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10 août 2015 14:09
C’est une boule d’énergie. Un rayon de soleil. Avec un sourire qui fait fondre les cœurs et illumine la pièce où elle se trouve. La petite Lexya, qui aura bientôt un an, fait déjà ses premiers pas et ne cesse d’aller ici et là, jouant avec le téléphone portable de son père, trébuchant et tombant, se relevant en pleurant avant d’aller vers d’autres aventures sur ses petites jambes. Sous le regard tantôt attendri, tantôt angoissé de ses parents David et Yvelaine. Un petit trésor qui commence déjà à les appeler «maman» et «papa», ses deux premiers mots.
David et Yvelaine Donald le savent : ils ne retrouveront plus jamais leur bonheur d’antan, celui qui les animait avant la disparition tragique de leurs jumelles. Mais avoir leur petite fille à leurs côtés les aide à retrouver un peu de joie et d’espoir en la vie. Il y a presque deux ans, leur existence avait été anéantie par un horrible coup du sort, impossible à conjurer. C’était dans la nuit du 13 au 14 novembre 2013. Ce soir-là, un violent incendie a ravagé le domicile de David et Yvelaine, à Cité-Chebel, Beau-Bassin. Là où ils vivaient un bonheur à la puissance quatre, entourés de leurs deux princesses, Kayla et Kiara, des jumelles âgées de 8 ans.
En une fraction de seconde, tout a basculé. L’incendie s’est déclaré dans la chambre des filles, causé vraisemblablement par un ventilateur en surchauffe, entraînant une explosion. Le bilan de cette tragédie est lourd, très lourd même. Inimaginable, inacceptable. Kayla et Kiara n’ont pas survécu à ce drame qui a plongé leurs parents dans un gouffre de tristesse. Un chagrin difficile à partager, même aujourd’hui, bien qu’ils bénéficient du soutien de leurs proches et amis. Car un drame comme le leur, il faut le vivre pour pouvoir le comprendre, ainsi que toute la souffrance que cela peut causer.
«Parfois, on me demande si ça va. Mais ça n’ira jamais comme il y a trois ans, avant que mon bonheur ne s’arrête. Et quand on vit un tel drame, il est difficile d’en parler autour de soi car personne ne peut comprendre cette souffrance, juste l’imaginer», confie Yvelaine, alors que les larmes lui viennent aux yeux. Il ne se passe pas un jour sans qu’elle ne pense à ses deux chéries. Après leur tragique départ, Yvelaine a complètement sombré, s’interdisant presque au fil du temps d’esquisser ne serait-ce qu’un sourire.
Elle le dit et le répète : elle aurait préféré mourir que de voir ses filles être brutalement arrachées à la vie. Lui être brutalement arrachées. Ses princesses avaient toute la vie devant elles mais elles sont parties si jeunes et dans des circonstances tellement atroces. Laissant un vide immense dans la vie et le cœur de leurs parents. Outre l’absence de leurs enfants, ne plus se faire appeler «maman» et «papa» du jour au lendemain fait partie des plus dures épreuves que David et Yvelaine ont eu à endurer après cette tragédie.
Mais voilà qu’il y a quelques mois, un petit bout de chou est venu apporter un peu de lumière dans leur quotidien qui n’avait plus aucun sens depuis cette nuit de novembre 2013. Le 20 août 2014, Yvelaine et David sont devenus parents d’une petite Lexia. Un bonheur inespéré pour eux.
Redevenir parents, était-ce indispensable pour qu’ils puissent espérer sortir du gouffre du désespoir ? Yvelaine et David ne peuvent pas vraiment répondre à cette question. La conception de Lexya n’a pas été décidée. Tout comme cela avait été le cas pour les jumelles. «Yvelaine est tombée enceinte et on a pris la décision d’accueillir cet enfant. Au départ, l’idée nous était insoutenable car on venait de perdre nos deux filles. Yvelaine a eu une grossesse très difficile. Elle était dépressive et pleurait tous les jours. Elle a été suivie par un psychologue, tout comme moi. J’étais anéanti par ce qui s’était passé au point de ne pas pouvoir travailler pendant un an et demi», soutient David en tenant dans ses bras sa petite Lexya qui est toute sa joie.
