Publicité
2 mai 2021 15:16
Des thèmes imposés, des rémunérations qui divisent, entre autres (voir hors-texte)… Le Covid-19 Artists Support Plan 2021 ne fait pas que des heureux. Les artistes tempèrent, poussent des coups de gueule mais trouvent aussi que c’est une bonne occasion de mettre en avant ce qui, selon eux, ne fonctionne pas au ministère des Arts et du patrimoine culturel.
D’ailleurs, le jeudi 29 avril, le directeur de la boîte d’événementiel et de production Culture Events and Production, Jimmy Veerapen, a invité plusieurs artistes de différents secteurs à débattre sur ce plan : Jon Rabaud et Jean-Yves Chantoiseau (cinéma), Frederick Bréville (photographie), Sedley Assonne (écriture), Didier Anthony (humoriste et comédien), Alexandrine Belle-Etoile (peinture, arts plastiques), les frères Joseph (danse), Vincent Brasse et Elvis Heroseau (musique, production musicale). Ce qu’il en ressort ? Le ministère doit avoir un budget plus conséquent ; il faut qu’il emploie des connaisseurs dans tous les domaines artistiques avec un bon bagage technique ; et il faudrait fédérer les artistes, comme une ONG, pour bénéficier des subventions de l’État et être une voix unique et unie pour communiquer avec le ministère des Arts et du patrimoine culturel. D’autres ont aussi souligné l’importance d’une vraie vision de politique culturelle et la nécessité que le statut d’artiste soit voté.
Nous, on a tâté le pouls du côté de certains artistes. Pour l’incontournable Bruno Raya, chanteur et producteur d’événements, «ce n’est pas mal de faire des artistes produire des œuvres sur des thèmes précis mais ce n’est pas un plan de soutien, c’est un concours pour faire la promotion de l’île Maurice ! L’ensemble des artistes veut un vrai soutien». Le danseur Jean-Renat Anamah parle, lui, de respect : «Nous ne sommes pas des mendiants. J’ai été choqué d’entendre les propos de monsieur le ministre. C’est quand même très racoleur ce qu’il propose. Il faut un peu de respect pour l’artiste quand même. Dans mon cas, vous pensez que je voudrais proposer une œuvre qui m’a pris la sueur d’une année, pour avoir au final peut-être que Rs 15 000 ? D’autant qu’il faut que ce soit un projet passant par un panel pour approbation sur des thèmes qu’on nous impose ?»
De son côté, l’écrivain jeunesse Amarnath Hosany a une vision plus globale : «L’écrivain mérite mieux. J’attends de voir comment se passera l’acquisition des œuvres des écrivains, ce qui pourrait aider. Mais d’une façon plus globale, il faut faire plus pour promouvoir les livres et la lecture. Et cela passe par des ateliers qui s’organisent aux quatre coins de l’île, dans les écoles, voire ailleurs, dans d’autres pays.»
Pour d’autres, ce plan aurait dû exister depuis toujours. C’est en tout cas l’avis du photographe Steeve Dubois : «Je suis sûr que beaucoup d’artistes pourront participer à ce plan, ce qui pourra soulager plusieurs. Mais ce genre de plans pour mobiliser les artistes aurait dû exister depuis un moment.» Même son de cloche du côté du réalisateur Jon Rabaud : «Positivons : c’est mieux que rien ce plan du ministère mais en même temps, il faudrait que ce ne soit pas uniquement en temps de crise qu’on vienne avec ces initiatives. Cela en dit long sur la vision, ou le manque de vision, de la politique culturelle du pays.»
Le peintre Yeshen Gunoo positive aussi mais, pour lui, «donner des thèmes précis, c’est comme dire à plusieurs artistes de dessiner une même banane. Vous aurez plusieurs styles de banane mais ce sera toujours une banane. Donc, ce n’est pas très ouvert tout ça. Je me rappelle aussi que, pour l’ancien plan mis en place, j’avais soumis cinq peintures. Ils ont pris neuf mois pour me rappeler et me confirmer l’acquisition de deux œuvres. Entre-temps, j’avais déjà vendu ces deux tableaux. Donc, une organisation plus rapide et efficace serait bien».
