Publicité

Mariage pour tous : deux Mauriciens racontent le plus beau jour de leur vie

14 février 2022

Nygel Evenor-Manoguy : «L’union de deux personnes du même sexe n’est pas un problème quand la force des sentiments exprime la sincérité»

 

Cette union me rappelle que l’amour vrai n’a pas de frontières», confie notre compatriote qui nous raconte le plus beau jour de sa vie avec son époux Jean-Paul.

 

Ma demande en mariage : «C’était le jour de mon anniversaire, le 10 octobre 2021. Jean-Paul, mon conjoint, s’est mis à genoux devant 100 personnes pour me demander en mariage avec, en fond, le titre de Slimane et Vitaa, Avant toi. Ce jour-là, j’étais sous le choc et en pleurs car, auparavant, on avait déjà eu une discussion à propos du mariage et pour nous deux, c’était inimaginable. Après deux ans de relation et un an de vie commune, Jean-Paul a décidé de franchir le pas en me demandant en mariage. J’ai su tout de suite, au fond de moi, que j’étais prêt et je lui ai répondu haut et fort : «Oui, j’accepte.» Et après trois semaines de réflexion, nous avons décidé de nous marier à la mairie de Saint-Denis le 10 décembre 2021.»

 

Un tourbillon de sentiments : «Le jour de mon mariage était une journée inoubliable, magique et très intense en émotion. C’était une journée spéciale et ça a passé à une vitesse folle. Les événements s’enchaînaient rapidement. Un sentiment étrange m’avait envahi. J’étais hypersensible et émotif, et de plus, c’était comme dans un rêve, tu n’arrives pas à réaliser que c’est en train de se produire. Ce jour-là, j’avais fait un direct sur Facebook afin que mes amis et ma famille (à Maurice) puissent assister à la cérémonie. Et à ma grande surprise, 5 400 personnes regardaient le direct. J’avais l’impression que la journée se jouait sans que j’y participe. Je me suis bien amusé car la réception a duré de 20 heures à 5 heures du matin. J’étais là avec mon costume blanc heureux et souriant en regardant à chaque fois mon mari, lui montrant mon alliance et ayant tous les deux des fous rires.»

 

Une belle étape : «Nous n’avons eu que des compliments sur tout et tout s’est déroulé comme prévu. Mais c’est vrai qu’il faut que je regarde ma bague ou des photos pour me dire : ça y est, je suis marié ! Moi qui suis très émotif,  j’avais des larmes aux yeux pendant toute la soirée car mes parents et des membres de ma famille n’ont pas pu prendre l’avion pour mon mariage car la France avait placé Maurice en zone rouge écarlate. Du coup, mes parents ont organisé un mariage à la maison avec la famille depuis Maurice, en visio. C’était magique. Pour moi, ça reste un jour exceptionnel car ce jour-là, deux coeurs qui s’aiment s’unissaient. Pour nous, c’était aussi le jour où l’amour a été plus fort que les préjugés et les intolérances. L’union de deux personnes du même sexe n’est pas un problème quand la force des sentiments exprime la sincérité de la relation. Et pourtant, étant mauricien, j’ai dû tout abandonner à Maurice et me battre pour démarrer une nouvelle vie à La Réunion et pour que le mariage pour tous devienne une réalité pour moi car à Maurice, ce n’est pas possible.»

 

Un combat : «Mon mariage a une grande valeur symbolique. Cette union me rappelle que l’amour vrai n’a pas de frontières. Tout être humain a droit à l’amour, quelle que soit la forme de cet amour. Aimer, c’est aimer car l’amour est universel. L’amour est plus fort que tout et il faut que nous soyons forts ensemble. Dans un couple, il faut se soutenir mutuellement afin de montrer à la société que l’union de deux personnes homosexuelles n’est point un problème mais que c’est le refus de la différence sexuelle qui est problématique : le refus de l’égalité des droits, du droit aux sentiments, du droit au mariage pour tous, du droit à la reconnaissance officielle d’une union. Ce dont nous sommes fiers, mon mari et moi, c’est que le jour de notre mariage, nous avons mis beaucoup de joie dans le cœur de nos amis et des membres de notre famille. Nous sommes heureux et respectueux l’un envers l’autre, et nous nous aimons chaque jour comme si c’était le dernier. Nous nous aimerons pour l’éternité.»

