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Par Yvonne Stephen
19 septembre 2016 12:26
Un verre d’eau ? À consommer sans modération pour digérer l’«indigérable». Depuis les récentes révélations de sir Anerood Jugnauth concernant, entre autres, l’affaire des doubles communiqués (voir hors-texte)– où il a impliqué Roshi Bhadaintout en trouvant une parade pour l’absoudre au passage –, il y a une drôle de fantaisie qui a frappé l’Alliance Lepep. Un petit jeu de devinettes, une petite recherche d’hypothèses. Du pétillant pour politicien, quoi ! Presque rafraîchissant – comme une boisson gazeuse fraîche, en plein été – en cette période où le lait a déjà commencé à tourner. Il ne concerne pas la succession de Pravind Jugnauth au poste de Premier ministre (que l’opposition qualifie dekado papa a so piti) : ça, c’est quelque chose de connu et d’«accepté» par tous depuis un moment, affirme-t-on du côté des Lepep.
La question qui fait partie de ce game of throneest la suivante : quel lien existe-t-il entre le Premier ministre et son ministre de la Bonne Gouvernance pour que Roshi Bhadain fasse encore partie du gouvernement ? Surtout que cette relationship– en mode Facebook : In a complicated relationship– serait une des raisons des relations tendues entre sir Anerood et son fils. Pour un membre du MSM, c’est l’interrogation du moment. Le talk of the Sun Trust, quoi : «Nous sommes tous derrière Pravind. Il représente l’avenir. Mais nous sentons bien qu’il y a un souci avec le ministre de la Bonne Gouvernance et nous nous demandons comment il n’a pas encore démissionné. Certains disent que SAJ le protège.»
Surtout, affirme-t-il, qu’en matière de fer ale, le Premier ministre ne fait pas, en général, dans la délicatesse :«Dayal et Lutchmeenaraidoo sont bien des exemples que si, dans ce gouvernement, on veut faire quelque chose, on va le faire. Le cafouillage dont Bhadain est responsable pour les communiqués est quelque chose de bien grave.»L’autre cafouillage dans le sillage d’Heritage City (pour ne pas dire dans celui du ministre de la Bonne Gouvernance) : trois officiers du Central CIDont débarqué chez Gérard Sanspeur en l’absence au pays du leader du MSM, dont il est le conseiller spécial (voir hors-texte),pour le convoquer dans le cadre de l’enquête initiée suite à une déposition faite contre lui par Roshi Bhadain.
Le tombeur (avec la bénédiction du ministre des Finances) d’Heritage Cityne s’attendait certainement pas à cette action policière ou aux critiques ouvertes de SAJ lors de son point de presse, le lundi 12 septembre. Mais visiblement, le projet de toutes les controverses (et seul point de discorde entre Pravind Jugnauth et son Premier ministre de père, selon les dires de ce dernier) n’a pas fini de diviser et de faire jaser. «Bon, on ne peut pas ne pas trouver de lien entre tout ça, quand on regardethe larger picture. Mais ce serait faire des allégations que d’en dire plus»,affirme un ancien du MSM, qui a pris sa retraite politique.
Un nuage épais surplombe cette situation ambiguë. Ainsi que sur les interrogations qui visent à savoir comment et pourquoi le ministre de la Bonne Gouvernance se trouve encore au gouvernement. Si certaines rumeurs laissent entendre que Roshi Bhadain serait en possession de papiers compromettants contre la famille Jugnauth et que c’est ce qui provoquerait cette situation pourrie, notre interlocuteur n’y croit pas : «Je ne crois pas que SAJ aurait peur de ce genre de choses.»La peur d’une partielle dans la circonscription du ministre de la Bonne Gouvernance, en cette période d’impopularité, serait-elle à craindre ? «Pas du tout ! Nous avons la majorité. Un siège de perdu ne changera rien», assure un député MSM, qui ne veut pas faire plus de commentaires.
