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Négligence médicale alléguée à l’hôpital de Flacq

28 avril 2014

Elle ne veut qu’une chose : obtenir justice.

Elle a perdu goût à la vie. Peu à peu, elle sombre dans le désespoir tant sa douleur est immense. Mirella Rabaye, 41 ans, ne peut contenir ses émotions. Il y a quelques jours, elle a perdu son bébé peu après son accouchement, au terme de huit mois et demi de grossesse. 

 

C’est sur les ondes de Radio One, au cours de l’émission Enquête en direct le vendredi 25 avril, que cette habitante de Cité EDC, Olivia, s’est confiée sur ce drame. C’est aussi sur les ondes de cette radio privée qu’elle a avancé la thèse de négligence médicale. En effet, selon Mirella Rabaye, mère de trois enfants – âgés de 22, 21 et 10 ans –, elle a perdu son bébé «car le spécialiste n’est jamais venu». D’où ses constantes interrogations : «Où était-il ? Que faisait-il ? Pourquoi n’est-il pas venu quand on a fait appel à lui ?» 

 

C’est à son domicile, à Olivia, que nous avons rencontré le couple Rabaye. Avec son époux Patrick, 42 ans, à ses côtés, Mirella revient sur la mort tragique de son enfant. «Lorsque je suis tombée enceinte, j’étais suivie au dispensaire de ma localité. Mais en parallèle, je consultais un médecin du privé et je comptais accoucher dans une clinique. Mais ce dernier m’a conseillé d’aller à l’hôpital qui offre les mêmes services gratuitement. J’ai suivi son conseil et, quand je me suis rendue à l’hôpital de Flacq, on m’a référée à un spécialiste que je connaissais déjà. Il avait assisté à mon accouchement dix ans plus tôt. Du coup, je me suis dit que j’étais entre de bonnes mains et que je n’avais rien à craindre», explique Mirella, les larmes aux yeux. Cette décision, dit-elle, elle la regrettera toute sa vie. «Si seulement j’avais su», lâche-t-elle.

 

À huit mois et demi de grossesse, Mirella se rend donc à l’hôpital pour son rendez-vous. Nous sommes alors le 14 avril. «Le médecin m’a examinée, m’a dit que tout était normal et m’a demandé de revenir dans une semaine. Cependant, le lendemain, soit le 15 avril aux alentours de 17 heures, j’ai commencé à avoir des douleurs et je saignais, bien que très peu. Par mesure de précaution, je me suis rendue à l’hôpital. J’y suis arrivée vers 19h30», explique notre interlocutrice.

 

Manque d’expérience

 

Elle est alors prise en charge par une «très gentille» infirmière. «Elle a examiné mon ventre et m’a dit que le bébé se présentait par les pieds et non par la tête. Elle a alors appelé mon médecin. Ce dernier a demandé à l’infirmière de patienter, d’attendre que le bébé change de position. Mais les minutes passaient et les douleurs devenaient de plus en plus atroces. L’infirmière a appelé le spécialiste à plusieurs reprises pour lui demander de venir car la situation était grave. Mais il n’est jamais venu. Ce sont des étudiants en médecine qui se sont rués à mon chevet», précise Mirella.

 

Là, tous perdent le contrôle de la situation. Certainement par manque d’expérience, suppose Mirella. Mais ne pouvant plus se retenir, elle se met à pousser pour que l’enfant sorte. «Je ne pouvais plus attendre. Je poussais alors qu’on me disait de faire le contraire. Mais les pieds de mon enfant étaient déjà sortis. Je ne pouvais pas faire marche arrière. Toutefois, au lieu d’essayer de me faire accoucher, le personnel soignant essayait de faire rentrer les pieds de mon bébé. Mais il n’y est pas parvenu. On a alors enveloppé ses pieds dans un drap et on m’a conduite dans la salle de travail. Sur place, une infirmière est arrivée. Elle a fait une incision pour faciliter l’accouchement car les épaules du bébé ne passaient pas. Avec beaucoup de difficultés, j’ai finalement pu accoucher», explique-t-elle. Il est alors plus de minuit. 

 

Après l’accouchement, poursuit Mirella, le personnel soignant a pris en charge le bébé. «À un moment, j’ai entendu son cri. Je pensais donc que tout allait bien et qu’on allait le placer dans une couveuse. Je ne me suis pas inquiétée outre mesure. De mon côté, j’avais des difficultés à faire sortir mon placenta. Un médecin m’a demandé de signer un document car il fallait que je me fasse opérer d’urgence pour procéder à l’évacuation du placenta. Ce n’est qu’une fois dans la salle d’opération que j’ai vu le spécialiste. Il m’a dit qu’il se pourrait que mon utérus soit infecté et que, dans ce cas-là, il faudrait l’enlever», raconte Mirella. 

 

Une fois les effets de l’anesthésie estompés, elle reprend connaissance. «J’ai tout de suite eu le réflexe de toucher mon ventre pour vérifier s’il y avait une trace d’incision. Heureusement que non. J’ai donc conclu qu’on n’avait pas enlevé mon utérus. Mais lorsque j’ai été conduite en salle, je sentais qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas. Tous les vêtements du bébé étaient là. Le lendemain matin, lorsque mon mari est venu me rendre visite, il m’a demandé où se trouvait le bébé. Je lui ai répondu que je ne le savais pas. Il a alors interrogé le personnel soignant qui lui a expliqué que notre bébé avait rendu l’âme le soir même», témoigne-t-elle, en larmes. 

 

Depuis cet incident, elle essaie de comprendre le pourquoi et le comment, afin de situer les responsabilités dans cette affaire. «Où se trouvait le spécialiste quand le personnel soignant l’a appelé ? Comment peut-il gérer un accouchement au téléphone ? C’est incroyable. Puis, n’y avait-il pas un autre gynécologue sur place à qui on aurait pu faire appel ? D’autant qu’à un moment, j’ai demandé à ce qu’on procède à une césarienne. Mais on a refusé. Résultat : j’ai perdu mon bébé. C’est une grosse négligence», clame-t-elle haut et fort. 

 

Afin de faire la lumière sur cette affaire, Mirella a porté plainte au poste de police de Flacq. Demain, lundi 28 avril, une plainte formelle sera également déposée par son mari au ministère de la Santé. 

 

Interrogé au sujet de ce cas de négligence médicale alléguée, une source du ministère de la Santé nous a fait la déclaration suivante : «Nous avons initié une enquête interne à l’hôpital de Flacq. Le responsable est chargé de nous transmettre le dossier de la patiente et tout ce qui s’est passé le soir de l’accouchement. Par la suite, une fois que nous aurons les explications de la patiente, on sera en mesure de faire une enquête approfondie pour situer les responsabilités. Si faute médicale il y a eue, on prendra bien sûr des sanctions.»

 

Mirella, de son côté, peine à accepter la perte de son bébé. Elle qui espérait tant goûter, une fois de plus, aux joies de la maternité. Mais aujourd’hui, assure-t-elle, elle ne mettra plus les pieds dans un hôpital.

 

Mirella Rabaye et son époux ont porté plainte à la police pour négligence médicale.

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