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5 juillet 2021 14:57
C’est une femme écrasée par le chagrin. Sa souffrance est intense, inimaginable, indescriptible. Véronique Parson, 42 ans, n’est plus que l’ombre d’elle-même depuis le décès tragique de son fils Mikael, âgé de 23 ans. Cet habitant de St-Pierre a été retrouvé mort sur un terrain en friche au Morcellement Highland Rose, à Phoenix, le samedi 26 juin. Le rapport d’autopsie indique qu’il est décédé d’une overdose. Véronique et son époux Mike, 43 ans, ont organisé les funérailles de leur fils le lendemain, au domicile de sa grand-mère maternelle Rénéa Marie, 60 ans, à Petit-Camp, où il vivait aussi une bonne partie du temps.
Triste coïncidence, les obsèques du jeune homme ont eu lieu le jour même où il devait fêter son 23e anniversaire. La police a arrêté trois personnes deux jours plus tard, soit le 29 juin, et deux autres, le lendemain. Elles font toutes l’objet d’une accusation provisoire d’homicide involontaire. Les cinq suspects ont avoué avoir consommé de la drogue avec Mikael dans la soirée du vendredi 25 juin. Ils l’ont ensuite abandonné au Morcellement Highland Rose alors qu’il était inconscient. Le rapport d’autopsie indique que le jeune homme a rendu l’âme peu après.
Dans l’après-midi du 25 juin, vers 18h50, Mikael avait appelé sa grand-mère pour lui dire qu’il allait rentrer tard car il allait prendre une bière avec des amis à l’occasion de son 23e anniversaire qui tombait deux jours plus tard. «Monn leve 2 zer. Li pa ti ankor rantre. Monn rant dan so lasam ankor 5 er. Li ti touzour pa la. Monn telefonn li 6 zer. Telefonn-la res sone mem me li pann pran», se souvient Rénéa. Elle a également tenté de joindre son petit-fils via Messenger mais il n’était pas online.
Vers 7h30, un des amis de Mikael a contacté Véronique pour lui demander si elle savait où il était car il devait prendre son service. Il travaillait comme aide-chauffeur. L’ami en question avait également tenté de l’avoir au téléphone, en vain. Intriguée, Véronique a appelé sa mère pour en savoir plus. C’est là qu’elle a appris que Mikael n’était pas rentré de sa virée avec des amis. «J’ai téléphoné à ses amis. C’est d’ailleurs l’un d’eux qui m’a dit que la police avait retrouvé un corps à Highlands. J’ai alors passé le message à ma mère qui habite Petit-Camp», confie Véronique. Rénéa et son fils Christophe se sont rendus directement au poste de police de Phoenix où ils ont appris l’atroce nouvelle. «Toute la famille est encore en état de choc après avoir appris que Mikael est mort par overdose», lâche Véronique, des larmes dans la voix en repensant à ce terrible drame qui s’est abattu sur sa famille.
Mikael était son aîné. Il a trois sœurs âgées de 20, 15 et 6 ans, et un frère de 12 ans. Le jeune homme collectionnait les petits boulots avant de prendre de l’emploi comme aide-chauffeur, il y a un an et demi, dans une compagnie à Bonne-Terre. Il avait mis fin à sa scolarité après avoir pris part aux examens du School Certificate. Mikael faisait régulièrement le va-et-vient entre son domicile et celui de sa grand-mère depuis qu’il est petit. Le soir du 25 au 26 juin, c’est là-bas qu’il devait passer la nuit. Mais il n’est hélas jamais rentré. «Toutelan li ti retourn lakaz. Zame li pann res lor sime. Li abitie telefonn so gramer pou dir kot li ete. Nou kone li ti pe fim enn ti mass me li pa ti pe pran simik. Fason Mikael inn mor bien difisil pou aksepte. An plis nounn bizin anter li zour so laniverser mem», soupire Véronique.
La quadragénaire avance que son fils aîné a toujours été proche avec tous les membres de la famille. Il avait une relation particulière avec chacun. «So pli gran kamarad ti mo frer Christophe. Mo bann zanfan, mo bann neve ek nies bien afekte. Mo tifi 15 zan la plis dan lapenn. Li ti plis pros ek mo garson», explique Véronique avec émotion. Elle souligne que l’amitié était aussi sacrée pour son fils. «Li difisil pou aksepte ki se kamarad mem kinn abandonn li koumsa», s’insurge sa mère Rénéa, tout aussi meurtrie par le décès tragique de son petit-fils adoré.
Le ton monte subitement. Mère et fille ont des mots très durs pour les cinq suspects. «Mo pa mem kone ki sa bann dimoun-la sa. Mo pa pou pardonn zot zame apre seki zot inn fer ek mo garson. Zot ti bizin donn li asistans. Zot inn kit li lor sime kouma enn zanimo. Fourmi rouz inn manz manz li plizir plas. Mo pa swet sa mo pir ennmi. Mo garson pa ti touss simik zame li. Mo pa akiz personn me mo panse bann-la inn fer li fim kitsoz ki pa bizin», martèle Véronique.Elle précise que son fils souffrait d’asthme. Il utilisait d’ailleurs un inhalateur personnel.