 


 

Cindy Aza : «Il s’agit tout simplement d’amour et de vivre en étant libre d’aimer et d’être...»

 

«C’est un vrai bonheur de rentrer dans un bureau et d’entendre Brit me présenter comme son épouse. C’est important pour mon identité et cela contribue à mon équilibre personnel», dit Cindy Aza, en partageant avec nous des clichés de son mariage.

 

Elles ont vécu intensément chaque moment de leur grand jour. Car le fait de pouvoir s’unir l’une à l’autre et se dire officiellement mariées est une étape importante dans leur vie. Pour la Mauricienne Cindy Aza et son épouse Brit Jani, installées en Allemagne, leur union, célébrée le 9 août 2021, symbolise tout simplement la victoire de l’amour sur tous les préjugés et interdits dont sont souvent victimes les personnes de la communauté LGBTQI+.

 

«Je me souviens qu’à un certain moment dans ma vie, je cachais mes relations. J’avais peur de m’exposer au monde, peut-être aussi parce que je n’avais pas encore rencontré la bonne personne. Puis, après, j’ai commencé à changer. Le mariage pour moi, aujourd’hui, représente énormément dans la consolidation de mon couple. Il y a quelques années encore, je n’étais pas pour le mariage, quelque part peut-être parce que j’évoluais dans ce contexte où c’est juste impossible à Maurice que deux personnes du même sexe qui s’aiment puissent s’unir. Et puis, il y a eu ma rencontre avec Brit et tout a changé dans ma vie», nous confie Cindy Aza, de l’émotion dans la voix en revenant sur le jour où il y a eu la demande en mariage entre elle et celle qu’elle aime.

 

«On a fait connaissance sur un site de rencontre, on a appris à se connaître virtuellement pendant une longue période. Moi étant à Maurice et elle en Allemagne, on dormait ensemble, on se réveillait ensemble, on cuisinait ensemble... On a vécu comme ça pendant un an. Puis, Brit est venue à Maurice et a bravé la quarantaine. On s’est vues et on a tout de suite accroché, bien qu’on savait déjà qu’on était amoureuses. Bref, il y a eu comme ça un petit cheminement jusqu’à la demande en mariage qui s’est fait mutuellement. On allait à ce moment-là se faire tatouer. On est arrivées devant le salon, on s’est regardées et on a lancé au même moment : "Veux-tu m’épouser ?» Et cela s’est passé quelques jours avant que Brit ne quitte Maurice», poursuit Cindy qui dit aujourd’hui avoir une vie épanouie, portée par l’amour. «Devant la loi, ici, je suis reconnue comme l’épouse de Brit. Je suis couverte par la sécurité sociale et tout, et j’ai des droits comme tout le monde, gay ou pas. Par contre, à Maurice, Brit n’a pas accès à mon compte et cela, même si nous sommes mariées et c’est très dommage. Personne ne demande plus de droits. On demande simplement d’être reconnue comme un(e) citoyen(ne) à part entière, avec les mêmes droits. Et heureusement que les lois dans certains pays, comme en Allemagne, commencent à changer. C’est un vrai bonheur de rentrer dans un bureau et d’entendre Brit me présenter comme son épouse. C’est important pour mon identité et cela contribue à mon équilibre personnel. Car le débat va au-delà de la sexualité. Il s’agit tout simplement d’amour et de vivre tout simplement en étant libre d’aimer et d’être...»

 

Pour Brit, également, son union avec Cindy est venue consolider le socle de leur relation. «Le mariage pour tous en Allemagne date de 2017. Cela veut dire que les personnes de la communauté LGBTQI+ ont les mêmes droits que tout le monde. Et c’est vraiment quelque chose qui réchauffe le coeur car au final, qu’on soit gay ou pas, se marier est un acte d’amour et permettre cela pour tous est un grand pas en avant», souligne-t-elle.

 

De leur grand jour, elles retiennent ce sentiment très fort qui faisait battre leur coeur au moment où elles se disaient oui. Six mois plus tard, Cindy s’en souvient comme si c’était hier : «C’était intense parce qu’à ce moment-là, notre rêve se réalisait. Avec le mariage, on franchissait une étape... J’espère vraiment que les choses évolueront dans le bon sens à Maurice parce qu’il ne s’agit pas d’un débat sur la sexualité mais que tous puissent jouir des mêmes droits et se sentir égaux aux yeux de la loi...»

Publicité