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4 juillet 2022 19:06
Ils attendaient ce moment depuis très longtemps. Le monde de la nuit s’est enfin réveillé après 15 mois sans opérer, en raison des restrictions dues à la pandémie. Depuis le vendredi 1er juillet, les propriétaires de boîtes de nuit et autres bars accueillent à nouveau des clients, les clubbers ont retrouvé le chemin des pistes de danses et les organisateurs d’événements poussent un ouf de soulagement, ce secteur ayant beaucoup souffert. Depuis ce week-end, donc, ils sont nombreux à avoir retrouvé l’ambiance des night clubs.
«Après deux ans, j’accueille favorablement cette levée des restrictions concernant les boîtes de nuit. Nous sommes beaucoup à avoir envie d’une petite escapade dans une boîte de nuit, dans un restaurant ou même aller à la plage malgré l’hiver !» nous confie Warren Chris Etowar, jeune danseur qui travaille dans le monde du spectacle et qui attendait, comme beaucoup d’autres, que le monde de la nuit puisse enfin se réveiller.
Yan Morowa, directeur du Saxo Club à Flic-en-Flac et président de l’Association of Night and Private Clubs Owners, est heureux de pouvoir retrouver sa clientèle. «On accueille bien évidemment cette levée des restrictions avec soulagement car ça fait presque deux ans que les night clubs ne pouvaient pas opérer. Il s’agit maintenant de réorganiser le travail pour permettre aux Mauriciens et aux touristes de pouvoir s’amuser dans une bonne ambiance. Ce qui était frustrant, c’est que, quand les boîtes de nuit légales étaient fermées, il y avait des discothèques illégales qui opéraient», confie-t-il. L’homme d’affaires espère vite le retour des beaux jours : «C’est à nous maintenant, les boîtes de nuit légales qui ont des permis et qui respectent toutes les normes, de travailler pour retrouver nos clients. On est un secteur qui a été un peu oublié durant ces deux années difficiles. Au début, on pensait que c’était une affaire de quatre à cinq mois de fermeture mais ça n’a pas été le cas. Les barmans, les DJ et les artistes notamment ont été affectés par cela. On s’est accrochés. On recevait de l’aide des autorités à un moment, puis l’aide en question a été interrompue depuis le mois de novembre.»
Sharon Autard, propriétaire de la boîte de nuit Shotz à Flic-En-Flac, s’attend aussi à ce que le secteur redémarre vite. «Le monde de la nuit est définitivement un secteur qui a beaucoup souffert de la situation sanitaire. D’apprendre que les boîtes de nuit peuvent à nouveau opérer a été un choc positif. Je pensais que ça allait se faire par phases. Mais, bien évidemment, nous saluons cette décision. Le monde de la nuit peut enfin se réveiller. Pendant un an et demi, on a dû se réinventer, même le staff du Shotz. Par exemple, on a un barman qui est devenu réceptionniste. On a tout fait pour préserver les emplois. Mais il y a eu beaucoup de personnes qui se sont retrouvées en difficulté de par la situation. On va certainement tout faire pour bien accueillir les clients», nous déclare-t-elle. Avec toute son équipe, elle a tenu à ce que cette réouverture se passe dans de bonnes conditions : «On a déjà annoncé un événement pour les 6-7 août, avec des DJ internationaux. Il y a aussi une autre réalité avec la pandémie, c’est que les gens ont moins d’argent, avec les hausses de prix et la vie chère, et on essaie de travailler ainsi sur des concepts. Notamment avec des soirées où l’entrée sera gratuite. Notre équipe travaille aussi sur toutes sortes de promotions concernant la consommation chez nous. Après un an et demi difficile, les Mauriciens ont besoin d’enjoy un peu...»
Jimmy Gassel, DJ et producteur, pense, de son côté, à tous ceux qui ont été pénalisés durant les mois écoulés. «Ça fait plaisir car ça fait un petit moment qu'il n'y a pas eu d'événements. Je pense aussi à ces artistes, ceux qui n’ont pu voyager, par exemple, et qui vont retrouver un public», conclut-il, en évoquant ce réveil très attendu du monde de la nuit...
