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1 octobre 2015 15:52
Quel que soit l’âge d’un enfant, il n’y a pas de plus douloureuse épreuve dans la vie que celle de perdre son père ou sa mère. Dans certains cas, la peur que les circonstances viennent lui arracher l’unique parent qui reste le hante sans cesse. Se battre alors de toutes ses forces pour le maintenir auprès de soi, devient un combat de tous les instants. C’est le combat auquel s’est livré Ethan*, un adolescent de 12 ans, en cour d’Assises, il y a deux semaines lors du procès de son père pour le meurtre de sa mère.
«Je vous supplie de me rendre mon père. Je l’ai pardonné pour le meurtre de ma mère. J’ai perdu ma maman et mon frère aussi suite à cette tragédie. Je ne veux pas perdre mon père», a-t-il supplié devant la cour, la voix remplie d’émotion. Mais un meurtre étant un meurtre, et la loi étant ce qu’elle est, le père d’Ethan qui était en liberté conditionnelle jusque-là, a été condamné à une peine d’emprisonnement de 23 ans le mercredi 23 septembre.
Vingt-trois ans. Une sentence qui a eu l’effet d’une bombe pour le fils de ce dernier, qui ainsi que ses deux frères, sont désormais sous la charge de leur grand-mère maternelle. «Depuis qu’il était en liberté conditionnelle, il prenait soin de ses fils. Sa mère l’aidait aussi dans cette tâche. Ses enfants lui ont pardonné pour le crime qu’il avait commis. Et ils s’entendaient très bien. Mais cette condamnation vient les anéantir», soutient un proche de l’accusé. Comment alors maintenir le lien parental lorsqu’un parent est en prison ? Dans bien des cas, les visites en milieu carcéral demeurent l’unique moyen de conserver un certain lien.
Dans un village situé dans l’ouest de l’île, Sophie*, 12 ans et Krista*, 5 ans, sont prises en charge par la sœur de leur mère depuis que celle-ci a été condamnée à une peine de 13 ans de prison pour le meurtre de son époux. C’était en novembre de l’année dernière. Depuis, deux samedis sur quatre, c’est accompagnées de leur tante Pamela* que les deux fillettes vont rendre visite à leur mère derrière les barreaux.
«c’est une épreuve difficile pour mes nièces. Mais au moins, elles peuvent voir leur mère, parler avec elle, même si la visite ne dure que 30 minutes», explique Pamela, elle-même mère de trois enfants âgés de 14, 10 et 3 ans. Sa condition financière était loin de lui permettre de subvenir convenablement aux besoins de ses trois enfants lorsqu’elle a pris ses deux nièces sous son aile. Mais pour certains la solidarité familiale a encore un sens. «Peu importe ma situation, j’ai promis à ma sœur de prendre soin d’elles comme si elles étaient mes propres enfants», confie Pamela qui vit dans une minuscule bicoque en tôle sur les terres de l’Etat. En situation de squatter depuis plus de trois ans, elle espère trouver une maison qui lui permettra d’élever ses trois enfants ainsi que ses deux nièces dans la dignité.
Car pour l’heure, l’unique terrain de jeux de ces petits n’est qu’un vaste champ d’eucalyptus où ils jouent à cache-cache pour la plupart du temps. «J’ai quand même de la chance, car il y a des associations qui leur font des dons. Même le maître d’école organise de temps en temps une levée de fond ou une collecte d’objets pour elles. Elles ne sont heureusement pas stigmatisées. Bien au contraire. Ici c’est un petit village où tout le monde se connaît. Les gens sont sensibles à leur situation», reconnaît-elle, les larmes aux yeux.
Mais lorsque les enfants sont en bas âge et qu’ils ne comprennent pas vraiment ce qui se passe autour d’eux, la situation est toute autre. C’est le cas du petit Farhan*, bientôt 3 ans. Lorsque 5-Plus l’avait vu pour la première fois, il n’avait que sept mois et venait de perdre sa mère, qui aurait été brûlée vive par son mari au cours d’une dispute. Le présumé agresseur est en prison et son procès débutera d’ici peu. Le garçonnet, lui, pris en charge par ses grands-parents maternels, est un petit gaillard dont la joie de vivre ne laisse pas insensible.
«Il ira bientôt à l’école. Pour l’instant, je le dépose chez sa nounou chaque matin avant d’aller travailler et le récupère dans l’après-midi. Il n’a ni frère ni sœur. Cela me chagrine, mais il a les petits voisins avec qui il joue et il s’est aussi fait un nouveau camarade chez sa nounou», confie la grand-mère de Farhan.
Mais qu’en est-il du lien entre le petit et son père ? «On ne pourra jamais lui pardonner pour ce qu’il a fait à notre fille. Je ne suis jamais allé le voir en prison. Comment pourrais-je ? Farhan n’a aucun lien avec son père. Lorsqu’il sera en âge de comprendre, il décidera de lui-même», lâche-t-elle, en nous montrant la petite pile de coupures de journaux évoquant la mort atroce de sa fille.
Des écrits qui lui permettront d’expliquer à Farhan, un jour, le drame qui a bouleversé la vie de la famille à tout jamais.
* Prénoms modifiés.
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