Il aurait tellement voulu disposer d’une formule magique pour revenir au moment où ses filles étaient toujours de ce monde. «Si elles étaient toujours là, on serait en ce moment en pleins préparatifs pour leur confirmation», dit-il, la voix brisée par le chagrin. Il ne se passe pas un jour, pas une minute sans que David et Yvelaine ne pensent à leurs étoiles qui scintillent aujourd’hui au firmament. Mais ils savent qu’ils doivent puiser au plus profond d’eux-mêmes pour être forts et apporter tout leur amour à leur petite Lexya. Et lui transmettre aussi de la joie.
«Lexya est notre raison de vivre. C’est dur mais nous nous efforçons d’être forts pour notre petite fille. De lui montrer qu’on est heureux de l’avoir. Elle n’a pas demandé à être là et n’a pas à subir notre souffrance. Mais j’ai très peur qu’il lui arrive malheur. Et ce sentiment a habité mon être durant toute ma grossesse. C’est ce qu’il y avait de plus dur, de me dire que mon enfant pouvait me quitter à tout moment», avance Yvelaine, les yeux ouverts, mais le regard si vide, si absent.
Aujourd’hui, les photos et vidéos de Kayla et de Kiara constituent un trésor inestimable pour David et Yvelaine, ainsi que tous les souvenirs d’elles qu’ils gardent précieusement au fond de leur cœur. «Il nous arrive de regarder les vidéos et les photos. Même si c’est dur, elles nous rappellent à quel point nos filles nous ont apporté du bonheur. Parfois David me dit que je regarde trop ces vidéos et que cela risque de m’empêcher d’avancer. Mais j’ai peur de les oublier même si je sais que cela n’arrivera jamais», confie Yvelaine qui, depuis le drame, vit chez sa mère à Grand-Baie avec son époux et maintenant leur fille.
Pour eux, la question de retourner vivre dans leur ancienne maison ne se pose pas. Et lorsqu’ils leur arrivent de rendre visite à la sœur de David, qui habite Cité-Chebel, ils évitent de mettre les pieds là où leur bonheur s’es arrêté il y a deux ans.
«Nous avons conservé toutes les coupures de presse parlant de ce drame. Lorsque Lexya sera en âge de comprendre, on va tout lui expliquer», précise Yvelaine. Cette année, pour la Fête des mères, elle a oscillé entre la souffrance de ne plus avoir ses jumelles auprès d’elle et la joie de se sentir à nouveau maman à part entière. «Je dis toujours que je suis une maman de trois enfants même si les deux premières ne sont plus là. Elles resteront mes filles à jamais. Durant deux années consécutives, on n’a pas fêté Noël, une célébration que Kayla et Kiara attendaient chaque année avec impatience.»
Pour le prochain Noël, elle ne sait pas encore si son cœur se prêtera à la magie mais elle fera en sorte d’offrir à sa petite Lexya la plus belle des fêtes. Sa foi en Dieu est restée intacte, l’aidant à avancer, alors que David dit, lui, ne plus croire en une force suprême. «Si Dieu existe, pourquoi a-t-il permis qu’une telle chose se produise ?» ne cesse-t-il de se demander au point de s’être opposé au baptême de sa fille avant de finalement revenir sur sa décision. Yvelaine continue de prier mais sa prière se résume désormais en une phrase : «Que le Seigneur protège Lexya de tout danger.»
Quoiqu’il en soit, pour David et Yvelaine, la route de la reconstruction est encore longue. Mais avec la petite Lexya à leur côté, l’espoir est permis...
Ses services ont récemment été retenus par Yvelaine et David Donald, qui réclament justice pour leurs filles Kayla et Kiara. Me Erickson Mooneapillay a entamé des procédures en vue d’obtenir les documents relatifs à cette enquête. «J’ai sollicité le bureau du directeur des poursuites publiques pour avoir accès aux dossiers de l’enquête. Notamment au rapport complet du Forensic Scientific Laboratory et au rapport d’autopsie des deux sœurs», explique l’avocat. Il précise qu’une mise en demeure contre l’importateur de la marque Pacific à Maurice est actuellement en préparation. «Cela fait presque deux ans que ce drame a eu lieu. Et depuis, rien n’a été fait. Il est temps que justice soit rendue à ces deux innocentes.»
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