Christophe Karghoo
Les deux années écoulées sont de loin les plus difficiles qu’ils aient connues jusqu’ici. Si la crise sanitaire a tout bousculé sur son passage, les commerces ont particulièrement pris un sacré coup dur. Celle-ci a frappé de plein fouet les opérateurs travaillant sur les plages qui, après avoir été, dans un premier temps, interdites au public, ont été rouvertes sans pour autant permettre les pique-niques. Durant ces deux ans, les marchands de plage en tout genre, ceux qui vendent bouées, fruits, repas, glaces, ont bat lamok jusqu’à perdre tout espoir de pouvoir poursuivre leurs activités commerciales.
Alors que la levée des restrictions permet désormais aux Mauriciens de se rassembler aux abords des plages et d’y pique-niquer, les marchands de plage sont partagés entre soulagement et inquiétude. Fadil Khaidoo, marchand de fruits confits sur la plage de Flic-en-Flac, n’est pas près d’oublier la période difficile qu’ils ont eu à traverser. «Ça fait 35 ans que ma famille vend des fruits sur la plage de Flic-en-Flac et jamais nous avons vécu quelque chose pareil. Ça a été très dur. Il y avait à peine des clients. Les gens venaient juste nager ou faire un tour vite fait sans rien consommer puisqu’ils n’avaient pas le droit. On faisait à peine des ventes. Peut-être le quart de notre chiffre d’affaires habituel.»
S’ils ont tenu bon autant qu’ils le pouvaient en attendant que la situation s’améliore, ils ne s’attendaient pas à ce qu’un autre élément vienne s’ajouter à leurs difficultés. «Non seulement la Covid a tout changé mais avec l’augmentation du coût de la vie, les gens ne dépensent plus comme avant. Ils font très attention et évitent les dépenses inutiles. La vie est très difficile pour les consommateurs comme pour les commerçants.» Est-il confiant que les jours qui viennent seront meilleurs ? «Pas vraiment», lance Fadil Khaidoo. «Il y a des jours où on travaille Rs 200. Ce n’est pas évident. Malgré tout, c’est notre travail et nous devons faire face.»
Reaz Mohamad Golab est dans le même état d’esprit. Cela fait 19 ans qu’il vend des glaces sur les plages. Si les glaces d’Oriana Ice Cream sont habituellement très appréciées des petits et des grands, cela fait deux ans, dit-il, que l’affaire ne fait plus de recettes. «Pendant ces deux ans, nous avons à peine travaillé. La situation n’était pas bonne du tout.» Si le libre accès à la plage est désormais réalité, il nourrit néanmoins des inquiétudes et des craintes par rapport à l’avenir. «Il y a plusieurs facteurs qui entrent en jeu. D’abord, toutes les marchandises coûtent plus cher. Ensuite, les gens ne dépensent plus comme avant et finalement, les prochains mois seront difficiles puisque c’est l’hiver. Les gens viennent peu à la plage et ne consomment pas de glace parce qu’il fait froid.» Il faudra donc, dit-il, s’armer de patience et de courage en attendant l’arrivée de l’été et des jours meilleurs.
Amy Kamanah-Murday
C’était, pour eux, une attente insoutenable. Maintenant, on peut dire qu’ils respirent et reprennent les affaires en main. Nous parlons ici du secteur des artistes, peut-être l’un des plus étouffés pendant cette longue période de restrictions sanitaires. Avec la levée des restrictions, il n’y a plus de limites de personnes dans les rassemblements et les concerts sont autorisés. C’est donc parti pour des prochains mois qui devraient être très actifs, musicalement parlant.
Bruno Raya, qui n’arrêtait pas le combat avec plusieurs autres (un gros collectif d’artistes qui menaçaient de prendre des actions «fortes» si la situation ne s’améliorait pas, tant ils n’en pouvaient plus), est parmi ces nombreux artistes qui reprennent le chemin des concerts et la scène devant un large public. «Je suis très heureux de la levée des restrictions, il était temps de remettre la machine en marche. Maintenant, nous revenons vers la scène face à un énorme public pour des concerts, nous recommençons le boulot», confie celui qui projette déjà les 30 ans d’OSB à travers plusieurs concerts en septembre et, si tout se passe bien, le Festival Reggae Donn Sa le 5 novembre.
