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31 août 2021 14:36
Nul ne se serait douté qu’une simple dispute aurait eu de telles répercussions. Depuis le vendredi 27 août, Krisnav Vadee Jhowry, plus connue comme Malini, une habitante de Camp-Roches, Henrietta, ne sait plus à quel saint se vouer. En l’espace de quelques heures, sa vie a complètement basculé. Ce jour-là, son père Rengasamy Kistnasawmy a été arrêté par la Criminal Investigation Division (CID) de Vacoas pour meurtre. La police soupçonne cet homme de 77 ans d’avoir infligé un violent coup à son fils Kesaven Kistnasawmy, 38 ans, ce qui aurait entraîné la mort de ce dernier. Une autopsie pratiquée par le Dr Prem Chamane, Police Medical Officer (PMO), a attribué le décès à une hémorragie intracrânienne, probablement causée par des coups donnés par un objet.
L’alerte a été donnée dans la matinée du vendredi 27 août. Ce matin-là, l’époux de Malini, Ansooman Jhowry, plus connu sous le nom d’Avinash, se trouvait sur son lieu de travail lorsqu’il a reçu un appel de son beau-père. Rengasamy Kistnasawmy, un ancien vigile, s’inquiétait car depuis qu’il en était venu aux mains avec son fils la veille, ce dernier ne s’était pas réveillé. «Mo boper ti donn Kesaven zis enn klak pou defann li. Enn lager ti leve parski mo bofrer pa ti lav so lasiet. Li ti fini rant dan so lasam ek mont lor so lili dan sa ler-la. Se mwa kinn bizin lav lasiet ek karay-la pou li, akoz sa mo boper inn ankoler ek li», explique Avinash. Après cette prise de bec, les autres membres de la famille ne se sont, à aucun moment, rendu compte que le trentenaire, un alcoolique, allait très mal. «Quand je suis rentrée vers 19h30, mon frère était toujours dans sa chambre. Ti dan so labitid sa, se akoz sa mo pann kas latet ek li», avoue Malini.
Le lendemain, le jeune homme ne s’est pas réveillé. Ce qui a inquiété son père. Pour en avoir le coeur net, Avinash a sollicité la police de Vacoas qui, en arrivant sur les lieux à la mi-journée, n’a pu que constater le décès du trentenaire. Ce dernier, qui était allongé sur le dos dans son lit, avait le visage recouvert de sang. Des traces de sang ont également été décelées à divers endroits dans la maison, notamment sur les murs de sa chambre à coucher et dans une autre pièce. Quelques minutes plus tard, la brigade criminelle de Vacoas et le Scene of Crime Office (SOCO) sont arrivés sur place afin de tirer cette affaire au clair. Un rouleau à pâtisserie portant ce qui semble être des traces de sang sera analysé durant les jours à venir. Dans le cadre de cette enquête, Malini et son époux Avinash ont été conduits au poste afin de donner leur version des faits, après quoi ils ont été autorisés à regagner leur domicile. Rengasamy Kistnasawmy, le père de la victime, a été arrêté lorsque le rapport d’autopsie est tombé. Il a passé la nuit en détention.
Les proches de Kesaven Kistnasawmy racontent que la vie de ce dernier a basculé il y a 12 ans, lorsqu’il s’est séparé de son épouse, avec laquelle il a un fils de 14 ans. Celui-ci vit avec sa mère à Albion. «Il n’avait pas d’emploi fixe et cumulait des petits boulots. L’argent gagné, il l’utilisait pour s’acheter des boissons alcoolisées. Il buvait beaucoup tous les jours mais à chaque fois qu’il prenait une cuite, il s’endormait tranquillement dans sa chambre», lâche Malini. À ce stade, le couple Jhowry est partagé entre choc et incompréhension. Pour cause, père et fils, disent-ils, «ont toujours été calmes et tranquilles». Malini raconte : «Mon frère s’occupait des tâches ménagères, nettoyait la cour et donnait à manger à mon père depuis le décès de notre mère, il y a cinq ans. Se zis kan li bwar ki li ti pe fatig nou latet inpe me kan li ti azin, li ti mari korek.» Depuis peu, il avait commencé à consommer de l’alcool dénaturé. Le jeudi 26 août, il était d’ailleurs tombé ivre-mort après avoir consommé «enn topet lalkol».
Le samedi 28 août, Malini a pu rencontrer son père dans les locaux de la CID de Vacoas. «Monn amenn biskwi ek dilo pou li. Monn dir li fer enn demars manz inpe parski li paret bien afekte ek fatige. Sa mem tou monn kapav dir li avan ki bann lapolis-la pran li pou al poz li kestion ek so avoka», confie Malini. À ce stade, Rengasamy Kistnasawmy clame s’être défendu lorsque son fils a voulu s’en prendre à lui (voir hors-texte). Il a retenu les services de Me Sunil Bheeroo. Le même jour, le septuagénaire a comparu devant la Bail & Remand Court (BRC) pour son inculpation provisoire pour manslaughter (meurtre), avant d’être reconduit en cellule. Les funérailles de la victime sont prévues pour 10 heures ce matin.
Il a comparu devant la Bail & Remand Court hier matin, avant d’être reconduit au Vacoas Detention Centre pour une deuxième nuit en cellule policière. Rengasamy Kistnasawmy fait l’objet d’une charge provisoire de «manslaughter». Cet homme de 77 ans doit comparaître devant le tribunal de Curepipe ce lundi 30 août. Son avocat, Me Sunil Bheeroo, va présenter une motion pour sa remise en liberté sous caution. «Mon client regrette ce qui s’est passé. Il ne s’attendait pas à perdre son fils de cette façon. Il nie avoir agressé son fils. Il s’est simplement défendu lorsque ce dernier a tenté de l’agresser, le jeudi 26 août», explique l’homme de loi.
Dans sa déposition, Rengasamy Kistnasawmy explique que son fils était devenu alcoolique depuis son divorce. Ce dernier précise que sa belle-fille et son petit-fils sont partis parce que son fils buvait trop et ne travaillait pas. Le vieil homme vivait sous le même toit que ce dernier ainsi que sa fille et son gendre. Sa fille aînée et son épouse sont déjà décédées. Le septuagénaire raconte qu’il avait pour habitude de transporter son fils à l’hôpital régulièrement pour le faire soigner, soit pour une chute, soit pour d’autres complications de santé. Père et fils ont eu une altercation, en début d’après-midi, le jeudi 26 août.
«Mon client avait réprimandé son fils car il n’avait pas fait la vaisselle. Ce dernier a voulu l’agresser. Le vieil homme a dû se défendre. Il est parti en le laissant dans son lit. Il l’a retrouvé inconscient, le lendemain», précise Me Bheeroo. Ce dernier ajoute que «la police n’a aucune preuve que son client a agressé son fils». Rengasamy Kistnasawmy participe à une reconstitution des faits ce matin à 8 heures.
Elodie Dalloo & Jean Marie Gangaram
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