Entre ces interrogations et coups de gueule, il y a aussi des choses qui se mettent en place, comme la prochaine mise sur pied d’un syndicat pour le monde musical local, du nom de Moris Music Syndicate, initiative de Stephan Rezannah et son label Jorez Box. Celui-ci se calera sur le modèle d’autres syndicats à travers le monde. À suivre !
En 2020, le ministère des Arts et du patrimoine culturel avait mis en place un plan d’aide pour les artistes, qui comprenait l’enregistrement et la diffusion de concerts, showcases d’artistes émergents via une émission TV et pièces de théâtre en ligne, tout comme l’acquisition de livres et des expos online pour nos artistes plastiques. Tout ceci étant, bien sûr, des activités rémunérées. Nous avons demandé au ministère un bilan de ce premier Post-Covid-19 plan et le voici en chiffres…
◗ Plus de 800 artistes ont bénéficié du plan.
◗ 733 livres ont été achetés par le ministère, avec souvent plusieurs livres par auteur.
◗ Pour les émissions TV sur les artistes émergents, 5 ont été enregistrées, 3 diffusées, 2 le seront bientôt sur la MBC, avec, en tout, 27 artistes qui sont dans ces 5 émissions.
◗ Deux pièces de théâtre, impliquant en tout 30 personnes, ont été enregistrées au Théâtre Serge Constantin pour une diffusion en ligne.
◗ Pour les concerts virtuels, 69 groupes sont concernés, dont 45 qui ont pu perform et être payés. Le reste a, par la suite, été déployé dans plusieurs événements à la reprise des activités en groupe après le premier confinement.
Rs 9 millions pour une aide. Le Covid-19 Artists Support Plan 2021 diffère de ce que le ministère a proposé l’année dernière ; il faudra venir de l’avant avec des œuvres réunies sous des thèmes précis pour bénéficier de l’aide financière…
◗ Linite/Solidarite/Lape
◗ Listwar nou bann zanset
◗ Listwar Lil Moris
◗ Kiltir Morisien
◗ Metie Lokal
◗ Lakwizinn Morisien
◗ Proze Social ou swa Lekonomi Moris depi lindepandans
◗ Lepep Morisien
◗ Koabitasion pliri-etnik morisien
Les allocations :
Musique : Rs 15 000 pour la production d’une maquette et Rs 30 000 par la suite si la maquette est sélectionnée pour un enregistrement audio.
Littérature : Rs 25 000 par auteur pour l’acquisition des œuvres (50 livres) d’auteurs locaux. Rs 10 000 aux écrivains produisant une nouvelle basée sur les thèmes.
Peinture : assistance jusqu’à Rs 30 000 sur les thèmes.
Sculpture : assistance jusqu’à Rs 50 000 sur les thèmes.
Cinématographie : assistance jusqu’à Rs 75 000 sur la production d’un documentaire de 5 à 10 min. sur les thèmes.
Photographie : assistance jusqu’à Rs 10 000, que vous soyez photographe amateur ou professionnel, par album (10 à 20 photos) sur les thèmes.
Autres formes artistiques (danse, théâtre, spectacle) : dossiers à soumettre au ministère pour approbation.
À l’heure où nous mettions sous presse, les formulaires d’inscription pour ce plan étaient en phase de finalisation pour être mis en ligne sur le site Web du ministère. Guettez la page Facebook de celui-ci pour des updates. Ceux qui sont concernés sont les artistes enregistrés au ministère et à la Mauritius Society of Authors. La Mauritius Tourism Promotion Authority (MTPA) se chargera par la suite de la promotion des œuvres choisies dans des avions et hôtels.
Publicité