Autre organisateur de concerts et festivals, Jimmy Veerapen de Culture Events and Productions, se dit «heureux» mais «prudent car il faut faire attention à la saturation. Dans un week-end, on peut avoir plusieurs fois le même artiste et le public ira bien sûr là où son porte-monnaie le lui permet. Il faudra donc innover, trouver d’autres concepts. Mais la moindre des choses, c’est que le secteur puisse maintenant respirer et reprendre». Cette année, Jimmy Veerapen va, lui, se concentrer surtout sur deux jours de la nouvelle édition de l’Underground Rock Festival en août, avant de mettre en place plusieurs autres projets l’année prochaine.
Pour d’autres, ce sera une continuité accrue. Nous pensons ici au Caudan Arts Centre (CAC) qui opérait depuis un bon moment à 50 % de sa capacité, chose qui n’est heureusement plus d’actualité avec la levée des restrictions. Ashish Bissoondial, Art Director du CAC, s’en réjouit et pense maintenant à accueillir un plus grand public, puisque même ceux qui ne sont pas vaccinés pourront maintenant profiter des spectacles proposés : «C’est un grand soulagement, nous pourrons maintenant accueillir plus de 430 personnes dans la salle. Bien sûr, si les membres du public veulent garder leur masque, il n’y pas de souci et nous allons aussi accueillir ceux qui ne sont pas vaccinés. De beaux moments nous attendent…»
Stephane Chinnapen
Il n’y a pas que les masques qui tombent. Le pass vaccinal peut aussi désormais rester à la maison. Enfin pour le «public» : vous pouvez circuler librement, aller au restaurant ou à l’hôtel, récupérer vos enfants à l’école et faire vos démarches administratives même si vous ne détenez pas ce document qui a rythmé la vie des Mauriciens ces derniers mois. C’est ce qu’a annoncé le Conseil des ministres, le vendredi 1er juillet. Reste que les fonctionnaires, les employés des secteurs éducatifs, hôteliers et médicaux, entre autres, devront quand même être fully-vaccinated. «Presentation of the vaccination pass at specified workplaces for employees only», peut-on lire dans les cabinet decisions. Le samedi 2 juillet, lors d’une allocution à la presse, le Premier ministre a, d’ailleurs, rappelé l’importance de la vaccination pour se protéger.
Si vous aviez l’impression qu’il s’agissait d’une bonne nouvelle, il faudrait penser autrement, estime Lena Arjoon. La jeune femme, qui a toujours dit son opposition au vaccin, affirme qu’elle ne sera pas «libérée, délivrée», tant que le Quarantine Act (en vigueur jusqu’au 30 septembre) ne sera pas éliminé : «Je trouve injuste qu’une partie de la population se trouve encore soumise aux restrictions. Je ne comprends pas la logique derrière les récentes décisions gouvernementales. D’un côté, on lève les restrictions, de l’autre, les fonctionnaires, les enseignants, entre autres, sont toujours soumis aux règles strictes.» Pour elle, le gouvernement crée «un jeu d’illusion» : «C’est de la manipulation ; le jour où il enlève les restrictions, les prix des denrées alimentaires flambent. On a compris leur petit jeu. Il ne faut pas rentrer dans le piège.»
Pallavi Jagessur, qui souffre d’une maladie auto-immune, a longtemps bataillé pour se soustraire à l’obligation vaccinale qui pouvait mettre sa vie en danger. Donc, sur le plan personnel, elle savoure cette victoire qui lui permettra de reprendre une vie plus ou moins normale : «C’est la liberté ! J’ai tenu face aux pressions. Zéro dose, j’ai contracté la Covid et je suis encore vivante !» Pour célébrer ça, elle pense s’offrir un petit séjour à l’hôtel. Anne-Marie Bastien-Lutchmunsing, qui a également refusé de se faire vacciner, estime que c’est «un bonheur» : «C’est un soulagement. Enfin, c'est fini tout ça. Je n’ai aucun regret d’avoir écouté mon intuition de ne pas me faire vacciner. Un grand bravo à ceux et celles qui ont lutté et ont fait entendre leur voix.»
