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Mort soudaine de Sandilen Mootoo, 21 ans : Ses parents, anéantis, crient à la négligence médicale

5 juin 2018

Le couple Mootoo crie à la négligence médicale suite au décès tragique de son fils Sandilen.

Ici, des chaises sont entassées sous une salle verte dressée à la va-vite. Là, des habitants d’une ruelle, à Hermitage, tentent de se faire une place au chaud sous le prélart pour éviter la brise hivernale. Là encore, des hommes se sont rassemblés dans un coin et des femmes se sont regroupées autour d’une petite lampe en terre cuite. En ce début de soirée, le vendredi 1er juin, l’animation est particulière au domicile des Mootoo.

 

Quelques heures plus tôt, tous ont assisté aux funérailles de Sandilen. Ce jeune homme de 21 ans est décédé la veille, à l’hôpital Victoria; à Candos, après avoir fait une thrombose coronaire aiguë. Depuis, ses parents ne cessent de s’interroger : comment se fait-il que le personnel soignant de l’hôpital n’ait pu détecter les symptômes ? «Notre fils a été victime d’une grosse erreur médicale», soutiennent Seeneevassen Mootoo et son épouse Rajamba. Ils reviennent sur les jours qui ont précédé la mort de leur enfant.

 

Dans la soirée du samedi 26 mai, Sandilen Mootoo se plaint de douleurs au dos et à l’estomac. Le jeune homme, qui travaillait comme helper et chauffeur pour une pharmacie à Curepipe, se trouve alors chez sa grand-mère à Queen Victoria, raconte sa mère Rajamba, 54 ans. Le lendemain, il rentre chez lui à Hermitage avant de se rendre à l’hôpital Victoria vers 17h45, en compagnie de son cousin Jevilen. Sur place, Sandilen, benjamin d’une fratrie de trois enfants, est d’abord ausculté par un médecin avant de subir plusieurs examens, dont un électrocardiogramme, la prise de sa tension artérielle et «enn tes diabet». Le jeune homme est ausculté une deuxième fois. «Tou so bann rezilta ti bon. Li ti dir dokter li krwar gaz sa. Lerla, dokter inn dir bann infirmie fer enn pikir ek li ek inn donn li preskripsion pou pran konprime gaz farmasi. Dokter ti osi dir li ki li bizin manz dan ler», se souvient Jevilen.

 

Il est 20h30 lorsque les deux cousins rentrent chez eux pour le repas familial à l’occasion de la fête des Mères. Le lendemain et le jour suivant, Sandilen se rend au travail malgré la douleur. Mais le mercredi 30 mai, il rentre chez lui plus tôt que prévu. «Il m’avait téléphonée pour me dire qu’il avait toujours des douleurs. Lorsque je suis rentrée, il dormait. Je lui ai parlé. Il me disait qu’il avait toujours des douleurs et voulait qu’on l’accompagne à l’hôpital», explique Rajamba. «Sandilen a lui-même conduit la voiture.»

 

Douleur insoutenable

 

18h15. Mère et fils débarquent alors à Candos. Rajamba se dirige au Records Office pour «tir kart». Peu après, Sandilen est examiné par un médecin qui lui fait faire un X-ray. «Kan dokter ti get so film X-ray, li ti dir li ki ena gaz ki pe rant dan so kot», explique Rajamba. Le médecin lui prescrit alors un médicament avant de lui faire une injection. Sandilen obtient trois jours de congé maladie.

 

Mère et fils rentrent à la maison vers 20 heures. Rajamba frictionne le jeune homme avant. Le lendemain, vers 8h30, Sandilen a toujours des douleurs au dos. «Il m’avait dit qu’il n’avait pas fermé l’œil de la nuit et m’avait demandé de le frictionner de nouveau. Il est descendu 15 minutes plus tard, avant de se rendre chez un cousin.»

