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1 mars 2020 22:49
Une séance explosive. C’est le moins qu’on puisse dire. Le Parlement s’est transformé en une véritable jungle le vendredi 28 février, avec des expulsions et une suspension de deux séances pour le leader de l’opposition. Les images se sont propagées comme une traînée de poudre sur les réseaux sociaux, engendrant des milliers de commentaires et de partages.
Dans cette séquence agitée, trois protagonistes se donnent le change. Le Speaker Sooroojdev Phokeer, le Whip de l’opposition, Shakeel Mohamed et le leader de l’opposition, Arvin Boolell, se sont livrés à une séance de prise de bec assez impressionnante. Tout est parti de la motion d’Ivan Collendavelloo contre un huissier de la cour qui a servi une pétition électorale en Cour suprême.
Shakeel Mohamed a d’abord fait entendre son désaccord, expliquant que cette affaire est en cour et ne devrait, de ce fait, pas être discuté au Parlement mais le Speaker était décidé à ne pas l’écouter. Comme en témoignent les images, les échanges qui ont suivi ont été orageux. Le Speaker est sorti de ses gonds et a fait grimper les décibels avec ses «Don’t shout !», «Sit down !» et «You withdraw !». Résultat des courses ? Shakeel Mohamed et Arvin Boolell ont été tous les deux expulsés et ont été, dans la foulée, suivis par les membres de l’opposition qui ont décidé de faire un walkout en signe de solidarité.
Alors que la séance parlementaire a été suspendue, l’opposition s’est, elle, réunie pour une conférence de presse commune. Selon Arvin Boolell, qui ne présentera pas de Private Notice Question pour les deux semaines à venir, cette affaire ne devrait pas en rester là : «Un Speaker doit savoir ce que la démocratie parlementaire veut dire. Il doit être à l’écoute des deux parties. Nous étudions sérieusement la possibilité de déposer une motion contre le Speaker car il doit être au courant de ses fonctions et nous avons le droit, en tant qu’opposition, de nous exprimer.»
Paul Bérenger, leader du MMM, n’a pas mâché ses mots à l’encontre du Speaker, le qualifiant de «loudspeaker». «C’est terrible. La démocratie parlementaire est en danger. Nous sommes solidaires avec le leader de l’opposition.» Patrice Armance, du PMSD, a aussi taclé Sooroojdev Phokeer qui devrait être, selon lui, la première personne à respecter les Standing Orders. «Il est clair et net que ces dernières semaines, le Parlement siège à la volonté du Premier ministre. Après les élections générales, il n’y a eu aucune Parliamentary Question présentée à l’Assemblée nationale à ce jour.»
En attendant que les choses reprennent sérieusement à l’Assemblée nationale, le Speaker est devenu la coqueluche des réseaux sociaux, créant un véritable buzz autour de ses répliques cinglantes.
Quel regard jetez-vous sur ce qui s’est passé au Parlement, vendredi ?
Je crois que ça relève de l’extrême. Il y a désormais une cassure. Une communication rompue entre le Speaker et les intervenants. Le Speaker et le Parlement. Mais aussi le Speaker et le public. Son ton est en train d’offenser les Mauriciens. Bien sûr, il faut une certaine autorité et ça se reflète sur le ton et la façon de s’exprimer. Mais il ne faut pas être agressif. Et lui est très agressif. Arvin Boolell est un bon garçon, il n’est pas agressif, c’est un diplomate de carrière. Alors, Sooroojdev Phokeer aurait dû suspendre le Parlement : when there is total disorder, you raise the Parliament.
Si vous aviez un conseil à lui donner ?
Qu’il se trouve une autre vocation. Il n’est pas fait pour ça. Il est trop grand, trop agressif…
Quelles sont les qualités d’un Speaker ?
Il faut être un facilitateur. Là où il y a de l’incompréhension, il faut calmer le jeu. Là où il y a de l’agressivité, il faut apporter de la douceur. Là où il y a de la somnolence, il faut introduire de la verve. Là où il y a de la confrontation, il faut parler de courtoisie. Le but d’un Speaker est de faciliter la compréhension entre les uns et les autres, guider les membres du Parlement en ce qui concerne les procédures…
Textes : Amy Kamanah-Murday et Yvonne Stephen-Lavictoire
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