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3 août 2014 16:01
Qu’est-ce que le Kolektif Dwra Zanfan Morisien ?
Nous sommes un collectif de 16 ONG et membres de la société civile à nous être réunis pour soumettre au Comité des Droits de l’Enfant, aux Nations unies, un rapport alternatif sur les Droits de l’Enfant, en mars 2014.
Pouvez-vous nous en dire plus sur ce «rapport alternatif» ?
L’État a soumis son rapport à Genève, en 2011. Ce shadow report reflète la perception de la situation à laquelle nous sommes confrontés sur le terrain. Une perception qui diffère de celle du rapport de l’État. Il regroupe plusieurs recommandations dans divers champs de l’enfance, pour améliorer la situation des Droits de l’Enfant.
Où en est la situation concernant les Droits de l’Enfant à Maurice ?
Il y a beaucoup à faire pour que les Droits de l’Enfant à Maurice soient réellement respectés. La liste est très longue quand on prend en compte tous les articles de la Convention des Droits de l’Enfant.
L’article 3 de la convention stipule que «dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu’elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale». Ce n’est pas le cas. La liberté d’expression, l’inclusion des enfants handicapés ou enfants en situation de rue ont très peu de place.
La violence physique, psychologique et sexuelle est beaucoup trop présente et normalisée. Dans les familles, dans les institutions scolaires, dans les shelters. Selon l’article 19, «les États parties prennent toutes les mesures législatives, administratives, sociales et éducatives appropriées pour protéger l’enfant contre toutes formes de violence, d’atteinte ou de brutalités physiques ou mentales, d’abandon ou de négligence, de mauvais traitements ou d’exploitation, y compris la violence sexuelle, pendant qu’il est sous la garde de ses parents ou de l’un d’eux, de son ou ses représentants légaux ou de tout autre personne à qui il est confié».
De nombreux enfants victimes de violence ne sont pas protégés. Les familles et institutions scolaires taisent ces violences. Ce désir de les passer sous silence est alarmant.
Quelles sont les principales recommandations du document que vous avez soumis ?
Plusieurs recommandations sont regroupées en grands axes :
– L’application et l’amendement des lois concernant les enfants. Certaines lois existent, mais elles doivent être appliquées pour que les enfants soient mieux respectés dans leurs droits. La définition de l’enfant doit être harmonisée entre le Code pénal et la Child Protection Act. La section 18 du Juvenile Offenders Act doit être abolie. Au lieu de donner la possibilité aux parents de placer les uncontrollable children, il est capital d’aider les parents à la parentalité. De les informer sur le développement de l’enfant, sur les phases d’agressivité normales de ce développement.
– La violence à l’égard des enfants.
– La mise en place d’un children’s court.
– La formation de base et continue de tous les officiers et psychologues travaillant avec les enfants : officiers des ministères, officiers de police, dans les probation services, etc.
– Il est impératif de revoir les budgets : augmenter le budget annuel alloué au ministère de l’Égalité des Genres, du Développement de l’Enfant et du Bien-Être de la Famille. Pour former les officiers, en recruter d’autres. Recruter des psychologues.
Augmenter le pourcentage alloué à la protection de l’enfance car seul 20 % du budget de ce ministère est alloué à la Protection de l’Enfance.
Augmenter le pourcentage du ministère de l’Education alloué au handicap. 0,4 %, c’est loin de suffire.
Qu’en est-il de notre système éducatif ?
La liberté d’expression est quasiment inexistante dans le système éducatif. Il y a peu de place pour les activités récréatives, créatives et d’expression. Le système éducatif doit être repensé et réellement centré sur l’enfant. Lui donnant de la place pour exprimer ses pensées, ses sentiments. Le Certificate of Primary Education doit être aboli car environ 25 % des enfants sont exclus du système scolaire très tôt. Ce système élitiste est loin de donner priorité à l’épanouissement de l’enfant mauricien.
– Les services de santé ne sont pas child friendly. À l’hôpital, dans les dispensaires. Les enfants ayant le diabète de type 1 ou ceux consommant de la drogue ont besoin d’avoir une prise en charge adaptée. Et un personnel de soins formé.
– En ce qui concerne la réhabilitation et la réinsertion des enfants placés dans des shelters, aux RYC et CYC, il est capital qu’il y ait un programme de réinsertion mis en place. Un lien fréquent maintenu avec la famille. Un accompagnement psychologique de qualité.
– Il nous semble primordial d’investir dans l’accompagnement psychologique et la psychoéducation des parents et responsables des enfants. Selon l’Organisation mondiale de la santé, en 2014, «il est possible de prévenir la maltraitance des enfants. Les programmes de prévention efficaces sont ceux qui soutiennent les parents et leur apprennent à être de bons parents. L’accompagnement des enfants et des familles dans la durée peut réduire le risque de répétition des mauvais traitements et minimiser leurs conséquences […], améliorer les compétences des parents en matière d’éducation, leur inculquer de meilleures connaissances du développement de l’enfant et promouvoir des stratégies positives de gestion du comportement de l’enfant ; interventions à volets multiples, avec généralement des composantes de soutien et d’éducation des parents, enseignement préscolaire, et soins à l’enfant». Enfin, il serait primordial de mener des recherches scientifiques pour mieux comprendre les problématiques de société et mieux les gérer. Cela fait défaut à Maurice.
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