 

À son retour, Sandilen dit qu’il souffre toujours autant. Peu après, le jeune homme se rend à la municipalité de Vacoas-Phoenix pour rencontrer le maire, dans le cadre d’un problème d’asphaltage d’une route de sa localité, mais ne parvient pas à lui parler, raconte Mareiyen, le frère aîné de Sandilen. Il rentre alors à la maison. Peu après midi, son père Seeneevassen est de retour et le retrouve dans le jardin, torse nu, la main sur les côtés. La douleur est insoutenable et Sandilen demande à sa mère de l’accompagner à l’hôpital. À leur arrivée, le jeune homme a des difficultés à marcher. «Li ti pe bizin met lame lor so lerin pou li kapav marse. Mwa kinn bizin al tir so kart. Mo dir nurs fer vit. Li ti pe soufer boukou. Dokter ti deza pe examinn enn pasian», se souvient Rajamba.

 

Quelques minutes plus tard, Sandilen et sa mère entrent en salle de consultation. «Mon fils n’arrivait plus à parler. J’ai dû répondre à sa place. J’ai expliqué au médecin que mon époux et mon beau-père sont cardiaques. Mon fils m’a fait signe de la main pour me demander à boire. Je lui ai remis une chopine d’eau. Il venait à peine d’ouvrir la petite bouteille pour étancher sa soif lorsqu’il est subitement tombé», raconte Rajamba, en larmes.

 

Ses cris stridents retentissent dans les couloirs. D’autres médecins et des membres du personnel soignant se dirigent vers la consultation. «Un médecin m’a demandé de partir pour les laisser faire leur travail. J’en ai profité pour téléphoner à mon époux et l’informer de la situation. Peu après, mon fils a été placé sur un brancard. Quinze minutes plus tard, un médecin est venu me voir pour m’annoncer ce que je redoutais», confie cette mère déchirée.

 

Interrogations

 

«Notre fils a été victime d’une grosse erreur médicale», lâche-t-elle, soutenue par son époux. Dans la soirée, ce dernier consigne une déposition au poste de police de Quatre-Bornes, en présence de son conseiller juridique. Son fils, dit-il, a reçu des soins pour «problem gaz» alors qu’il est décédé suite à une «acute coronary thrombosis», soit un problème cardiaque. Comment est-ce possible que personne n’ait détecté de symptôme lors des différentes visites de son fils à l’hôpital ? Pourquoi le médecin l’ayant fait faire un électrocardiogramme ne l’a-t-il pas gardé en observation ? N’aurait-il pas fallu faire des examens sanguins à Sandilen ? Les interrogations des proches du jeune homme sont nombreuses et sans réponse. «Kapav nou garson ti pou touzour an vi…»

 

Seeneevassen ne compte cependant pas baisser les bras. Sur les recommandations de son conseiller juridique, il envisage d’adresser une lettre au ministère de la Santé, au Medical Council et au surintendant de l’hôpital Victoria pour réclamer des explications. «Je vais attendre leur réponse avant de décider de la marche à suivre», dit-il. Contacté, le ministère de la Santé n’a pas souhaité réagir car une enquête policière est déjà en cours. Un préposé affirme, lui, que le ministère suit cette affaire de très près.

 

S’ils sont affectés, abattus, anéantis par le départ tragique de Sandilen, les Mootoo s’accrochent aux bons souvenirs du jeune homme. «Il avait des projets à n’en plus finir. Il voulait d’abord construire sa maison», confie Seeneevassen. Rajamba, elle, a plus de mal à parler. Sa douleur est intense, trop intense… Son fils, dit-elle, était exemplaire : «Il était ma joie de vivre. On a toujours été très complices. Il était également très pieux et très apprécié dans le quartier. Nous avons tous été surpris par le nombre de personnes présentes à ses funérailles. Des jeunes de Highlands étaient également présents. Sandilen les avait aidés à construire leur kanwar lors du pèlerinage de Maha Shivaratree.»

 

Des souvenirs comme ceux-là, Rajamba en a des tonnes de son fils qu’elle aimait tant. Ce fils qui s’en est allé sans réaliser ses projets et en laissant derrière lui des parents et une famille terrassés…

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