«Kit fwa li ti pou ankor vivan zordi si zot ti depoz li lakaz ou lopital sa swar-la», lâche Annetolla, la sœur de Véronique, qui est également la marraine de Mikael. Son filleul, dit-elle, avait déjà préparé son anniversaire avec enthousiasme. «Il avait demandé à ma mère de préparer du macaroni au lait avec du poulet au miel pour le repas. Il avait déjà acheté ses vêtements et une paire de chaussures neuves pour ce jour-là. Mikael a toujours été jovial. Il avait beaucoup d’amis», confie Annetolla.
Le filleul et la marraine s’étaient vus lors d’un dîner familial en famille le lundi 21 juin à l’occasion de l’anniversaire de celle-ci. «Maler vremem pena loder. Vandredi-la monn avoy li enn video komik parski li bien kontan bann blag. Mo espere li repoz an pe aster», lâche Annetolla. À ses côtés, sa mère Rénéa semble ployer sous le poids de la douleur. «C’est très dur pour une grand-mère et un grand-père d’organiser les funérailles de leur premier petit-enfant. Mikael avait une grande joie de vivre. Zis sa bann dimoun-la ek Bondie kone vremem kinn arive sa swar-la», soutient-elle.
La dernière longue conversation qu’elle a eue avec son petit-fils remonte au jeudi 24 juin quand ce dernier était rentré du travail. Le jeune homme avait expliqué à sa grand-mère et à son grand-père Lindsay qu’il devait rembourser son crédit contracté pour l’achat de son portable avant d’en prendre un autre pour acheter une moto. Il voulait avoir une grosse cylindrée. Son grand-père lui avait alors demandé d’être patient car il voulait lui acheter une voiture de seconde main en janvier. «Olie loto linn gagn enn serkey. Li pa fasil ditou pou nou fami. Nou pa ti lwin. Kifer sa bann dimounn-la pann vinn kit li divan mo laport ou divan lopital ou station lapolis ?» s’interroge Rénéa, abasourdie.
L’habitante de Petit-Camp revient à des souvenirs plus heureux. Son petit-fils, explique-t-elle, avait toujours été bien entouré. Et il aimait rigoler en disant qu’il avait deux maisons. «Li mem premie ti-zanfan dan nou kote ek ousi kote so papa. Nou ti lerwa sa. Li nepli la divan nou lizie me li pou touzour dan nou leker. Seki finn ariv li inakseptab. Monn fer boukou lapriyer. Bondie inn resi fer nou kone kinn ariv nou zom. Lor trwaziem zour mem nou finn aprann ki lapolis inn aret bann dimounn», souligne Rénéa, des larmes aux yeux.
L’écrivain Charles Baudelaire disait : «La vie a une fin, le chagrin n’en a pas.» Véronique et les siens le confirment. La mort tragique de Mikael est une douleur qu’ils porteront à jamais.
La CID de Phoenix n’a pas chômé après la découverte de la dépouille de Mikael Parson à Phoenix. Après avoir appris que les caméras de Safe City de cette région n’étaient pas encore opérationnelles au moment des faits, car elles ont été branchées le 1er juillet, des limiers de cette unité ont assisté incognito aux funérailles du jeune homme. Sur place, ils ont appris qu’un van était passé prendre Mikael dans la soirée du vendredi 25 juin. Après un véritable travail de fourmi, les enquêteurs ont procédé à l’arrestation de trois habitants de Camp Fouquereaux le 29 juin.
Il s’agit de Muhammad Dookhan, un aluminium worker de 33 ans, Shammem Jhungeer, un coiffeur de 19 ans, et Chetanandsing Jankee, un lorry helper de 21 ans. Pressés de questions, les suspects ont admis qu’ils étaient en compagnie de Mikael Parson dans la soirée du 25 juin. Selon leurs dires toujours, ils revenaient de Port-Louis dans un van conduit par un dénommé Gopal après avoir consommé de la drogue quand ils ont remarqué que Mikael était inconscient. Il était 20h30 environ. Le conducteur s’est alors arrêté au Morcellement Highland Rose et les occupants du van ont déposé le jeune homme sur le trottoir avant de prendre la fuite.
La police a arrêté deux autres suspects le lendemain : Josua Gopal, un SDF de 29 ans, et Mohammad Jeelabdeen, un maçon de 38 ans, habitant Highlands. Ces derniers sont également passés aux aveux. L’enquête policière révèle que c’était la première fois que Mikael Parson sortait avec cette bande dont il ne connaissait que le dénommé Shammem Jhungeer. Le conducteur du van, Josua Gopal, est fiché comme récidiviste notoire pour divers délit de vol et de drogue. Muhammad Dookhan est également fiché à la police pour vol au domicile d’un avoué.
Les suspects ont raconté à la police qu’ils étaient rendus à Roche-Bois pour se procurer de la drogue de synthèse. Ils ont, dit-il, «met nisa laba mem» avant de prendre le chemin du retour. Les cinq ont confirmé que c’est «premie fwa» que Mikael «inn fim ek nou». Ils font l’objet d’une accusation provisoire d’homicide involontaire. L'enquête policière suit son cours.
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