novembre dans le but de passer un bon moment. Sur place, certains d’entre eux se sont jetés à l’eau pendant que les autres les regardaient se baigner. D’après nos renseignements, Leedish Ittobah s’est soudainement retrouvé en difficulté dans la rivière. À en croire ses proches, il ne savait pas nager. Voulant lui venir en aide, son meilleur ami Ravnish Rammah s’est jeté à l’eau mais il n’a pas tardé à disparaître sous l’eau lui aussi. Paniqués, désespérés, les témoins de la scène n’ont eu d’autre choix que d’alerter les secours. Le temps que ces derniers arrivent sur les lieux, il était déjà trop tard. Leedish Ittoobah et Ravnish Rammah sont tous les deux morts noyés. Après que la police les a extirpés de l’eau, le médecin du Samu présent sur place n’a pu que constater leur décès.
Ranjeeta, la mère de Ravnish Rammah, ne peut s’empêcher de repasser ces terribles images en boucle dans sa tête. Elle est marquée à vie. Ce jour-là, elle a été alertée du drame par l’une de ses amies, qui habite la localité. «J’étais dans l’autobus, rentrant du travail, et j’étais sur le point d’arriver à la maison lorsqu’elle m’a contactée. Elle insistait pour que je vienne à la rivière immédiatement parce qu’un malheur venait de s’y produire. Lorsque je lui ai demandé des explications, elle m’a simplement demandé si mon fils était un bon nageur mais n’a rien voulu me dire de plus.» Angoissée, elle a aussitôt contacté son aînée, Celeena : «Mais elle non plus n’a pas voulu me dire ce qui s’était passé. Elle m’a juste dit qu’elle n’en savait pas plus, qu’elle se rendait à la rivière de ce pas.»
Énorme choc
Ranjeeta a alors contacté son époux Rajesh, qui travaillait à La Gaulette, pour lui demander de rentrer immédiatement. Lorsque tous deux sont arrivés à Bassin Ferraille, ils ont eu un énorme choc. «Les secours extirpaient mon fils de l’eau. J’ai prié Dieu de tout mon coeur pendant que le médecin l’examinait mais on m’a indiqué qu’il n’avait plus de pouls. Zot inn les mwa get li, so lekor ti fre, apre zot inn amenn li lamorg», se remémore-t-elle avec douleur.
Quant à Prem, le père de Leedish Ittoobah, il a appris la mauvaise nouvelle de son autre fils. «Ce jour-là, j’avais emmené mes deux plus jeunes enfants à la plage. En rentrant, j’étais passé au supermarché pour m’acheter une brique de jus lorsque mon autre fils m’a appelé pour m’annoncer le décès de Leedish. Je ne sais toujours pas ce qui a bien pu le pousser à se rendre à cet endroit. Je l’ai toujours découragé d’aller dans des lieux aussi dangereux. Zame kone kan pou ariv enn problem ; monn touzour rod averti li me li pann pran sa an konsiderasyon», se désole-t-il, ne pouvant retenir ses larmes.
Les corps sans vie des deux jeunes ont été transférés à la morgue de l’hôpital Victoria le même soir pour une autopsie. Celle-ci a été pratiquée par le Dr Maxwell Monvoisin, chef du département médico-légal de la police, qui a attribué leur décès à une asphyxie provoquée par la noyade. Les funérailles de Leedish Ittoobah et de Ravnish Rammah ont eu lieu le lendemain, soit le mercredi 16 novembre, en présence de proches et amis terrassés par la douleur d’une si subite et horrible perte.
Depuis le drame, la tristesse et les regrets ne cessent de ronger l’entourage des deux victimes. Celena, la soeur aînée de Ravnish Rammah, est effondrée. «Mardi, mo telefonn pann sonn ditou. Kouma linn koumans sone, monn gagn zis move nouvel. Si je pouvais remonter le temps, retourner en arrière, je l’aurais fait. Mo pa ti pou les li ale», lâche-t-elle avec amertume. Elle raconte que son petit frère et elle avaient des liens très forts, même s’ils se chamaillaient tout le temps. «Li ti kontan fatig mwa, dir mwa mo bizin rod enn kopin, ki mo lavi bien “boring”. Il était plus jeune mais était toujours très protecteur envers moi. Mo frer inn al enn sel ale, mo pa pou retrouv mo zoli garson ankor.» Elle poursuit, dépitée : «Monn al liniversite, monn gagn mo premie travay, mo ti pe dir li fer parey li ousi, fer bon garson. Il avait beaucoup de rêves et d’ambitions, même plus que moi.» Il y a moins d’un mois, Ravnish Rammah avait obtenu son permis de conduire, faisant la fierté de sa famille. «J’avais prévu de contribuer pour l’aider à payer l’assurance lorsqu’il aurait sa voiture», souligne Celena.
Le 16 décembre, Ravnish aurait célébré son 19e anniversaire. «J’avais déjà prévu de prendre trois semaines de vacances au travail pour passer du temps avec lui ; nous avions prévu de faire des achats, de lui organiser une fête et d’aller prier, vu qu’il venait d’obtenir son permis», confie sa mère Ranjeeta avec peine. Elle ne tarit pas d’éloges sur son enfant. «Depuis la naissance, il ne nous a jamais causé de problèmes. Il a été à l’école, a eu d’excellents résultats au CPE, avant d’intégrer le Mahatma Gandhi Institute de Nouvelle-France. Il était un bosseur et n’a jamais redoublé de classe.»