Yvonne Stephen
Il n’y a désormais plus de restrictions sur le nombre de fidèles pouvant assister aux prières et célébrations dans les lieux de culte. Ce qui réjouit plus d’un. «C’est une grande nouvelle et une grande joie. Quand il y avait les restrictions, c’était difficile pour moi de gérer, de devoir choisir qui pouvait venir ou non aux prières. Avec 50 personnes, c’était un peu mieux mais il a quand même fallu mettre deux séances de prière. Aujourd’hui, pouvoir accueillir tous les fidèles est une joie immense», confie Reeaz Jaunbaccus, président de la Réunion Mohammady Soonee Society qui gère la mosquée Baab-Us-Salam Musjid à Vacoas. Toutefois, souligne-t-il, plusieurs fidèles ont choisi de continuer d'appliquer les consignes sanitaires. «C’est surtout parce que nous sommes en période hivernale. Je lance aussi un appel aux fidèles : si vous vous sentez malades, priez à la maison. Je laisse aussi des masques à disposition dans la mosquée mais il n’y a pas d’obligation. En tout cas, c’est un plaisir de pouvoir se réunir pour prier ensemble.»
Guylen Pydiah, qui fréquente la paroisse du Sacré-Cœur à Rivière-des-Anguilles, ressent aussi de la joie. «J’étais à la messe pour les fêtes avec les 50 personnes autorisées et je peux dire qu’on ressentait le vide de ne pas avoir tout le monde réuni. Chez moi, nous n’allions pas prier en famille pour que tous puissent avoir l’opportunité d’aller à la messe. Je suis très contente qu’après deux ans, nous puissions nous réunir en famille et en communauté dans les lieux de culte à travers l’île, peu importe notre croyance. Le fait d’être libre de s’y rendre est une vraie grâce.»
Manavi Armoogum abonde dans ce sens. Toutefois, si elle est heureuse de pouvoir connaître de nouveau les joies des célébrations et prières en communauté, elle dit vouloir continuer à appliquer les gestes barrières.
Valérie Dorasawmy
Il est entré dans nos vies, s’est invité dans notre quotidien depuis l’apparition de la pandémie et s’est très vite imposé comme un instrument de lutte contre le coronavirus. Tantôt jugé utile, tantôt décrié comme étant inconfortable, le masque a bien souvent été au coeur des débats : quand et où le porter ou encore quel type utiliser. Autant de choses qui font qu’il a été le must-have de ces longs derniers mois.
Depuis le vendredi 1er juillet, après presque deux ans, l’usage du masque à Maurice n’est plus obligatoire, sauf dans les transports en commun ou dans les hôpitaux et établissements de santé. Si beaucoup applaudissent cette décision, d’autres ne sont pas prêts à faire sans le masque. Géraldine Secondis fait partie de ceux et celles qui ne vont pas se débarrasser des masques de sitôt. «Le port du masque est un choix et chaque personne est libre de le porter ou pas. Pour ma part, je préfère continuer à le porter là où il y aura foule et dans des endroits d’affluence, surtout en cette saison hivernale où il y a souvent des proliférations de virus. C’est ma façon de me protéger. En même temps, le fait de savoir que ce n’est plus imposé fait du bien car cela laisse le choix à tout un chacun, sachant également qu’on ne risque pas de se prendre une amende en cas d’oubli», confie-t-elle.
Jonathan Hahave continuera également de porter son masque pour se protéger : «Comme le virus circule toujours, je choisis de continuer de porter le masque dans certaines situations pour me protéger. Certainement, je ne vais pas en porter quand je suis en train de marcher et que je suis seul, par exemple. Par contre, quand je vais me retrouver dans une foule ou que je vais entrer dans un endroit très fréquenté, mon masque sera toujours avec moi.»
Pour sa part, Coco Shanelle pense surtout à son bébé, d’où son désir de continuer de porter des masques. «C’est définitivement un soulagement que le port du masque ne soit plus obligatoire mais j’ai décidé de continuer d’en utiliser dans des circonstances et des lieux que je jugerai nécessaire. Je suis une maman d'un nourrisson de 6 mois et je ferai tout ce qu’il faut pour la santé de mon enfant», confie cette mère de famille, en parlant de l’objet devenu un symbole de la pandémie de Covid-19.
Christophe Karghoo
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