Reste à trouver la réponse, la vraie, pour faire entrer la lumière. Celle qui n’est pas faite de suppositions, de rumeurs et de mauvaise foi. Et pour l’instant, c’est une mission difficile. Au niveau du MSM, on ne veut pas vraiment commenter. Les autres partenaires de l’Alliance Lepep préfèrent cultiver le mystère. Et puis, il y a Ivan Collendavelloo, le leader du ML, qui a décidé de ne pas dire que des belles choses sur le ministre de la Bonne Gouvernance, sans, à aucun moment, interroger la relation de ce dernier avec SAJ. «Il a dit tout haut ce que beaucoup d’entre nous pensent. Mais je ne suis pas sûre que c’était unmove intelligent», confie une conseillère du PMSD.
Ou peut-être que ça l’était… pour faire plaisir à Pravind Jugnauth, le futur big boss. Roshi Bhadain, lui, ne commentera pas les paroles du leader du ML. Pas pour l’instant et pas directement (sauf sur sa page Facebook, of course), assure-t-on du côté de son entourage. «Ilest beaucoup plus intelligent que ça»,confie un de ses proches. Il ne lâche rien. S’accroche à son poste et à son ministère «parce qu’on veut bien le laisser s’accrocher», persiste notre interlocuteur. «Posez-vous la bonne question : pourquoi, malgré tout ce qu’on a pu dire sur lui, Roshi Bhadain est toujours ministre ? C’est qu’il fait bien son travail et qu’il est un atout pour ce gouvernement», poursuit-il.
Il ajoute que, selon lui, il n’y a aucun problème entre SAJ et son fils : «Il lui a quand même assuré le poste de Premier ministre, non ?»Néanmoins, certaines personnes bien informées au sein du MSM ont une autre version des faits. Annoncer aussi tôt ce secret de polichinelle – que Pravind Jugnauth sera chef du gouvernement –, c’est un dealentre le père et le fils : une façon de faire patienter l’impatient leader du MSM et de s’assurer qu’il ne s’attaque pas au ministre de la Bonne Gouvernance. Pour l’instant. Parce que dès que le ministre des Finances sera aux commandes – remaniement ou pas –, les plans ministériels de Roshi Bhadain risquent bien de tomber à l’eau…
Heritage City – l’affaire du double communiqué.Il y a eu deux communiqués officiels émanant du bureau du Premier ministre dans la soirée du vendredi 9 septembre : le premier ne faisant pas mention du revivald’Heritage City. Le lendemain, Pravind Jugnauth s’étonnait de cette situation et assurait que le projet n’était pas on. Le Premier ministre a déclaré que c’est Roshi Bhadain qui a demandé à Yanduth Gaonjur, Permanent Secretary responsable de la rédaction du communiqué, d’apporter ce changement : «Il a appelé pour demander pour quelle raison le communiqué ne mentionne pas Heritage City.»Le sujet avait été évoqué au Conseil des ministres, mais le terme choisi, celui de revival, n’était pas approprié, selon le Premier ministre.
Pravind Jugnauth, Premier ministre. Il ne pourra pas compléter son mandat et c’est son fils, en tant que leader du parti qui détient la majorité, qui lui succédera. Un remaniement ministériel devrait aussi avoir lieu.
Une gifle à Kailash Trilochun. Il a mis au défi l’avocat de rendre publics les documents qu’il dit détenir et a menacé de prendre des actions légales contre lui.
Question time ! Les propos de SAJ ont soulevé une vague de questions auxquelles tentent de répondre depuis quelques jours les politiciens et les observateurs politiques : 1) Quand la passation de pouvoir du père au fils aura-t-elle lieu ? 2) Une partielle sera-t-elle organisée dans la circonscription de SAJ ou alors conservera-t-il son poste de député et occupera d’autres fonctions au sein du gouvernement Lepep ? 3) Le remaniement ministériel sera fait sous le Premier ministre SAJ ou le Premier ministre Pravind Jugnauth ? 4) Comment un ministre peut-il influer, à travers un coup de fil, sur la diffusion d’un communiqué émanant d’un Conseil des ministres ?
L’interpellation de Gérard Sanspeur a eu quelques conséquences ? Les voilà : une enquête interne a été initiée pour déterminer qui a donné l’ordre de cette intervention et si un mandat d’arrêt avait été émis contre Gérard Sanspeur. Et l’enquête sur les allégations faites contre lui par le ministre de la Bonne Gouvernance a été confiée à une autre équipe du Central CID.
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