Si, au départ, Ravnish envisageait de poursuivre ses études en Australie, ce n’est que dimanche dernier qu’il a fait part à sa mère de ses projets d’intégrer l’Université de Maurice. «Nou ti pe dir li aprann pou ki li gagn enn bon travay, ki li pa pou bizin fatig li kouma so papa ek mwa. Nou ti pe dir li ki dan dimans li pa pou ena pou lev boner pou al vann koto dan la krwaze Chemin-Grenier. Avek so koudme ek koudme so ser, nounn fer boukou progre. Nous travaillions dur pour lui donner la possibilité de réaliser ses rêves.» Après avoir obtenu son permis de conduire, le jeune homme lui avait fait une promesse : «Li ti dir mwa ki li pou amenn mwa partou, ki mo pa pou bizin demann so papa, ki li pou vinn rod mwa travay. Li ti enn extra bon zanfan. Mo gard zis bon souvenir, mo pena okenn regre, tou seki linn rode nounn donn li.»
Regrets
De son côté, Prem, le père de Leedish Ittobah, était tout aussi fier de son enfant. «Li ti kontan pou fer progre, pou avanse. Li ti ena boukou proze. Il avait d’ailleurs beaucoup de clients, toujours très satisfaits de son travail. Je n’ai jamais eu de complaintes ou de reproches le concernant ; c’était quelqu’un de bien. Li ti zis kontan pas boukou letan avek kamarad. Mo extra sagrin sekinn arive», lâche-t-il, en larmes. Son fils Davish, soit le frère de la victime, abonde dans le même sens. «Li ti enn dimounn trankil, korek, enn bon garson. Il était très populaire et avait beaucoup d’amis.» Passionné par le sport, la pêche et la nature, Leedish organisait souvent des sorties entre amis. «Il était quelqu’un de plutôt réservé, il ne me disait pas toujours où il se rendait mais je lui avais toujours demandé d’être prudent. J’ai toujours été là pour lui donner de bons conseils», confie Prem. Il lance d’ailleurs un appel aux jeunes afin qu’une autre famille n’ait pas à traverser une telle épreuve à l’avenir. «Kan zot paran donn zot konsey, swiv li, ekout zot. Fer bon zanfan pou pa ariv zot enn zafer parey. Pran konsey avek gran dimounn, dir ki bann plas zot pe ale. Zot paran pou kone kot ena danze. Ekoute ki konsey zot paran donn zot.»
Les regrets sont les mêmes pour la famille Rammah. «An enn fraksion segonn enn maler inn arive, so bann kamarad pann kapav fer nanye. Mo mazine kan toulezour mo ti pe sorti travay, mo ti pe trouv li. Mem li pa ti pe koz boukou me nou ti kone li ti la», lâche Rajesh, le père de Ravnish. Submergée d’interrogations, la mère du jeune homme se demande encore : «Mardi, apre so lekol, linn al pey mo delo, apre mo pa kone. Li pa sorti mem, pa abitie al la rivier. Mo pa kone kifer linn fer sa.» Néanmoins, elle concède : «Enn maler inn ariv li kan linn al tir so kamarad ; kitfwa si li pa ti fer li, li ti pou res sagrin tout long so lavi.»
À ce stade, la police de Chemin-Grenier tente encore de faire la lumière sur les circonstances de cette tragédie. Les cinq autres jeunes qui étaient en leur compagnie, âgés entre 16 et 22 ans, ont déjà donné leur version des faits. L’enquête suit son cours.
Une fillette de 4 ans se noie dans un bassin à Rodrigues
Il y a à peine deux semaines, cette petite famille était aux anges. Claréla Ravina a mis au monde une petite fille, son quatrième enfant, faisant la joie de son entourage. Mais le bonheur et l’excitation ont vite laissé place à la tristesse et aux larmes. Pour cause, le samedi 12 novembre, sa cadette – Téshiana Elisha Hortense, 4 ans – a trouvé la mort dans des circonstances tragiques. Pendant qu’elle s’occupait de son nouveau-né, Claréla Ravina a quitté sa fille des yeux pendant tout juste quelques secondes et pendant qu’elle jouait, celle-ci a fait une chute dans un bassin situé à quelques mètres de leur domicile à Latanier, Ste Famille, Rodrigues, et s’est noyée.
Pour les familles Ravina et Hortense, cette tragédie est terriblement dure à vivre. Sollicitée, la tante de la petite victime raconte : «Nou pa ankor kone exakteman kouma sa kapav inn arive. Nou leker fermal.» Sa nièce, dit-elle, «ti enn bon zanfan. Elle était obéissante, joviale ; nous étions tous très attachés à elle». C’est avec beaucoup de peine qu’elle se remémore toutes ces fois où elle leur rendait visite et voyait la petite courir dans tous les sens. «Li ti toultan devan laport, pe zwe. Li ti ena boukou lenerzi. Ce n’est pas facile de vivre un tel drame mais nous gardons foi en Dieu.»
Pour Claréla Ravina, cette douleur est insurmontable. En larmes, elle raconte : «Mo ena telman boukou bon souvenir avek li. Mo tifi ti kontan danse ek fer TikTok. Li ti enn vre zanfan gate ek ti bizin rant lekol lane prosenn.» Elle poursuit : «C’est vraiment dur de perdre son enfant. Elle laisse un grand vide mais j’essaie de rester forte pour mes trois autres enfants. Même si je viens de mettre au monde une petite fille, celle-ci ne comblera jamais le vide que laisse sa soeur.»
Une autopsie a attribué le décès de la victime à une asphyxie provoquée par la noyade. Ses funérailles ont eu lieu le lundi 14 novembre. Elle laisse derrière elle une famille effondrée de douleur.
Publicité