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Navin Ramgoolam : Son avenir politique en question

8 février 2015

Les partisans et les membres du PTr ont montré leur soutien à l’ancien Premier ministre, le jour de son arrestation.

Le parfum de la colère. Odeur qui prend au nez et qui fait chavirer les plus forts. Navin Ramgoolam doit la sentir, en ce moment. Partout, autour de lui, les relents de cette haine. Sur les radios, sur les réseaux sociaux, elle se déverse sur lui. Symptôme de la frustration provoquée par son personnage et ses actions, laissent entendre certains observateurs. Il l’a aussi senti à sa sortie du domicile de son père, à la rue Desforges, le vendredi 6 février (malgré la présence de quelques partisans). Beaucoup parlent des récents événements comme de sa chute ultime. Une chute politique dont il ne se relèvera pas ? Le politicien Navin est-il fini ? Ses partisans, eux, ne veulent pas y croire. Il se relèvera, dit-on.

 


L’ancien Premier ministre, sur qui pèsent provisoirement des charges de complot et de money laundering, entre autres, est apparu affaibli, hier, samedi 7 février. Sa journée de vendredi a été longue. Et les prochains jours le seront aussi, visiblement. Mais c’est dans les semaines et les mois à venir que les répercussions des récents événements sur son avenir en politique seront connues, estime Shafick Osman, géopoliticien : «Est-il fini politiquement ? Cela dépend beaucoup de la tournure des choses dans les jours, voire dans les semaines et mois à venir.» Car si les récents événements ont mis en lumière une certaine animosité envers Navin Ramgoolam, ils ont éveillé d’autres sentiments.

 


La façon de faire des policiers (décriée par certains internautes estimant qu’il s’agissait d’un cas d’instrumentalisation de la police par le gouvernement Jugnauth), les commentaires violents sur Facebook à l’encontre de l’ancien chef du gouvernement et l’impression de faire face à un Navin Ramgoolam dépassé n’ont pas laissé insensible. Ces éléments ont même poussé certains Mauriciens – et pas forcément les partisans du leader du PTr – à afficher leur soutien à l’ancien chef du gouvernement sur les radios et sur Internet. De plus, de nombreux membres du Labour Party n’ont pas tardé à faire front autour de leur chef de file. Cela, malgré les divergences d’opinions concernant son leadership depuis la débâcle travailliste lors des dernières élections : «Cette arrestation et cette détention de Navin Ramgoolam peuvent fédérer les Rouges beaucoup plus vite qu’un autre événement.»

 


Un lion blessé

 


De la colère, un sentiment de sympathie, peut-il jaillir ? Peut-être. Peut-être pas. Seul le temps le dira. Car les observateurs politiques qui sont en général au-devant de la scène ne veulent pas se prononcer. Dan Maraye ou encore Malenn Oodiah préfèrent s’abstenir. La «chute» de Navin Ramgoolam provoque-t-elle une vague de chut ? Le sujet est délicat et fait tiquer. Même les travaillistes pur sang. «Cette histoire d’argent est dérangeante», estime l’un d’entre eux, qui ne souhaite pas décliner son identité.

 


Selon lui, la famille rouge est divisée : «Il y a des gens qui se mobilisent et qui sont très fâchés de ce qui arrive à Navin Ramgoolam. Ils sont prêts à réagir à n’importe quelle instruction. D’autres ne veulent pas s’afficher, mais le supporteront même s’il est condamné. Et puis, il y a ceux qui préfèrent garder leurs distances parce qu’ils estiment que le leader n’a pas très bien agi ces derniers temps. Ils ont pris leur distance de l’homme, mais restent fidèles au parti.» Néanmoins, notre interlocuteur ne doute pas du retour de son leader dans l’arène politique : «Il sera encore plus fort ! Les Mauriciens oublient vite les erreurs de leurs dirigeants. C’est une bonne chose. Dans cinq ans, Navin sera à nouveau Premier ministre.»

 


Shafick Osman a une lecture différente de la situation : «Je pense qu’il s’en sortira affaibli, très affaibli même.» Le retour en politique, à l’avant-plan, sera difficile pour Navin Ramgoolam. Du moins, pour l’instant : «Je pense que cela prendra du temps à l’ancien Premier ministre avant qu’il ne fasse son come-back politique, je veux dire, au-devant de la scène. Et ses opposants ne le laisseront pas faire si jamais il effectue ce move.»

 


Pour le docteur en géopolitique, le futur politique de Navin Ramgoolam dépendra – en partie – de sa façon de réagir face à cette épreuve qu’il vit sur le plan professionnel, mais aussi personnel : «Navin Ramgoolam a dit qu’il était un «lion» lors de son entrée en politique. Du peu que je connaisse des lois de la jungle, je sais que le lion est un animal foncièrement guerrier. Mais attention à l’animal blessé. Il peut se rétracter et finir ses jours à l’ombre ou se venger de manière très revancharde.» Mais aussi du jugement de la cour…

 


Aujourd’hui, l’heure est à la reconstruction du Labour Party… sans Navin Ramgoolam, espère le géopoliticien : «Je le répète : il faut absolument ‘‘déramgoolamiser’’ le PTr. C’est très important, surtout depuis vendredi, afin de donner un vrai nouvel élan aux Rouges. Au-delà de l’homme, du leader, il y a le parti. Si on a compris cela, on a tout compris.» L’avenir des Rouges sans Navin Ramgoolam est-il à l’agenda ? Absolument. Et c’est le nom d’Arvin Boolell qui circule pour le succéder au poste de leader du Labour Party. Il n’entraîne pas dans son sillage le parfum de la colère…

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