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Sécurité routière : de nouvelles amendes qui secouent experts et usagers de la route

23 juin 2024

On va payer plus cher et il y a de quoi être secoué ! Le Road Traffic (Amendment) Bill sera débattu au Parlement ce mardi 25 juin. Le ministère du Transport proposera pas moins de 40 amendes dont les tarifs connaîtront une hausse alors que la liste des délits cumulatifs passera de 11 à 32. Ainsi, pour les délits autour des plaques d’immatriculation, l'amende coûtera Rs 5 000 et pour les excès de vitesse, les amendes passeront de Rs 10 000 à Rs 12 500 pour ceux dépassant de 25km/h la vitesse autorisée (elles restent inchangés pour les excès de vitesse de moins de 15km/h et 25 km/h).

 

Plusieurs amendes passent aussi à Rs 5 000, comme le non-port de la ceinture de sécurité (pour ceux à côté ou à l’arrière, ça reste Rs 2 000), ne pas porter de vêtement visible ou un casque de protection adéquat à moto, ne pas avoir de vignette d’assurance visible sur la voiture ou la motocyclette, la modification d’un silencieux sur le tuyau d’échappement d’un véhicule, les rétroviseurs non-conformes, doubler sur un passage clouté, entre autres. 

 

Lors d’une conférence le vendredi 21 juin, le ministre du Transport Alan Ganoo, tout en annonçant une révision à la baisse de l’amende pour la plaque d’immatriculation non conforme (passant de Rs 25 000 à Rs 5 000 ; à coup sûr l’amendement qui a provoqué le plus de tollé), est venu de l’avant pour dire qu’outre tous les nouveaux tarifs des amendes, les structures utilisées lors des processions religieuses et non-religieuses seront réglementées par la loi si les amendements sont votés – la définition du mot «traffic» dans la loi sera aussi amendée pour inclure, justement, ces structures. Aussi, l’administration de la National Land Transport Authority sera revue pour que les vendeurs et acheteurs de véhicules n'aient pas à aller plusieurs fois à la NLTA pour leurs certificats de gages. Certificats de gages dont les démarches pourront aussi se faire en ligne. Le ministre Ganoo a ajouté que «c’est faux de dire que nous voulons remplir les caisses de l’État avec ces hausses de tarifs, nous voulons juste que les usagers de la route soient conscients de leur responsabilité sur la route».

 

«Back Pedal», «Eye Opener» 

 

Qu’en est-il de ceux directement concernés ? Avec plus de 600 000 véhicules sur nos routes, c’est clair que ces nouvelles amendes vont directement impacter tous les conducteurs de motocyclettes et des voitures. À l’exemple de Vandana Hookoom, 28 ans, qui conduit sa voiture depuis plus de deux ans. «C’est clair que beaucoup d’automobilistes ne respectent pas le code de la route. Je dois être toujours vigilante car certains motocyclistes et automobilistes ont des comportements imprévisibles. Et beaucoup ont de l’argent et font fi des amendes. Avec ces augmentations, espérons qu’on sera plus responsables sur la route. Je le suis déjà, mais il faudra l’être encore plus. Mais on a aussi tendance à croire, vu la conjoncture économique, que c’est un moyen de remplir la caisse de l’État. Qu’importe, je pense qu’au final, chacun devra être plus vigilant.» 

 

Son ami, Jerry Jean-Pierre, a son permis depuis peu de temps, et il ne manque pas de souligner les sacrifices nécessaires pour arriver à décrocher cefameux sésame : «J’ai donné beaucoup de mon temps, de mon argent et de mon énergie pour avoir le permis, sans oublier les dépenses pour la voiture. Et maintenant, voici que les amendes augmentent. Alors, oui, il faudra être plus vigilant ! C’était stressant aussi de voir ce chiffre de Rs 25 000 concernant une plaque d’immatriculation bon-conforme, qui a heureusement été revu à la baisse. Donc, pour moi, bad timing, surtout qu’on parle beaucoup de baisse du pouvoir d’achat et de budget de plus en plus serré pour les Mauriciens depuis un moment. Sans compter le prix du carburant.»

 

Il y a aussi d’autres qui roulent leur véhicule depuis longtemps, comme Lucinda Séblin, qui conduit depuis près de 18 ans. Et elle accueille cette hausse du tarif des amendements de façon plutôt positive : «C’est une bonne chose toutes ces amendes qui grimpent. Je conduis depuis longtemps et je pense que plus que jamais, les automobilistes font preuve d'un grand manque de courtoisie, certains ne font plus attention, roulent sans prendre en compte leur prochain, automobilistes ou piétons. Donc, oui, j’espère que ces amendements feront réfléchir plus sur leur comportement sur la route.» 

 

Nos experts ont eux également, bien sûr, leur mot à dire sur le sujet. Barlen Munusami, ex-sergent de police et consultant et expert en sécurité routière, à qui nous devons aussi le livre Le Guide Complet du Conducteur, n’y va pas de mainmorte et s’interroge sur les amendements dans leur ensemble : «Le fait que le ministre a back pedal sur les Rs 25 000 autour des plaques d’immatriculation montre que cela a été un eye opener pour lui. Il faudrait un peu plus de logique dans ces amendements effectivement. Le ministère doit garder en tête que les amendements doivent avant tout empêcher des accidents, si c’est bien là son objectif, et qu’il faudrait départager ces hausses des tarifs de façon équitable et sensée. Je m’interroge aussi sur tout  ce qui va être présenté ce mardi ; j’espère ne pas avoir de mauvaises surprises.» 

 

Manoj Rajkoomar, secrétaire de la fédération des moniteurs d’auto-école, va dans le même sens : «C'est un projet de loi qui, selon moi, vise à augmenter les revenus de l’État. Je suis convaincu que si nous avons envie de diminuer les accidents de la route, c’est avant tout par le changement de comportement des usagers de la route que cela doit passer. Faire monter le chiffre d’une amende pour des plaques numérologiques n’a rien à voir avec la sécurité sur nos routes !»

 

Pour Alain Jeannot, président de Prévention Routière Avant Tout (PRAT), des amendements à la sécurité routière doivent avant tout se faire en trois axes : «Il faut que tout concorde si nous voulons réduire les accidents. Tout d’abord, il faut avouer que l’entretien des mobiliers de route et des marquages laisse souvent à désirer, tout comme certains panneaux indicateurs. Ensuite, oui pour de la sévérité comme avec ces amendements, mais qui doivent aussi être accompagnés d’une sensibilisation accrue et d'une bonne formation des conducteurs, le tout avec les outils disponibles, notamment les réseaux sociaux.» 

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